9 000 cétacés victimes de pêches accidentelles chaque année : le Conseil d'Etat durcit un arrêté

Le gouvernement avait institué une fermeture de la pêche dans certaines zones du golfe de Gascogne, afin de réduire la mortalité chez les petits cétacés. Mais cette interdiction était assortie d'une certain nombre de dérogations.Trop, a estimé le Conseil d'Etat qui les a suspendues.

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Trop de petits cétacés sont encore victimes de la pêche dans le golfe de Gascogne. Le Conseil d’État, sollicité par plusieurs associations au début du printemps dernier, avait ordonné au Gouvernement de mettre en place des périodes de fermeture de la pêche sur certaines zones.

Ce qui fut fait par le secrétaire d’Etat chargé de la mer qui a pris un arrêté interdisant la pêche, mais sous certaines conditions, avec certains filets et durant quatre semaines seulement en 2024, 2025 et 2026.

Les mêmes associations ont estimé que cette interdiction était assortie de trop de dérogations, vidant l'arrêté de son sens.

"Ces dérogations sont trop importantes"

Le Conseil d’État, saisi en urgence, a donné raison à ces associations de défense de l'environnement et décidé, par son juge des référés, de suspendre une partie de l'arrêté en question.

"Le Conseil d’État, peut-on lire sur son site, juge aujourd’hui en référé que ces dérogations sont trop importantes pour que la fermeture de la pêche ait un effet suffisant sur les captures accidentelles pour avoir une chance de réduire dès 2024 la mortalité des petits cétacés à un niveau soutenable." 

La décision du juge des référés a été motivée en partie par un rapport du Conseil International pour l'Exploitation de la Mer qui estime à 9 000 le nombre de cétacés victimes de pêches accidentelles sur la façade atlantique française chaque année et qui pointe du doigt certains filets comme les sennes pélagiques qui encerclent les poissons en surface, accusés de nombreuses captures accidentelles. Or, ces filets ne sont pas concernés par l'interdiction telle qu'elle a été édictée.

"On va pouvoir interdire la pêche sérieusement"

"C'est une victoire assez importante, se réjouit Antoine Gatet, le président de l'association France Nature Environnement, à propos de la décision du Conseil d'État. Ça récompense plusieurs années de combat sur ce sujet-là. Ça va permettre de sauver plusieurs milliers de dauphins, de marsouins, des espèces de petits cétacés. On a une mortalité qui est estimée en 5 000 et 10 000 cétacés tous les ans. Grâce à cette décision, on va pouvoir interdire la pêche sérieusement du 20 janvier au 22 février pour pouvoir sauver ces espèces-là."

Antoine Gatet estime que la France avait fait "semblant" de prendre des mesures, du fait des nombreuses dérogations qui limitaient en fait l'interdiction de pêche pendant ce mois d'hiver

Danger d'extinction

"Le ministère nous répondait : c'est une première étape, on durcira la réglementation plus tard. Le problème, c'est qu'on ne peut plus attendre, alerte Antoine Gatet. On a des analyses qui nous montrent qu'on a des populations de dauphins, de petits cétacés, en danger assez critique sur ces zones-là et qu'un hiver de plus avec des mortalités de 5000 à 10 000 animaux, ce n'est pas possible. On est arrivé sur un danger d'extinction sur ces zones-là."

Pour France Nature Environnement (FNE), il n'y a pas d'autres solutions que d'interdire aux grands bateaux industriels la pêche sur ces zones pendant l'hiver, car ces bateaux et les dauphins y sont en concurrence pour la pêche de certaines espèces. FNE estime que cette interdiction devrait même être de trois mois.

"Une décision en déconnexion avec le réel"

Un point de vue opposé à celui des pêcheurs, on s'en doute.

"C'est une décision qui est en déconnexion complète avec le réel !", déclare Christopher Quéméner
patron au Croisic.

La profession dit avoir mis en place beaucoup de choses avec le monde scientifique sur cette question, comme les pingers, ces émetteurs de sons répulsifs censés éviter que les cétacés ne s'approchent des filets. Mais ça ne suffit jamais.

"Cette décision ne protège pas les dauphins, mais tue les marins, déplore Christopher Quéméner
qui rappelle cette décision s'ajoute à celles de l'Europe qui a institué des quotas de pêche très restrictifs pour l'année à venir.
Les associations qui nous attaquent passent leur temps dans les tribunaux, nous, on passe notre vie sur l'eau. On sait avoir une pêche toujours plus durable, toujours plus responsable. On ne peut plus continuer à subir ces décisions qui, à petit feu, nous tuent."

Quant aux chiffres sur le nombre d'échouements de dauphins, le patron pêcheur déclare qu'ils sont faux, parce que fruit d'une extrapolation. Et désigner le monde de la pêche comme responsable de cette mortalité est, selon lui, très injuste.

 

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