Comme chaque année depuis neuf ans, la lettre d’information féministe "Les Glorieuses" publie son décompte du nombre du jours durant lesquels les femmes commencent à "travailler gratuitement" en France. C'est le cas depuis 16 h 48, ce vendredi.
"Je vais me mettre en vacances alors", lance une Nantaise. Elle vient d'apprendre que depuis 16 h 48 ce vendredi et jusqu'à la fin du mois de décembre, les femmes de France travaillent "bénévolement", du fait des inégalités salariales entre hommes et femmes.
C'est le constat dressé par la newsletter féministe "Les Glorieuses" qui, sur Facebook, souligne que cette année "l'écart de salaire entre les femmes et les hommes à travail égal et expérience égale est de 4 %."
Ce décompte, "Les Glorieuses" le calcule à partir des statistiques européennes et des études de l'INSEE. D'ailleurs, selon les chiffres publiés par l'agence française en mars dernier, "le revenu salarial des femmes est inférieur en moyenne de 23,5 % à celui des hommes : 19 980 euros annuels pour les femmes, contre 26 110 euros pour les hommes", en 2022 dans le privé.
En cause, "des différences de volume de travail moyen", "d’une part, les femmes sont moins souvent en emploi que les hommes au cours de l’année, d’autre part, elles occupent plus fréquemment un emploi à temps partiel", détaille l'INSEE dans cette étude.
Une discrimination difficile à prouver
Sandrine Paris, avocate en droit travail à Nantes, assure que beaucoup de dossiers concernant des cas d'inégalité salariale, notamment entre femmes et hommes, s'empilent sur son bureau.
Des affaires qu'elle estime par ailleurs compliquées à défendre : "la personne discriminée doit apporter des éléments permettant de prouver l'existence de la discrimination. Mais il est très difficile d'obtenir du concret pour démontrer tout cela. Il faut un dossier en béton pour gagner."
Ce sont les règles sociétales qui font que les femmes sont encore discriminées
Sandrine ParisAvocate en droit du travail
Parmi les nombreux dossiers qu'elle a traités, Sandrine Paris revient sur celui d'une inégalité salariale de l'ordre de 4 000 euros par mois : "il s'agissait de deux salariés, membres d'un même comité de direction d'une grosse entreprise d'envergure internationale. Alors qu'ils endossaient des responsabilités équivalentes, l'homme percevait une rémunération de 13 000 euros par mois tandis que la femme touchait 9 000 euros."
Comment expliquer une telle différence ? "Ce sont les règles sociétales qui font que les femmes sont encore discriminées", déplore l'avocate.
Une inégalité qui en cache d’autres
Pauline Basset, salariée d'un café-librairie féministe à Nantes, semble prendre la nouvelle avec un brin de lassitude. "C'est choquant, mais on n'est pas surprises", fixe-t-elle. D'autant plus que, pour la féministe, les inégalités salariales sont un combat parmi tant d'autres : "C'est un vrai sac de nœuds, il y a tout à revoir en termes d’égalité femme-homme".
Sur leur site web, "Les Glorieuses" dressent une liste de sept propositions "pour que les choses changent". Elles proposent notamment de s'inspirer de mesures déjà prises à l'étranger comme "congé parental équivalent pour les deux parents" mis en place en Suède, "augmenter les salaires dans les secteurs à prédominance féminine" à l'image de la Nouvelle-Zélande" et aussi "favoriser le travail flexible" comme en Espagne.
L'infolettre souligne toutefois d'une récente avancée "Dès 2026, les États membres [de l'Union européenne] se doivent de faire appliquer une transparence des rémunérations pour les entreprises de plus de 100 salariés", est-il relevé dans le courrier. Concrètement, cette directive donnera le droit à tout salarié de demander d’avoir des informations sur le niveau de rémunération individuel et les niveaux de rémunérations moyens pour des emplois similaires dans l’entreprise.
Un pas permettant, peut-être, que le 8 novembre 16 h 48 devienne un jour le 31 décembre 23 h 59.
Marie Gréco avec Vincent Le Goff et Olivier Cailler.
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