Un éclairage public bioluminescent. C'est une première mondiale inaugurée ce vendredi par la municipalité de Rambouillet dans les Yvelines. Une innovation biotechnologique, mise au point par une équipe de chercheurs, et développée par une start-up francilienne qui cultive des bactéries marines lumineuses.
Des bactéries marines pour éclairer l'espace public grâce à la bioluminescence. Un phénomène naturel lumineux, fascinant, que l'on observe notamment chez les poissons des abysses ou chez les calamars. Pendant quelques mois, la Ville de Rambouillet va expérimenter cette source lumineuse venue des fonds des mers pour éclairer une place publique où se trouve un centre culturel appelé "la Lanterne".
Des milliers d'essais
Ce dispositif d'éclairage, intégré à du mobilier urbain, a été conçu par une start-up française, basée à Evry dans l'Essonne. L'entreprise Glowee planche, depuis deux ans, sur ce projet d'éclairage alimenté par des bactéries marines. Elle a procédé à des milliers d'essais avant de lancer son installation à Rambouillet comme nous l'explique Sandra Rey, fondatrice de la start-up : "on a appris à connaître ces bactéries, à les identifier. On les a faites évoluer en laboratoire pour les rendre plus performantes en les mettant dans des conditions différentes pour voir comment elles évoluaient et on a sélectionné les meilleures", précise Sandra Rey qui ajoute : "on a testé des centaines de milliers de conditions, des milliers de cultures et de façons de les faire pousser pour ensuite trouver la meilleure recette."
Un défi technologique
La bioluminescence a pour origine un composé chimique appelé la luciférine présente chez plusieurs centaines d'espèces. Un grande majorité d'entre elles, bioluminescentes, vive dans les profondeurs des océans. Au contact de l'oxygène, la luciférine émet des photons : une lumière douce qui pourra, peut-être, un jour remplacer la lumière électrique de nos lampadaires, mais d'ici là, les défis à relever sont encore nombreux, comme le détaille Sandra Rey : "les bactéries réagissent différemment, ne poussent pas à la même vitesse quand il fait froid ou quand il fait chaud. On les met dans un espace urbain ou on ne maîtrise aucune condition. Il faut expérimenter la robustesse de la technologie ( ..) sur le long terme, il faut que l'on soit sûr que la lumière soit la même, quelles que soient les conditions."
La bioluminescence : une lumière d'avenir
La municipalité de Rambouillet a investi 100 000 euros sur ce projet. Elle parie, sur cette expérience grandeur nature, pour à terme, réduire sa consommation d'électricité et projeter un véritable éclairage public alternatif, moins polluant et sécurisant, comme l'explique au micro de France 3 PIDF Véronique Matillon, la maire DVD de Rambouillet. "J'espère que cette expérience et cette recherche vont nous amener à pouvoir utiliser la lumière avec une intensité suffisante pour avoir le sentiment de sécurité, et qui permettront aussi de ne pas polluer au niveau du ciel."
Les promesses de la bioluminescence sont multiples : une diminution de la dépense énergétique quand celle-ci avoisine, en France, les 2 milliards d'euros par an, une réduction de la pollution lumineuse qui fragilise les éco-systèmes.
Pour Alain Renaudin, le fondateur du Biomimexpo et chantre du biomimétisme, (une approche qui consiste à s'inspirer de la nature pour innover et penser autrement), l'expérience de Rambouillet est à suivre : ça illustre, assez bien, le phénomène qu'on observe de plus en plus depuis de nombreuses années et le phénomène est souvent porté par des start-ups." Alain Renaudin se félicite de cette innovation à Rambouillet : "on passe de la recherche à l'industrie, de l'idée à l'application, c'est-à-dire, comment la nature peut nous inspirer. Plus il aura d'applications grandeur nature dans la rue comme celle de Rambouillet, plus ça fera avancer les choses ( ..) il faut tester des approches nouvelles (..) il faut les mettre à l'épreuve de la réalité."
De son côté, l'entreprise Glowee voit clairement... dans la lumière biologique, une alternative à la lumière électrique. Elle commercialise des installations immersives pour des événements et travaille déjà à la conception d'une gamme de mobilier urbain comme le détaille Sandra Rey : "on est les seuls à commercialiser ce procédé de bactéries marines. On a déjà fait avec la ville de Sens une expérimentation en extérieur pour une mise en valeur architectural sous une forme éphémère. On travaille sur une cinquantaine de projets avec des collectivités, des aménageurs, des promoteurs. On travaille avec la branche éclairage d'EDF pour qu'elle intègre dans son offre notre système à destination des collectivités locales."
Avec Antoine Marguet et Méryl Loisel