La Ville de La Baule vient de lancer des travaux de grande envergure sur sa plage. Le but est de conserver le sable existant et d'alimenter la future piscine en eau et chauffage. Le procédé se nomme Ecoplage, il est détenu par une société nantaise qui a déjà oeuvré aux Sables d'Olonne, avec succès.
Le spectacle est impressionnant, même s'il ne peut être vu que depuis le remblai. Des pelleteuses à chenille, des tracteurs, des tuyaux noirs, verts, et des techniciens en fluo qui s'affairent autour.
Particularité : l'heure d'embauche et l'heure de pause sont déterminées par les marées. Autant de repas décalés pour ces spécialistes du système Ecoplage, le procédé retenu par la Ville de La Baule et Cap Atlantique, la communauté d'agglomération, pour retenir le sable.
Comment ça marche, Ecoplage?
Le procédé Ecoplage a une trentaine d'années et vient du Danemark. L'entreprise éponyme, basée à Sainte-Luce-sur-Loire, est désormais détentrice du procédé et a déposé d'autres brevets en France et à l'international.
Ce dispositif a déjà été éprouvé en Pays de la Loire, sur la plage des Sables d'Olonne en 1999 et 2002. Il vient de recevoir le prix du public aux Green Solutions Awards 2018.
Douze tranchées sont creusées dans le sable, afin de drainer la plage, de filtrer l'eau et de la transporter jusqu'à un puits de collecte d'eau de mer.
La plage ainsi mieux drainée va offrir un sable plus compact qui non seulement empêchera le sable de repartir avec la mer, mais en plus rapportera du sable emporté par les grandes marées ou les tempêtes. L'objectif est de conserver à terme un niveau constant de sable sur la plage.
Ce tuyau noir est en fait une chaussette hautement filtrante. Les grains très fins, les alluvions et autres micro-algues n'y pénètreront pas. L'eau de mer ainsi filtrée est transportée par gravité dans les tuyaux verts qui l'acheminent jusqu'à un puits de collecte.
De puissantes pompes aspirent cette eau et l'envoient vers Aquabaule, la piscine d'eau de mer de La Baule actuellement en totale reconstruction.
Le triple effet Ecoplage
Sur le chantier de La Baule, Ecoplage ne se contente pas de drainer le sable pour mieux le conserver, il alimente aussi la future piscine Aquabaule avec une eau de mer de grande qualité (ce qui réduit nettement le coup d'entretien du circuit d'eau de mer de la piscine), et troisièmement, les calories thermiques apportées par l'eau de mer aspirée depuis la plage sont utilisées pour le chauffage, via une pompe à chaleur.
Le procédé, validé et co-financé par l'ADEME, va permettre, là aussi, de réelles économies de chauffage. Ce procédé s'appelle la thalassothermie, un chauffage fourni par la mer.
Ecoplage en chiffres
Les travaux Ecoplage se déroulent sur 1 km de plage. Le puits de collecte central est alimenté par six lignes de drain d'un côté, six de l'autre. Les travaux vont durer trois mois s'élèvent à près d'1,4 millions d'euros H.T pour le drainage de la plage et la station de pompage. La Baule et la Région Pays de la Loire en sont les principaux financeurs.
Près de 500 000 euros H.T (dont 200 000 euros financés par l'ADEME), c'est le coût de la pompe à chaleur et de ses bâtiments techniques. Ajoutez à cela 30 000 euros H.T pour le raccordement de la canalisation d'eau de mer à la piscine Aquabaule, une enveloppe financée par Cap Atlantique, maître d'ouvrage.
La station de pompage a une capacité de 1 100 m3 par heure.
Histoire de sable
Le sable à La Baule, c'est presque l'ADN de la commune. A l'origine, une dune de sable, plantée de pins pour mieux se fixer dans le temps. Et une plage immense qui va de Pornichet au Pouliguen.
Mais rien n'est immuable, surtout pas la plage. Les actions de l'homme ne sont jamais neutres (port de plaisance de Pornichet à l'entrée de la baie, port de plaisance La Baule-Le Pouliguen de l'autre côté et entrée d'eau des marais de Guérande), la plage de La Baule a connu des profondes crises ces dernières années.
En 2004, il a fallu faire venir 315 000 m3 de sable puisé en mer, au large, dans la zone d'extraction du Pilier (près de Noirmoutier).(Heureusement pour les contribuables baulois, le financement était essentiellement européen avec le fonds FEDER). Quelques années plus tard, du sable a été pris côté Pornichet et déplacé vers l'ouest.
Mais en 2010, Xynthia, phénomène de submersion marine sans précédent sur notre littoral, a emporté la moitié de tout ce sable importé. La mer n'a cependant pas emmené tout ce sable au large, elle l'a en partie déposé sur le banc des Chiens, un banc de sable situé à l'ouest de la Baule, qui de ce fait, a pris une importance excessive dans la courantologie de la baie. La Ville de La Baule a envisagé à un moment de récupérer ce sable, mais le site est sensible, le gisement de coques (le plus important de France) est tout près : projet abandonné.
Gros problème, donc gros travaux
Il fallait donc une solution qui tient compte des impératifs environnementaux en vigueur. C'est en constatant l'efficience du procédé Ecoplage sur la plage des Sables d'Olonne ainsi que sa pérénnité (travaux en 1999 et 2002), que la municipalité de La Baule a décidé de faire appel à l'entreprise nantaise dont le nom est le même que le procédé. Cette entreprise n'a pas oeuvré qu'en Pays de la Loire, elle est également intervenue à St Raphaël, à Quend (en baie de Somme) et à Dubaï.
Aujourd'hui, ce chantier, visible par tous depuis le remblai, s'annonce comme une vitrine prometteuse pour la station balnéaire qui a signé le chèque et fait le pari de reconquérir son sable mais aussi pour une entreprise ligérienne qui compte bien proposer son savoir faire ailleurs en France et dans le monde.