Alors que le 2 juin marquera la réouverture pour les bars et les restaurants, le 22 juin sera celle des cinémas. Peut-être. Rouvrir un lundi n'a pas forcément de sens pour les salles obscures. Réactions glanées ici et là.
"On attend les directives du groupe" répond Franck Merceron, le directeur de l'UGC Ciné Cité Atlantis de Saint-Herblain dans la banlieue nantaise."Cette réouverture se fera dans les conditions prévues par le guide sanitaire élaboré par la FNCF" indique la Fédération Nationale des Cinémas Français sur son site. On peut donc imaginer que tous les cinémas auront à peu près les mêmes protocoles avec, à l'intérieur de chaque groupe, quelques nuances.
Reste que la date du 22 juin est une décision un peu technocratique. Rouvrir un lundi pour un cinéma n'est pas forcément judicieux, les programmations changeant le mercredi.
"Les distributeurs vont peut-être attendre pour sortir les films à gros succès, envisage Franck Merceron. On va peut-être reprendre avec les films qui étaient à l'affiche avant le confinement."
"On sera prêts"
Ce qui n'est pas forcément un mal vu que les salles avaient fermé le 14 mars, un samedi. Beaucoup n'avaient pas pu profiter des films sortis le 20 mars."Je suis surpris que ça ouvre le 22 juin" avoue Franck Merceron qui était resté sur une prévision de réouverture pour le mois de juillet. "Mais on sera prêts et ravis de retrouver nos spectateurs."
Peut-être le week-end du 26 juin
Au cinéma Bonne Garde de Nantes, on attend aussi d'en savoir un peu plus sur les mesures sanitaires à prendre. Elles descendront sans doute du CNC.Pour les contraintes de nettoyage ? "On va peut-être devoir faire sauter des séances le dimanche" s'interroge Eric Martinache, le président de l'association qui gère cette salle de 300 places. Les règles de distanciation ne semblent pas à priori l'inquiéter.
Le cinéma réouvrira-t-il dès le lundi 22 juin ? Pas sûr du tout. Cette salle qui programme des films d'art et d'essai n'est pas liée aux sorties commerciales du mercredi, elle peut projeter des films qu'elle avait programmés en mars au moment de la fermeture. Pour Eric Martinache, cette réouverture est en cours de préparation et pourrait ne se faire que le week-end du 26 juin.
"Notre plus grande crainte, avoue-t-il, ce serait que les gens mettent du temps à revenir."
La salle associative qui compte 25 000 entrées par an, survivra à la fermeture. Des travaux étaient prévus, ils ont été reportés et l'unique salarié a été mis en chômage technique. Mais si, à la reprise, le public ne vient pas en nombre suffisant, c'est là que la structure sera fragilisée.
Ce qui prédomine pour l'instant un peu partout, c'est encore le flou. Faudra-t-il se contenter d'ouvrir un rang sur deux, 50 % seulement de la capacité des salles ? Cette disposition avait déjà été imaginée au début du confinement. Elle pourrait être adoptée ou réactualisée. Il faudra aussi sans doute mettre en place des sens de circulation.
Au cinéma Pathé d'Angers dans le quartier Saint-Serge, on n'a pas non plus les détails. Tout sera précisé la semaine prochaine semble-t-il.
Quelle sera l'attitude des producteurs ?
Même réponse pour le patron du multiplexe CGR de Saint-Saturnin, près du Mans. Laurent Barriquault a été (agréablement) surpris lui aussi par l'annonce d'une réouverture dès le 22 juin. Il s'attendait à devoir attendre le 1er juillet. "Maintenant, il faut travailler avec les distributeurs, dit-il, vont-il bien vouloir nous donner des films tout en ne sachant pas si le public sera présent ?"Pour séduire ce public, le complexe sarthois va mettre en place un tarif spécial. Des places à 5 euros pour des tickets achetés sur internet et dématérialisés sous forme de QR code que le client présentera à l'entrée. Cela pourrait rassurer ceux qui veulent limiter les contacts.
Il faudra aussi connaître les directives sanitaires quand à l'utilisation des climatisations.
"Quant à la fête du cinéma, aura-t-elle lieu ?" s'interroge Laurent Barriquault. Ce sera à la Fédération Nationale des Cinémas Français d'en décider.
"Il faut que les distributeurs soient à l'aise pour mettre en place les films qu'on va programmer" dit-il. En clair : prévoir un temps de promotion car cela fait déjà onze semaines qu'on ne parle plus de cinéma en France. On peut estimer selon lui, qu'à la reprise, 200 films ne seront pas sortis.
"On a deux gros films américains prévus pour juillet, Mulan chez Walt Disney et Tenet chez Warner. Ils n'auront pas de mal. Mais pour les films d'art et d'essai qui auraient dû être à Cannes, ce sera plus difficile."
A l'affiche des 400 Coups, il est probable qu'on retrouvera "La Bonne Epouse" de Martin Provost avec Juliette Binoche, sorti juste avant le confinement. "Le film a marché, note Claude-Eric Poiroux, on le reprendra."
500 000 € de manque à gagner
Quand aux conséquences financières, il les estime à 500 000 euros de recettes évaporées dont une bonne partie revenait à la salle. De plus, l'été, qui n'est généralement pas une bonne saison pour les cinémas, continuera d'amplifier les pertes."Mais je préfère ça que de rester fermé" conclut Claude-Eric Poiroux.
Et pour la rentrée de septembre, tous espèrent de meilleures conditions sanitaires pour moins de contraintes. "Normalement, précise le patron des 400 Coups, le client doit venir avec son masque mais j'en ai commandé pour les mettre à disposition."
Mais une question est sur toutes les lèvres et c'est Claude-Eric Poiroux qui la chuchote : pour les films qui vont être tournés, est-ce que les comédiens vont pouvoir s'embrasser ?