EDF et le charbon sont le poumon de l’économie locale à Cordemais, en Loire-Atlantique. La fermeture de la centrale impacte les travailleurs, dans cette commune rurale. Entre espoirs et désillusions, ce documentaire raconte la complexité du dossier entre transition écologique, rentabilité économique et maintien de l’emploi. Un documentaire inédit à voir jeudi 13 janvier 2022 à 22h50.

Cordemais, c’est l’histoire d’une centrale électrique située en bord de Loire qui, à 51 ans passés ,ne veut pas prendre sa retraite.

Alors que le gouvernement décide d’assouplir le recours au charbon pour la production d’électricité cet hiver, les salariés imaginent relancer le projet Écocombust

Cordemais, un ogre qui ne dort jamais

Elle veille et éclaire l’estuaire de la Loire depuis 1970, ses fumées et lumières en font un ogre qui ne dort jamais.

Si elle a pu faire la fierté d’une région à l’époque des Trente glorieuses, la centrale à charbon de Cordemais est aujourd’hui contestée, bilan carbone oblige. Alors, quel avenir va donc s’écrire pour cette centrale ?

Je suis rentré à l’âge de 17 ans, j’en ai 32, ça fait 15 ans que j’entends dire que ça va fermer

Un agent de la centrale

Bretagne et Pays de la Loire dépendants du charbon de Cordemais pour quelques années encore

La puissance de 1 200 mégawatts de la centrale permet de pallier les faiblesses d’approvisionnement dans l’ouest, territoire éloigné et en bout de réseau des centrales nucléaires les plus proches.

Seulement voilà, depuis la COP 21 de Paris, l’exigence écologique, la nécessité de corriger le bilan carbone de nos industries scellent le sort des quatre dernières centrales thermiques de France et signifient leur fermeture.

Le minerai utilisé à Cordemais est extrait en Pologne, en Afrique du Sud et en Colombie. Il parcourt des milliers de kilomètres. 

Deux millions de tonnes de charbon par an sont brûlés par la centrale et à la sortie autant de dioxyde de carbone ! Le bilan n'est pas vertueux même si deux centrales à charbon ne pèsent pas lourd dans les émissions de CO2 en France.

Malgré de lourds investissements de dépollution effectuée par EDF (350 millions d’euros) le territoire se prépare donc à subir le contre coup de cette décision.

Les salariés, les habitants de cette commune rurale de 3 800 âmes vivent eux entre révolte et résignation en attendant une fermeture qui ne vient pas !

Quel avenir pour cette centrale ?

Faudra-t-il pour ses 400 ouvriers, déménager et laisser Cordemais derrière soi, une commune devenue fantôme comme tant d’autres qui ont lié leur destin au charbon ? Trouveront ils une voie qui préserverait l’emploi et l’activité ?

Le réalisateur s’est approché au plus près des salariés, des élus locaux pour sonder les âmes, les cœurs de ces hommes et femmes très attachés à leur centrale.

Ils défendent depuis 2017 une alternative au charbon : le projet Écocombust qui utilise la biomasse issue des déchets verts en substitution du charbon. Une vraie innovation, une première mondiale !

Une fois construite, la centrale pourrait brûler 200 000 tonnes de pellets par an pour un bilan carbone neutre et devenir une véritable vitrine de la transition écologique française.  

L’objectif est de sauvegarder 1 000 emplois. Pour défendre ce dossier du "charbon vert", il faut franchir l’étape politique, budgétaire et industrielle.

Bref, il faut convaincre tous azimut. EDF à l’origine de l’expérience soutient d’abord le projet voulu par les salariés comme l’état ainsi que le partenaire industriel Suez.

En 2021, une idée de privatisation d’EDF avancée par le gouvernement pousse le syndicat CGT énergie et les salariés dans la rue. Il suffit d’une manifestation à Paris pour que le projet soit retiré sine die.

À Cordemais, l’espoir renaît pour le projet Écocombust. On attend maintenant le feu vert des pouvoirs publics, la décision politique et budgétaire. L’Elysée se fait discrète sur la question tout comme Bercy qui finalement considère le projet trop cher.

Il est abandonné et la fermeture de la centrale est confirmée pour 2026. De plus le partenaire industriel Suez se retire, ce qui allonge de huit mois la construction.

Il faut trouver 100 millions d’euros ! EDF très endetté par la gestion et l’entretien de son parc nucléaire refuse et l’état ne vient pas mettre les 40 millions nécessaires.

Il est loin le temps l’objectif 2035 dessiné par EDF et censé prolonger de 20 ans l’activité du site.

On nous parle pognon, moi je parle de service public. Lorsque les gens appuient sur l’interrupteur, c’est ça le service public. On a emmené nos familles dans un projet écologique, viable

Un agent de la centrale

Cordemais à la croisée des chemins

La commune doit se réinventer sans la centrale. Cordemais vit de la centrale, par ses dividendes (12 millions d’euros de taxe pour la communauté de commune).

EDF et son charbon font vivre une kyrielle d’entreprises, transport fluvial, nettoyage industriel, commerce de proximité et financent les infrastructures.  

Si la fermeture intervenait, c'est 30 % des recettes qui n’entreraient plus dans les caisses de la commune. Si l’Ouest dépend de l’électricité de Cordemais, la Loire-Atlantique en dépend aussi, avec plus de 2 000 emplois, dont 700 directs et 1 500 indirects.

C’est un large  territoire qui vit de l’usine et des industries sous-traitantes, logistiques, les docks.

Une nouvelle chance pour Écocombust ?

Depuis la fin de l'été, la centrale de Cordemais n’a jamais été autant sollicitée. Elle tourne plein pot pour compenser la baisse de production des centrales au gaz dont les prix flambent.

En annonçant une augmentation du nombre d'heures autorisées pour la production d'électricité à partir du charbon par EDF, la CGT veut croire à une nouvelle chance pour la centrale et pour le projet Écocombust.

EDF a abandonné l'idée à l'été dernier parce que le groupe Suez, fournisseur des pellets issus du recyclage du bois, n'a pas jugé l'affaire rentable. Nous avons rencontré Barbara Pompili (la ministre de la Transition écologique), en novembre qui nous a demandé de reprendre l'idée. Écocombust pourrait devenir réalité l'hiver 2022- 2023

Gwénaël Plagne Délégué CGT de la centrale de Cordemais

Il est vrai que le contexte change. La COP 26 n’a pas été couronnée de succès, on connaît une envolée des prix du gaz russe, le charbon redeviendrait donc rentable! 

Pour les salariés, pas de retour en arrière même si le principe de réalité s’impose aux pouvoirs publics. Il serait préférable de booster le projet de transformation de la centrale à charbon à l’énergie bois d’autant plus que le démantèlement de la centrale demanderait 15 ans de travail.  

Les agents de Cordemais entendent aussi profiter de l’élection présidentielle pour peser sur les candidats et le débat. On le voit Cordemais n’a peut-être pas dit son dernier mot !

Emmanuel Faure a reçu dans "Ça se passe ici" le délégué syndical Gwénaël Pagne et le réalisateur du film Nicolas Combalbert.

Auteur : Nicolas Lambert - Réalisation : Nicolas Combalbert  - Une Production Paramonti  - Délégué antenne et contenus Olivier Brumelot

Rediffusion mardi 18 janvier à 9h45. Disponible en replay sur france.tv

Ce documentaire sera suivi d'un autre documentaire autour des militants qui luttent pour la protection des dauphins qui meurent sur le littoral de Loire-Atlantique et de Vendée : Dauphins sous haute surveillance.

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