Depuis son arrestation en janvier 2011, Tony Meilhon avait donné l'image d'un homme muré dans le silence. Une attitude qu'il semble aujourd'hui vouloir gommer.
La première question de ce procès était de savoir si Tony Meilhon serait ou non présent aux débats. La seconde : allait-il enfin parler.
Interrogé par la Cour, dès mercredi après-midi, l'accusé surprend une première fois en faisant des révélations qu'il n'a jamais faites lors de l'instruction.
Certes, il reste sur sa version première des faits, à savoir la thèse de l'accident : "Il y a eu un choc et la voiture s'est soulevée. C'était le scooter et le corps de Laëtitia, j'ai fait n'importe quoi, je pleurais, ce n'était plus moi, c'était le diable, j'ai pensé que personne ne m'avait vu, j'ai jeté le corps dans la Loire depuis le pont de Saint-Nazaire".
Mais interrogé par le président de la Cour, Dominique Pannetier, sur la véracité des faits qui lui sont reprochés "Je reconnais l'accident, une partie des coups de couteau, je ne l'ai pas démembrée, j'ai jeté les membres à Lavau, pas le tronc à l'étang de Briord que je ne savais pas où c'était".
"Qui a jeté le tronc dans l'étang de Port-Saint-Père" demande alors le président. "ll y a quelqu'un d'autre que je ne mettrai pas en cause, je ne donnerai pas l'identité de cette personne. pour la bonne raison que c'est moi qui ait fait appel à lui, lui remettant des armes et autres choses" répond Tony Meilhon."La personne m'a aidé à démembrer le corps, je savais que je pouvais le lui demander, cette personne est elle même dans une situation difficile, elle ne pouvait pas me refuser".
Après avoir raconté son enfance, mercredi après-midi, Tony Meilhon a poursuivi son histoire ce jeudi matin devant la Cour.
"19 avril 1996, 1ère incarcération, c'était comment la prison ?" "C'était comme au foyer la liberté en moins..."
Tony Meilhon a une quinzaine d'années, il commet de premiers délits : vols de mobylettes, de voitures. Puis viennent les premières violences : "J'ai balancé un outil oui" dit-il au président de la Cour qui lui répond : "Résultat une incapacité de travail de 14 jours pour la personne qui l'a reçu..." "Ben oui c'était un outil lourd" !
Arrive un détenu accusé de viol sur sa sœur dans la cellule de Tony Meilhon : "D'emblée je lui ai mis une tarte, je supporte pas ça. Un pointeur dans ma cellule c'était pas possible", "et vous l'avez contraint à vous masturber" demande le Président "oui oui", à pratiquer une fellation... "oui oui", mais je suis pas un violeur, en prison, un pointeur c'est impossible, et je suis pas homosexuel". Tony Meilhon sera condamné à 5 ans de prison.
La matinée de jeudi se poursuit par le récit de l'existence cahotique de Tony Meilhon : peines de prison et remises en liberté, un retour à une vie posée, la paternité, avant de ressombrer dans la délinquance, la drogue.
Et puis cet après-midi, à la reprise des débats, Jocelyne Coignard, la mère de Tony Meilhon est le premier témoin appelé à la barre.
Elle essuie une larme et s'exprime avec beaucoup d'émotion : "Tony a souffert d'un manque de père, son père était un homme violent, alcoolique, il courait d'autres femmes, j'ai dû fuir cette situation. Il a abusé d'une de ses filles. Un jour, mes filles m'ont dit que ce n'était plus possible de vivre avec lui, j'ai pris deux valises on est partis à Tours, je voulais les placer. Avec mon 4ème enfant, Tony, j'y arrivais pas, il donnait des coups de pied, s'enfermait dans les placard. Je suis allé voir un psychologue aux Dervallières, il m'a dit que si je n'arrivais à rien avec lui, il fallait le mettre à la Ddass..."
Elle pleure de nouveau puis : "Je l'ai pas fait, j'aurais dû. Ensuite Tony a voulu abuser de sa propre sœur, je voulais pas revivre ça comme avec mon propre père... dont j'ai eu un enfant... J'ai voulu refaire ma vie. J'ai divorcé, j'ai demandé aux ainés quand j'ai rencontré un nouveau compagnon s'ils acceptaient que je refasse ma vie. Ils m'ont dit oui. Sauf Tony qui était petit..."
"Je veux simplement te dire que je te pardonne et que je t'aime
A la question de la Cour : "Si vous deviez dire quelque chose à votre fils ?" Tony Meilhon qui était prostré, au mieux la tête dans les mains en regardant ailleurs, le plus souvent la tête complètement penchée, les cheveux noirs tirés en arrière, se redresse. Sa mère répond "qu'il a gâché des vies, que je comprends pas comment il en est arrivé là, on l'a assez dit, on l'a assez crié, Tony devenait, enfin, la prison n'a rien fait pour l'arranger, il devenait de plus en plus méchant... enfin voilà quoi". Elle pleure douloureusement."Votre fils nous a dit qu'à 9 ans vous l'avez mis à la porte en pointant une arme sur sa tempe" poursuit Me Fathi Ben Brahim l'avocat de Tony Meilhon "Pas du tout, l'arme il me l'a mise là" , elle montre sa joue, "je l'ai suppliée de me lâcher moi sa petite sœur..."
Tony Meilhon s'adresse alors à sa mère : "je veux simplement te dire que je te pardonne et que je t'aime et qu'un jour tu seras dans la capacité de me pardonner ou de revenir me parler".
L'après-midi se poursuit avec les témoignages d'autres membres de l'entourage de Tony Meilhon dont son frère et une ex-petite amie.