"Sauvez-nos enfants", action symbolique devant l'école Pleyel-Anatole France menacée par un projet d'échangeur routier

Des militants et parents d'élèves ont organisé ce matin une action pacifique contre un projet d'échangeur routier entre l'A1 et l'A86 à Saint-Denis. Construit en vue des JO, il menace la santé des 700 élèves de l'école Pleyel-Anatole France entourée par les futures bretelles d'accès.

Ils sont arrivés discrètement par petits groupes, tôt ce matin peu avant la rentrée des élèves. Pour la cinquantaine d’activistes d’Alternatiba Paris, du collectif La Rue est à nous et l’association Respire, l’objectif est de barrer la circulation déjà dense de l’avenue qui longe le groupe scolaire Pleyel-Anatole France et d'installer sur le bitume libéré des voitures, une aire de jeux éphémère.

Une aire de jeux éphémère

Arbres en carton, marelles, barnum et chaises longues ont remplacé quelques minutes le défilé des voitures.

"L'action est symbolique. On se mobilise aujourd’hui devant le groupe scolaire Anatole France où 700 enfants sont scolarisés. Une sortie d’autoroute est prévue juste ici à quelques mètres de la cour de récréation où les enfants jouent. Cela en vue des JO de 2024", explique Vincent Bézaguet, le porte-parole d’Alternatiba Paris. "Cest inadmissible de faire passer des projets y compris pour les JO de 2024 devant la santé des enfants et devant les impacts et les conséquences pour les habitants", poursuit-il.

Projet d’échangeur routier

Dans le cadre d'un projet de réaménagement des accès à l'A1 et l'A86, deux nouvelles bretelles d'accès devraientt voir le jour à 2 pas de la cour de récréation sur les deux boulevards qui entourent le groupe scolaire. L'école serait donc prise en tenaille par ces nouveaux échangeurs. Il s'agit pour ses concepteurs, de faciliter l'accès au futur village olympique. Mais aussi de fermer à la circulation l'ancien échangeur qui sature une autre partie de Saint-Denis. Devant l'école, la circulation passerait de 10 000 à 20 000 véhicules jours voire 30 000 selon certaines sources.

Inquiétude des parents et des enseignants

Le papa de Maceo, scolarisé en Grande section de maternelle est inquiet. "Je ne comprends pas pourquoi on accepte de construire un échangeur aussi près d’une école. Cela va polluer l’air que nos enfants respirent. Je ne comprends même pas comment cela a pu être envisagé dans la tête des décideurs", s'exclame-t-il. "Si on nous propose une alternative, de construire une école ailleurs, un peu plus loin de l’autoroute, il n’y a pas de problème pour construire cet échangeur", ajoute-t-il.

Marie (dont le prénom a été modifié) est enseignante en classe de CM2 à Anatole France. "Tous les matins, il y a des bouchons. Cette école a été construite à côté de grandes artères. J’ai une élève qui a des problèmes d’asthme. Elle est très souvent absente. L’échangeur ne va pas arranger les choses ! Quand je suis arrivée dans cette école, je me suis dit que moi aussi j’allais me prendre cinq ans de moins tellement c’est pollué", déplore-t-elle.

On ne comprend pas comment on a pu concevoir un tel projet

Frédéric Leonhard, vice-président de Respire

Même sentiment d’incompréhension pour Frédéric Leonhard le vice-président de Respire. L’association nationale pour l'amélioration de la qualité de l'air est venue apporter son soutien à cette action de désobéissance civile et pacifique. "Les enfants sont les plus fragiles au niveau respiratoire. On ne comprend pas comment on a pu concevoir un tel projet", s’interroge-t-il. Ici, l'association envisage d'installer des capteurs d'air citoyens destinés à permettre une première évaluation de la pollution de l’air.

De grâce, aidez-nous à sauver nos enfants

Hamid Ouidir, parent d'élèves et membre de la FCPE

C’est avec des sanglots dans la voix qu’Hamid Ouidir, pourtant habitué des mobilisations, prend la parole. Père de deux enfants scolarisés dans l’établissement, il est membre du comité départemental de la FCPE. Il appelle aujourd'hui à l'aide.

"On veut alerter les élus locaux, les élus départementaux sur la problématique de cette école qui est déjà saturée en terme de pollution mais personne ne nous écoute depuis 2019", dénonce-t-il.

"Un échangeur routier va emprisonner une école de 700 enfants âgés de trois à 12 ans. Nous ne sommes pas contre ce projet, nous ne sommes pas contre les JO mais cela ne doit pas se faire au détriment des enfants. Nous voulons sanctuariser cette école", plaide-t-il.

Les errements de la justice administrative

La FCPE 93 et plusieurs requérants ont déposé des recours contre ce projet d'infrastructure routière conduit par la Solideo, l'établissement public chargé de la construction des ouvrages olympiques de Paris 2024.

Dans un premier temps, la justice administrative a donné gain de cause aux opposants suspendant la déclaration d’intérêt général des travaux de l’échangeur avant de revenir sur sa décision quelques mois plus tard. Selon la cour d’appel administrative, ce projet est "bien d’intérêt général en raison des avantages socio-économiques".  Elle a toutefois reconnue les risques d'aggravation de la pollution de l’air pour le groupe scolaire Pleyel-Anatole France.

La FCPE 93 a déposé un nouveau recours devant le conseil d’État qui n’a toujours pas statué à ce jour. "Nous voudrions que les élus locaux prennent leurs responsabilités sur ce dossier. On ne peut pas laisser faire ce projet", s'alarme Hamid Ouidir.

Les enfants de l'école Pleyel-Anatole France n'auront pas profité de cette aire de jeux éphémère. Les policiers ont démonté dans le calme marelles, tables et chaises longues déposées sur la chaussée rendant l'avenue à la circulation.

Lancement des travaux

Les travaux de construction de l'échangeur ont tout juste commencé sous l'égide de la Dirif, la Direction régionale des routes d'Île-de-France et de la Solideo, la société chargée de la livraison des ouvrages olympiques pour Paris 2024.

La ville n’est pas le maître d’ouvrage et n’a pas les moyens de faire arrêter ces travaux

Shems El-Khalfaoui, élu à la mairie de Saint-Denis

Selon Shems El-Khalfaoui, adjoint à la mairie de Saint-Denis en charge des Sports, des Jeux Olympiques, du Développement économique et de l'Insertion, "la ville n’est pas le maître d’ouvrage et n’a pas les moyens de faire arrêter ces travaux. (...) Après deux années de concertation avec la Dirif, nous avons obtenu que le futur échangeur arrive à 11 mètres de l'école. Alors qu'aujourd’hui, la sortie Anatole France est à moins de 2 mètres de la chaussée. En terme de circulation, de bruit et de pollution, ce n’est pas la même chose d’avoir une route à 2 m est à 11 m", explique l'élu.

Shems El-Khalfaoui affirme également que la ville a fait installer des capteurs pour mesurer la pollution de l'air au sein de l'école Pleyel-Anatole France ainsi que dans 2 autres établissements scolaires de la ville. "Quand l’échangeur sera mis en route, nous continuerons à faire des mesures et on fera une comparaison entre l’avant et l’après et si les mesures sont mauvaises, on demandera à l’État de prendre ses responsabilités." assure-t-il. 

D'autres aménagements liés aux JO font l'objet de contestations en Seine-Saint-Denis, comme la construction du village des médias à Dugny ou les travaux sur le terrain de jardins ouvriers à Aubervilliers.

 

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