Les "covids longs", c'est ainsi que ce sont auto-désignées les personnes souffrant de séquelles importantes après avoir rencontré la covid-19. Insuffisance rénale, pulmonaire, cardiaque, problèmes neurologiques, asthénie, ces personnes ont 30 ans, 40 ans, ces séquelles peuvent être définitives.
Depuis le début de la crise sanitaire, tout le monde à le regard porté sur la question des décès en réanimation. Spectaculaires et nombreux. Mais comme les messages du gouvernement indiquent que ces malades atteints par la covid-19 sont âgés de plus de 65 ans, nombre de personnes plus jeunes ont compris qu'elles ne risquaient pas des atteintes graves à leur santé si d'aventure elles croisaient le nouveau coronavirus.
Il n'en est rien, si la létalité est faible, le nombre de personnes présentant des séquelles importantes, temporaires ou irréversibles, augmente chaque jour à mesure que ces personnes cherchent des réponses à leur état qui ne s'améliore pas. Toutes partagent les mêmes symptômes.
Communicante tonique dans la publicité, Nathalie ne décolère pas après les jeunes qui composent majoritairement son entourage professionnel ! "Il y a un "je m'enfoutisme" français, les Français sont plus forts que tout, j'ai croisé la covid, j'ai 48 ans dans ma tête, mon corps en a 80 désormais" !
Des patients en souffrance réelle
Les malades, de leur côté, ne sont pas inactifs, prenant conscience de leur état, ils se retrouvent sur des groupes Facebook pour tenter de trouver une solution, et surtout un médecin qui pourrait leur apporter de l'aide.Nathalie, comme beaucoup de personnes dans son cas, ne baisse pas les bras, elle a eu la chance de rencontrer dans son parcours de soins, une oreille attentive au CHU d'Angers.
Il faut le dire, nombre de personnes ont reçu des réponses impuissantes de la part des médecins, pas toujours bienveillants ! Allant de "on ne sait pas", à "je n'ai pas de solution", ou encore "c'est psychologique, retournez travailler " !
"Ce n'est pas dans la tête des gens" ! C'est l'oreille attentive de Nathalie qui s'exprime. Vincent Dubée, professeur infectiologue au CHU d'Angers dans le Maine-et-Loire, est formel. "Ces personnes sont en souffrance réelle, elles présentent des tableaux cliniques connus dans la plupart des cas". Et d'ajouter, "aux USA, en Italie, en Grande-Bretagne les gens remontent les mêmes infos !"
Covid modéré et atteintes fonctionnelles
Les médecins généralistes sont désarmés, les professeurs des CHU commencent à recenser ces cohortes de malades pour tenter de comprendre, classer ces pathologies connues, ou nouvelles, liées à la covid-19. Et tenter d'apporter des réponses aux personnes malades."On distingue deux catégories de cas. Les formes sévères de la covid-19 qui laissent des séquelles importantes par le passage en réanimation longue. Ce sont des dommages liés à la réponse immunitaire, pneumonie quand les poumons sont atteints gravement, laissant des cicatrices variables, nombre de personnes de moins de 40 ans présentent des problèmes pulmonaires plus de deux mois après leur sortie de l'hôpital".
Ces personnes sont essoufflées, leurs tests à l'effort médiocres. Il y a aussi les personnes atteintes de défaillances rénales, cardio-vasculaires. "Tout cela est décrit, il n'y a rien de mystérieux", poursuit Vincent Dubée. "Les états de plaintes fonctionnelles après un tableau infectieux ne sont pas propres à la covid. Les symptômes comme l'asthénie sont encore présents plusieurs années après chez des personnes touchées par le SARS-CoV-2 ou le MERS-CoV".
Ce que l'on connait moins, ce sont les atteintes fonctionnelles chez des patients qui ont fait un covid modéré, et qui, souvent, n'ont même pas été hospitalisés. "On a beaucoup à apprendre de cette nouvelle maladie, nous formons à Angers avec d'autres CHU comme à Tourcoing ou Orléans, un groupe informel qui travaille sur ces questions et qui a mis au point un outil de surveillance en France".
Au plus fort de la crise, des questionnaires étaient envoyés quotidiennement aux malades. Cinq mois après, ces questionnaires sont réactivés avec des personnes covid PCR + parmi lesquelles on constate depuis une proportion substantielle, de fatigue, de "brain fog", de douleurs, de perte d'odorat, du goût. Les médecins sont démunis, il n'ont pas de traitements connus, et pas de prise en charge homogène à leur disposition dans les hôpitaux.
"Nous ne sommes pas organisés formellement pour la prise en charge de nos malades ou ceux qui nous sont envoyés par les généralistes". Pas de prise en charge spécifique, Vincent Dubée aimerait pouvoir le faire, mais la période n'est pas propice à la création de nouveaux services ! "À Angers, nous apportons une écoute attentive, pour orienter les personnes covid long vers des médecins spécialistes, nous n'avons pas de médicaments, à l'exception des anti-douleurs". Rendant ainsi plus compliquée, la prise en charge de ces malades dits covids longs.