Les Louves de Bobigny pointent du doigt des propos racistes "entendus sur et en dehors du terrain" lors du match de Coupe de France qui les opposait dimanche à Lons Section Paloise. Le club appelle à "prendre la mesure de ce fléau".
"Un week-end rugby victorieux avec une belle réponse mais pas que… face à des propos inacceptables", écrit sur Instagram la joueuse de l’AC Bobigny 93 Awa Diakité. Suite à la victoire des Louves de Bobigny face à Lons Section Paloise (18-20), Awa Diakité dénonce des insultes "de la part du public" béarnais : "sale connasse" et "rentrez chez vous". Elle explique aussi avoir entendu des propos racistes et discriminatoires de la part de joueuses de Lons : "j’ai l’africaine", "sale noire" et "calme toi, on n’est pas à la cité".
"En tant que sport inclusif, de se dire qu’en 2024 des actes verbaux de ce genre peuvent être dits… Chaque acte raciste nous rappelle que nous avons encore un long chemin à parcourir pour atteindre une société véritablement juste et équitable. Je partage deux sentiments, je suis triste à la fois de jouer dans ces conditions, mais à la fois heureuse de partager des valeurs avec ce groupe de copines", écrit Awa Diakité.
Son message a été relayé sur Instagram par l’internationale française Madoussou Fall, qui a joué cinq saisons à Bobigny et qui raconte avoir "également connu ce genre de propos sur le terrain par le passé".
Sur franceinfo, Gabriela Tanga, la capitaine des Louves, estime "inconcevable" de "subir ce genre de propos". La joueuse, qui était dans les tribunes lors de la rencontre, souhaite aujourd'hui "dénoncer le racisme sur le terrain" pour que de "réelles mesures soient prises". En faisant le récit des faits, Gabriela Tanga explique que son équipe "n'a pas eu le déclic d'aller voir l'arbitre" - qui n'a pas entendu les insultes - "pour arrêter le match". La capitaine assure que son équipe prendra "la décision de sortir du terrain" si un nouvel incident de ce type se produit.
"Ces propos stigmatisants à l’égard de nos joueuses ne sont pas des cas isolés"
"Trop c’est trop ! Comme de nombreux week-ends, dimanche dernier, le match des Louves a été entaché de propos irrespectueux et à caractère raciste entendus sur et en dehors du terrain", dénonce l’AC Bobigny 93 Rugby dans un communiqué. "Ces propos stigmatisants à l’égard de nos joueuses ne sont pas des cas isolés, nos équipes y étant malheureusement et régulièrement confrontées. Mais cette fois-ci est celle de trop", souligne le club.
L’AC Bobigny 93 Rugby, qui appelle "tous les clubs et la Fédération Française de Rugby" (FFR) à "prendre la mesure de ce fléau afin de l’éradiquer", pointe du doigt des événements qui "sont bien le fait d’une poignée d’individus qui ne représentent en rien les valeurs de notre sport ni celles" du club de Lons. Les directions des deux formations ont d’ailleurs "échangé" pour "faire la lumière" sur les faits et "envisager les mesures adéquates".
"Les Louves de Bobigny évoluent au plus haut niveau féminin depuis de nombreuses années. Le Club est fier de son identité empreinte de diversité culturelle, sociale, religieuse, socio-professionnelle", peut-on lire. L’AC Bobigny 93 Rugby espère que "cette situation fasse émerger des solutions et une prise de conscience collective". "En revanche, toute menace, injure ou discrédit porté(e) à l’encontre du Club de Lons par le biais des réseaux sociaux ne peut être admis(e)", ajoute le communiqué.
Des "accusations extrêmement graves"
Lons Section Paloise réagit également via un communiqué, suite à "des publications sur les réseaux sociaux" qui "font état de propos racistes autour de notre rencontre contre l’AC Bobigny 93".
"Dès que nous avons eu connaissance de ces accusations extrêmement graves, nous nous sommes rapprochés des dirigeants de l’AC Bobigny 93, mais également de l’arbitre de la rencontre, pour tenter d’établir l’exactitude des faits", écrit le club.
La formation béarnaise affirme qu'elle "saura prendre les mesures nécessaires et adaptées". "Le racisme n’a pas sa place dans notre sport et encore moins dans notre club, pour lequel nous nous attachons depuis de nombreuses années à mettre en avant le respect, la tolérance et l’inclusion au cœur de notre engagement et des valeurs de notre association", ajoute le club.
"La FFR condamne fermement les actes de racisme constatés lors de certaines rencontres"
De son côté, la FFR "condamne fermement les actes de racisme constatés lors de certaines rencontres et apporte son soutien aux joueuses et dirigeants concernés". Dans un communiqué, l’organisme "réaffirme son engagement inébranlable contre le racisme sous toutes ses formes dans le rugby".
"En cette période où la société fait face à des défis croissants liés à la discrimination et à l’intolérance, nous croyons fermement que le rugby a le pouvoir de rassembler les individus et de promouvoir des valeurs de respect mutuel, d’inclusion et de solidarité", peut-on lire.
La FFR rappelle également les règles en vigueur : "Tout officiel de match témoin de faits discriminatoires ou incitant à la discrimination (à raison de l’apparence, de la couleur de peau, du sexe, de l’orientation sexuelle…), à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes, en informera sans délai l’arbitre s’il ne l’a pas lui-même constaté. Celui-ci devra interrompre la rencontre et exiger du Président de l’association organisatrice du match (ou son délégataire) de prendre toutes dispositions pour mettre un terme au(x) trouble(s) relevé(s). La partie ne reprendra qu’après cessation des faits. A défaut, l’arbitre pourra décider de l’arrêt définitif de la rencontre."
L’organisme affirme enfin qu’il "continuera à mettre en place des programmes et des initiatives visant à sensibiliser, éduquer et lutter contre le racisme dans le rugby".
"Le racisme n’a pas sa place dans notre sport"
Dans un message publié sur Instagram, Provale, le syndicat des joueurs et des joueuses de rugby qui évoluent en France, apporte "tout son soutien" aux joueuses de Bobigny, "victimes d’injures racistes" lors du match.
Voir cette publication sur Instagram
"Les propos tenus à leur encontre sont inacceptables et vont totalement à l’encontre de nos valeurs. Nous les condamnons fermement. Le racisme n’a pas sa place dans notre sport et nulle part ailleurs", conclut le syndicat.