Affaire Troadec à Nantes : traces de sang, combustion des corps, la parole aux experts au 6e jour du procès

Le procès de Hubert Caouissin et Lydie Troadec s'est porusuivi ce mardi 29 juin 2021 aux assises de Loire-Atlantique à Nantes avec le témoignage des experts qui ont travaillé sur l'affaire.

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Ce mardi 29 juin, la journée a été consacrée au récit des experts qui ont travaillé sur le quadruple meurtre de la famille Troadec à Orvault, près de Nantes, en février 2017.

ATTENTION. Certains détails du récit qui suit peuvent choquer les lecteurs les plus sensibles.

Reprise de l’audience à 9h15. La présidente de la cour d'assises, Karine Laborde, appelle Pascal Olivier, expert en empreintes génétiques.

Pascal Olivier explique rapidement le principe de l’ADN. Comment il peut exclure un individu avec affirmative quand les caractéristiques générales sont différentes. Mais deux individus peuvent avoir un profil génétique proche. Qu’il faut alors affiner.

"Nous avons utilisé un réactif spécifique du chromosome Y pour faire apparaitre des particularités de l’ADN. Nous avons utilisé le Blue Star pour comme réactif au sang humain. Il réagit particulièrement aux globules rouges".

Trois lieux, la scène de crime, la voiture 308, et la ferme.

"Nous n’avions pas de corps. À partir d’accessoires, de vêtements, nous avons pu trouver quatre ADN, et vérifier qu’ils appartenaient bien aux personnes disparues. Avec des gants de toilette ou brosse à dent trouvées aux domiciles des enfants nous avons pu valider facilement ces ADN".

"Pour la scène de crime, nous avons trouvé du sang de Brigitte dans le garage, la chambre parentale, la chambre de Sébastien, la salle de bain, en mélange avec deux autres, Pascal et Sébastien".

Pascal, on le retrouve dans le garage, l’entrée, la chambre, l’escalier

Pascal Olivier, expert en empreintes génétiques

"Sébastien, le lit de sa chambre, sur un smartphone, dans le garage, sur un interrupteur de la salle de bains. Les médias ont fait état de sa culpabilité, nous avons pu oublier cette hypothèse, dit-il, poursuivant, sous l’armoire de Charlotte nous avons retrouvé l’empreinte génétique de Brigitte et de Pascal".

"Il y a une probabilité d’erreur de 1 sur 29 millions de milliards"

"Dans la cuisine, nous avons des bols des mugs, nous avons sur un verre deux empreintes en mélange. L’une de Sébastien, l’autre inconnue. Qui s’est révélée être celle de Hubert Caouissin. Il y a une probabilité d’erreur de 1 sur 29 millions de milliards. Nous retrouvons également l’ADN d’Hubert Caouissin sur le fauteuil bleu dans le jardin".

"Peu d’endroits où nous retrouvons des empreintes génétiques de Charlotte. Sur le stéthoscope de Charlotte notamment (ce n’est pas celui dont parle Hubert Caouissin), sur les parties que l’on met dans les oreilles".

"Dans le véhicule 308, nous avons eu 76 prélèvements, là on retrouve les empreintes génétiques des victimes hors traces de sang, nous retrouvons l’ADN d’Hubert Caouissin sur la commande de ventilation et sur le rétroviseur intérieur".

Nous retrouvons avec le Blue Star les empreintes génétiques de Pascal, Brigitte, et Sébastien

Pascal Olivier, expert en empreintes génétiques

"Pas de sang dans la voiture 308 ?"

"Nous confirmons la présence des quatre victimes à Pont-de-Buis. Aucunement sur des objets ou habitation de Mr Caouissin".

La présidente : "De votre point de vue d’expert, les quantités de sang sont importantes ou non ?","Je suis incapable de me prononcer là-dessus".

"Il n’est pas mis l’ADN de Mr Caouissin dans les traces de sang ?", "Non madame la présidente".

"Pas de sang dans la voiture 308 ?", "Non Madame la présidente, à notre grande surprise peu de traces de sang de Charlotte sur la scène de crime et dans le véhicule"

Pascal Olivier, expert en empreintes génétiques

La présidente, s'adresse à Hubert Caouissin, "ce ne sont pas des éléments nouveaux pour vous, avez-vous des observations à faire ?", "Non madame". "Vous saviez que Pascal mettait des boules Quiès ?", "Non".

"Rien pour Charlotte sur la scène de crime, dans le véhicule non plus alors que vous dites l’avoir mise dans le coffre". "Elle était dans un sac plastique, les autres non". "C’est pour ces raisons qu’on ne retrouve rien pour Charlotte ?", "Oui".

La présidente s'adresse à l’expert, "l’absence de traces dans le coffre exclut la présence de Charlotte dans le coffre ?", "On ne peut pas affirmer de fait qu’elle n’était pas présente dans le coffre". D’autres empreintes ont été relevées dans le coffre sans résultat. Ce ne sont pas celles de BrigitteTroadec.

Me Pacheu, avocat des parties civiles : "On ne retrouve l’empreinte d’Hubert Caouissin ailleurs que sur le verre ? Il a passé 24 heures dans la maison ?", "Sur le fauteuil bleu. C’est toujours surprenant de ne pas trouver plus d’empreintes. Soit il a passé moins de temps à Nantes, soit il a nettoyé scrupuleusement les objets qu’il a pu toucher. En dépit de ces précautions, il reste parfois des traces".

Me de Oliveira,  avocate de la mère et des deux sœurs Troadec : "Pouvez-nous dire qu’elles sont les techniques utilisées pour ne pas laisser de traces ?", "Porter un masque, des gants, une charlotte, nettoyer à la javel". "On connait le produit, on ne connait pas sa concentration. Si vous passez une éponge, on laisse quelques traces, avec une brosse beaucoup moins".

L’avocat général :  "Vous parlez du fauteuil, bleu en velours sans coussin placé dans le jardin, nous avons privilégié les zones de prises potentielles, à un autre moment vous parlez de traces suspectes. C’était du sang ?", "Non des traces de natures indéterminées qui ne sont pas du sang".

Me Fillon, un des avocats d'Hubert Caouissin : "Vous avez évoqué comment ne pas laisser de traces ADN, qu’aurait-il fallu faire pour les faire disparaître ?", "Un bon liquide vaisselle, aurait suffi. De la soude ou du chlore auraient été parfaits".

Me Cabioch, l'avocat de Lydie Troadec : "L’absence de l’ADN ne signifie pas l’absence de la personne sur le lieu analysé, L’ADN de Lydie Troadec reconnait avoir conduit ce véhicule, porteuse de gants. Sa déclaration n’est pas incompatible avec sa présence dans le véhicule". "Je n’ai pas d’argument contraire".

10h. Courte suspension annonce la présidente, pour caler la présentation de l’expert suivant. A10h25, L’audience reprend.

La présidente appelle Manuel Quinquis, expert en morpho-analyses à l’institut d’expertises génétiques de Nantes-Atlantique.

L’expert explique en quoi consiste cette expertise criminalistique, sa méthodologie, l’analyse de traces de sang pour indiquer le dérouler d’une action.

Les mécanismes passifs, la gravité universelle, les mécanismes actifs, les projections, les mécanismes altérants, les nettoyages.

L’expert utilise un outil informatique de mise en image, permettant une déambulation dans la maison d’Orvault. Les éléments ensanglantés y sont pointés, un clic de souris permet de savoir à qui appartient ce sang, et dans quelles conditions il est présent.

Les traces mesurent parfois 1 ou 2 mm seulement. Les tests permettent de détecter du sang dilué jusqu’au 1 millième.

Hubert Caouissin regarde attentivement sans expression. Le regard de Lydie Troadec va alternativement de l’expert aux images, ou se perd dans ses pensées.

Les traces du sang de Sébastien Troadec dans sa chambre permettent d’affirmer qu’il a été frappé dans son lit et qu’il ne s’est pas déplacé. Le cône de distribution indique la projection du sang. L’observation permet, par la nature des traces, rondes ou allongées, de déterminer le lieu d’impact.

Les traces trouvées sur les objets permettent de déterminer le déplacement de ces objets. Des grattages ont été réalisés dans le plafond après les faits.

Les traces de sang permettent d’affirmer que des coups violents ont été portés sur Brigitte Troadec alors qu’elle se tient debout dans la chaùbre de Charlotte.

"On y trouve des traces de sangs projetées un peu partout, on observe une activité de nettoyage", dans la salle de bain, précise l'expert..

"Sa description des coups est compatible avec notre analyse"

"On observe de multiples contacts au premier étage, poursuit l'expert, pas de traces correspondantes à une action violente, ni activité de nettoyage. Cuisine, salon séjour, bureau, penderie.

La totalité des éléments retrouvés dans la maison ne permettent pas de donner de chronologie, de déroulé des faits ni sur la scène de crime, ni à la ferme du Stang

Manuel Quinquis, expert en morpho-analyses

"L’utilisation d’une barre à mine est compatible avec les traces de sang retrouvée. La barre de métal retrouvée sous le pont de l’Iroise est compatible. La hache retrouvée à Pont-de-Buis ne semble pas compatible. Elle provoquerait des plaies profondes et des saignements abondants qu’on ne retrouve pas à Orvault", porusuit l'expert..

"En reprenant les déclarations de Monsieur Caouissin, en les confrontant avec notre analyse, une partie de ses déclarations concernant Sébastien sont compatibles", poursuit Manuel Quinquis.

"Les autres déclarations sont compatibles, "Brigitte saisit la barre de fer lors de  l’altercation dans la chambre de Charlotte", sa description des coups est compatible avec notre analyse".

"La localisation des coups dans la salle de bain est compatible avec notre analyse. Pascal Troadec est frappé par Hubert Caouissin, son témoignage est compatible".

"Charlotte est frappée dans son lit, nous ne trouvons pas de traces de sang dans la mousse du matelas qui absorbe abondamment par principe. Nous n’avons rien observé. Hubert Caouissin se lave dans la salle de bain, nous ne pouvons rien démontrer".

"Le simple fait d’extraire le pied de biche du crâne, peut-il y avoir des projections ?"

"Mr Caouissin ne donne aucune explication pour les faits sanglants observés sur le fauteuil".

La présidente : "Le simple fait d’extraire le pied de biche du crâne, peut-il y avoir des projections ?", "C’est possible mais nous n’en observons pas, les traces suivent le mouvement de l’objet. Les coups sont portés depuis la zone de la porte, le cône de projection se dirige à l’opposé vers la fenêtre. On ne constate pas de mouvement de Sébastien dans sa chambre".

La présidente : "J’en viens à la chambre de Charlotte, là on a la notion de projections, pas de traces glissées, la notion d’un coup unique. Un seul coup sur quelqu’un d’allongé peut provoquer de telles projections ?", "Difficile à dire le premier coup en général ne donne pas de projections, sans les corps on ne peut rien avancer". "Des opérations de nettoyage ont pu faire disparaître une partie des traces de sang ?", "Tout à fait un nettoyage soigneux a pu en éliminer".

"On n’a pas trouvé de draps quelles conclusions pouvaient vous en tirer ?", "On n’a pas d’imprégnation des matières sous les draps, est-ce qu’il y avait une alèse, des matières plastiques qui empêchaient le transfert du sang, je ne sais pas".

"Monsieur Caouissin ne reconnait pas la barre trouvée au pont d’Iroise, Mr l’huissier pouvez-vous briser les scellés ?"

L’huissier s’empare d’un long paquet met des gants pour couper les scellés. Les ciseaux d’écolier sont inefficaces, "il faut qu’on prenne autre chose" dit la présidente. Elle ajoute, "il y a plusieurs couches d’emballage, on ne touche pas sans les gants. On va tout couper, on refera le paquet".

L’huissier se débat avec les emballages, ça fait sourire l’expert. La barre est enfin montrée aux juges, aux jurés, on voit un fer à béton torsadé. Hubert Caouissin scrute l’objet à son passage il s’adresse à Me Larvor brièvement.

La présidente : "Cette barre est-elle compatible ?", "Possible pour frapper, mais je doute que ce type de barre puisse se ficher dans la tête de Sébastien. Si on saisit cette barre par le bout, on est vite gêné par le plafond". "Les traces découvertes permettent-elles d’envisager une arme à feu ?", "Globalement non, les gouttelettes seraient différentes".

"La jeune fille pourrait avoir été frappée allongée ?"

"Dans le garage on ne retrouve pas le sang de Charlotte ?", "On retrouve des traces de sang qui indiquent une position statique pour Pascal, Sébastien et Brigitte, aucunement de traces de sang de Charlotte. Ce qui correspondrait aux déclarations de Mr Caouissin concernant l’usage de sacs plastiques".

Me de Oliveira :"Une question concernant Charlotte, est-il possible que l‘ensemble des éléments sanguins aient été absorbés par la couette ?", " C’est possible, les oreillers aussi ont une capacité d’absorbtion importante. La jeune fille pourrait avoir été frappée allongée ?", "C’est possible". "La barre de fer qu’on nous a présentée, c’est un câble du pont d’Iroise ?", "Je ne sais pas". "Vous dites que vous ne pouvez pas indiquer s’il y a eu usage d’arme à feu… ", "Non faute de corps".

Me Larvor :  "L’utilisation d’une barre à mine est possible sur Sébastien ?", " Non, il faut un côté perforant lors du choc, qui correspond mieux à l’usage d’un pied de biche". "L’utilisation d’une arme à feu, c’est non ?", "Par principe l’usage d’une arme à feu diffuse un brouillard de sang, qu’on ne constate pas ici".

"Sur la localisation des faits tels que racontés par Hubert Caouissin ?", "Globalement nos constatations concordent avec ses déclarations. Sauf pour un coup porté sur Brigitte… ","Vous n’expliquez pas, ni lui, des coups et des traces de sang de Brigitte trouvées au bas de l’armoire à droite en entrant.", "Non, on n’a pas de modèle complet pour ces traces".

L’avocate générale : "Les traces de sang dans l’escalier, qu’elles sont-elles ?", "Ce sont des traces de projections pas des traces de transport. On n’a pas de transfert de semelles ensanglantées vers le haut, les gouttes ne peuvent être que le résultat de coups portés". "Le transport de la barre ensanglantée ?", "Non ça donnerait des traces passives différentes".

"Où se trouve Pascal à ce moment-là ?", "Je le situe dans le couloir à ce moment-là". "Mr Caouissin ne nous a jamais dit que Pascal avait été frappé au pied de l’escalier". "Je ne sais pas précisément, ils ont dû bouger". "Ok" Répond l’avocate générale.

La présidente : "Dans la zone ça veut dire près des marches ?"," Les projections montent jusqu’à la 6ème marche. Il nous manque un modèle complet pour le localiser. Les projections peuvent aller jusqu’à 5 ou 6 mètres si on n’a pas d’obstacle. Les traces circulaires indiquent qu’on est dans cette zone, sinon, on aurait des traces ovoïdes".

Me de Oliveira : "Concernant Sébastien, l’hypothèse où il reçoit des coups allongés vous l’affirmez". "Oui". "Mr Caouissin indique qu’il était debout". "C’est peu compatible".

La présidente : "Mr Caouissin, avez-vous des observations à faire ?", "Non pas d’observations".

12h15. "Mr L’expert vous pouvez disposer, ne partez pas trop loin, nous aurons encore besoin de vous cet après-midi. On reprendra à 14h".

Reprise à 14h15

La présidente fait entrer Mrs Ronan Vinet expert sapeurs-pompiers et Jean-François Schmauch ingénieur à la retraite, colonel des sapeurs-pompiers.

Hubert Caouissin, le meurtrier présumé et beau-frère de Pascal Troadec, a expliqué durant les premiers jours du procès comment il avait tué en pleine nuit les quatre adultes à coup de pied de biche, avant de transporter les corps qu'il a décapités et en partie brûlés dans la chaudière de sa ferme isolée du Finistère.

Les experts ont étudié la chaudière de la ferme du Stang à Pont-de-Buis.

"Les températures atteintes et leurs durées déterminent la disparition totale ou partielle des corps. Nombre des appareils qui nous entourent ont une température de 3 à 400°. Une bougie dégage au plus 1500°".

Les experts précisent que dans une crémation ordinaire, à des températures de 720 à 800° 80% des os sont encore identifiables après 60 minutes.

Après 850 à 1000° entre une et deux heures, on retrouve encore des parties identifiables telles que les crânes, les dents.

Hubert Caouissin se tient toujours tête baissée, regard baissé. Il se redresse un instant pour observer le schéma montrant dans quel ordre les parties du corps disparaissant durant une crémation. Et se rebaisse.

Les experts continent leur description, indiquent qu’une fois l’humidité des corps évaporée, les graisses et les os entretiennent la combustion. On retrouve toujours les prothèses dentaires, les implants, etc. Dans le cas d’une crémation légale, les os sont broyés avant d’être mis dans l’urne funéraire et remis à la famille.

Pour que la combustion s’entretienne il faut un espace clos.

La chaudière 

"C’est une machine fort ancienne qui permet d’atteindre les températures nécessaires, explique Jean-François Schmauch, une chaudière ELM Leblanc Geminox GB 40 S qui ne se fait plus, conçue pour un usage rustique et même rural. On peut y faire brûler du bois".

Il précise que l’usage de cette chaudière est simple d’emploi, et peut fonctionner en feu continu. On peut l’exploiter au-delà de ses capacités, fautes d’appareils de contrôle modernes.

La chaudière dispose d’une grande cheminée qui permet de dissiper les fumées en hauteur sans dégager d’odeurs.

Le foyer mesure 0,40 m3, ce qui en fait "une grande chaudière". Le foyer est étudié pour des bûches d’un mètre de longueur."On a trouvé des bûches à côté parfaitement dimensionnées". On peut y retirer les cendres en cours de chauffe. La puissance maximale est de 40 kW, son rendement de 60%.

Les experts expliquent les caractéristiques de la chaudière de la ferme de Pont-de-Buis.

"Le bois monte rapidement à 300°, une fois l’eau évaporée le bois brûle à 800°. Si le bois est très sec on va monter à 1800°. Avec 20% d’humidité on aurait 1200°. La température dans le foyer atteint 1 000°".

"Pour permettre la combustion des corps, il faut assurer une conduite parfaite en manuel, pour limiter la température et le risque de surchauffe. À titre d’exemple, 10 kg de matières moles, animales, donnent 10 000 m3 de fumée pestilentielle, c’est le volume de cette salle d’audience".

"Pourquoi Mr Caouissin présentait des traces de coup de chaud sur le visage ? Peu de réponse, exposition longue à la chaleur, retour de flamme, on ne peut pas savoir".

"En conclusion cette chaudière présente des caractéristiques supérieures pour faire disparaître des corps . Compte tenu du dépeçage des corps et de l’absence des têtes, 2 à 3 heures ont suffi pour faire disparaître les os".

L’expert conclut que ces températures suffisent à la crémation d’un corps, ou de parties de corps.

La présidente : "Cette chaudière nécessite d’en connaître le fonctionnement". "Absolument". "L’évacuation de la fumée était visible, colorée ?", "La fumée était sûrement sombre, mais à grande distance comment s’en rendre compte dans cet endroit perdu".

"Mais Mme Troadec vit sur place, a-t-elle pu observer les évacuations de fumées ?", poursuit la présidente, Jean-François Schmauch répond, "elle vit dans la maison sous la cheminée, il y a du vent, il y a de fortes chances, qu’il n’y ait pas de retour de fumées dans la maison". Ronan Vinet ajoute "Un corps incinéré dégage une odeur pestilentielle mais encore faut-il encore que les fumées soient danses et qu’on connaisse cette odeur".

"En même temps je continuais la préparation des corps"

"Je fragmentais les corps au fur et à mesure" avant d'en faire brûler une partie, a expliqué l'accusé, vêtu d'une chemise bleue froissée, à la présidente de la cour d'assises, qui l'interrogeait en présence de deux experts incendie.

La présidente : "Les crânes sont plus long à brûler, on aurait retrouvé des implants dentaires". "Mr Caouissin, des observations ?","La régulation je mets un petit bâton pour bloquer l’arrivée d’air. J’ai ajouté un peu d’eau pour refroidir. Ça a duré bien plus longtemps que ce que disent les experts". La présidente le relance. Il complète : "Ça a duré plus longtemps car en même temps je continuais la préparation des corps".

"Saviez-vous que la combustion des chairs ralentissait le processus". "Non, j’ai toujours su qu’on ne met pas d’humidité dans un feu. C’est un concept élémentaire" a poursuivi Hubert Caouissin dans un échange semblant déconnecté de l'horreur de la situation décrite.

"Quelle est la raison pour laquelle ces crânes n’ont pas été brûlés". "Je les avais mis dans un sac, je ne voulais pas les voir". "Mais pourquoi ne pas les brûler ?", "Je ne peux pas les mettre dedans, il y avait le feu, il aurait fallu les sortir du sac un par un et les voir". Il regarde l’image projetée sur l’écran par les experts du foyer vide.

"Mais vous saviez ce qui allait se passer ?", "Non, je ne savais pas que les os allaient être pulvérisés", "Pulvérisés ?", "Ben réduits en poussière quoi !".

La présidente : "Madame Troadec, vous aviez constaté des anomalies ?", "Il y a un bidon à l’étage, quand il fait trop chaud, le bidon déborde, on ouvre les fenêtres. Je ne connaissais pas le truc d’ouvrir la vanne".

"Les fumées, les odeurs ?", "Non je n’ai rien remarqué"

Question d’un juré : "Vous aviez eu des réticences à utiliser une scie pour ne pas abimer les os, pouvez-vous préciser pourquoi ne pas vouloir abîmer les os et les brûler ?", "Je voulais les garder propres, pour les rendre plus tard peut-être. C’est la seule idée qui me soit venue".

Me Pacheu : "Mr l’expert, en temps normal en hiver est-il nécessaire qu’une personne reste à proximité ?", "Dans des conditions normales d’utilisation, cette chaudière ne nécessite pas plus d’une intervention par jour. Si le clapet ne fonctionne plus, peut-être faut-il venir plus souvent pour régler la combustion".

"Quand on ajoute des matières molles, des restes de corps humains, combien de temps faut-il passer de temps, faut-il rajouter du bois ?", "Non, cette chaudière une fois qu’elle est démarrée s’auto alimente. Alors, si on veut accélérer la combustion , on peut rajouter du bois".

"Mr Caouissin, le foyer qui est dans la cour, quand l’avez-vous allumé ?", "Le samedi après-midi". "Que brûlez-vous dedans ?", "La peau…".

Me de Oliveira. "Sébastien, c’est le samedi ?", "Oui". "Pas d’autre ?", "Non". "À la suite des deux dépositions des deux experts avez-vous des observations à faire ?"," Je ne comprends pas le sens de votre question". "Même question à Mme Troadec ?", "Je n’étais pas là le samedi, sortie avec Jean, je n’ai pas pu voir le feu".

"Je les ai mis dans des sacs plastiques"

Question des jurés : "Comment avez transporté les corps du hangar, de l’endroit où vous les avez découpés, jusqu’à la chaudière ?", "Je les ai mis dans des sacs plastiques".

Me Fillon : "Me de Oliveira ne vous demandait sans doute pas une réponse technique, étiez-vous dans votre état normal ?", "J’étais dans un état automatique, dans un autre monde, comment pensez-vous aujourd’hui que vous avez pu faire tout-ça ?", "Ça me parait inconcevable".

15h37 La présidente appelle Élodie Cabot, archéo-anthropologue, travaille à l’INRAP, docteur Guillaume Visseaux, médecin légiste.

Élodie Cadot explique "mon travail consiste à travailler sur les restes humains pour déterminer le profil biologique du décédé. Âge, sexe, maladie, traumatismes… Les anthropologues étudient les gestes des vivants avec leurs morts. Notamment les interprétations de l’incinération. On parle d’anthropologie forensique ou d’anthropologie médicolégale".

Le médecin précise que la levée de corps a été effectuée le 7 mars 2017. Il est intervenu le 8 mars 2017, en même temps qu’Hubert Caouissin. "Il nous indique avoir dépecé, démembré les corps après les avoir décapités".

"Nous avons mis en place les procédures de relevage de victimes définie par Interpol telle qu’utilisée dans les catastrophes aériennes. Les éléments retrouvés ont été géolocalisés un par un et scellés, placés dans un véhicule funéraire frigorifié".

Près de la maison l’anthropologue décrit le bûcher extérieur. "Des sacs plastique, des vêtements, un feu de 2,70 par 0,50 m. La fouille a été réalisée avec des mini-truelles et des pinceaux. Nous avons effectué trois passes de fouilles. La première ne donne aucun reste osseux ou dentaire. La seconde révèle une partie de corps, un insecte nécrophage est détecté. La troisième passe n’a pas révélé de traces d’ossements ou dentaires".

"Le sol n’a pas été rubéfié, il n’a pas chauffé en profondeur, les ronces à proximité ont peu chauffé indiquent que le feu n’a pas été très puissant. Pas de nature à brûler des têtes".

"Dans le local de la chaudière nous avons trouvé des résidus de crémation, dans un tamis dans un bac de maçon. Les esquilles osseuses, ou refus de tamisage, ont été retrouvées vers le poulailler et dans le poulailler. On y aperçoit des esquilles d’os millimétriques. L’ensemble a été lessivé par la pluie".

379 éléments de corps ont été retrouvés

Le médecin indique qu’il a fallu débroussailler la zone la plus éloignées du domicile, comme désignée de dispersion des viscères, à la main ou mécaniquement pour relever 110 éléments de corps. Une zone plus proche de la maison a permis de récupérer deux éléments de viscères. Au total, 379 éléments de corps ont été retrouvés.

L’anthropologue indique que seules des recherches en surface ont été effectuées au bord de l’Aulne maritime, à l’aide de détecteurs de métaux et de perches pour sonder la berge. Si des éléments informatiques ont pu y être retrouvés, les têtes n’ont pas pu l’être.

Il a fallu accéder chez les propriétaires voisins pour faire passer des machines spécifiques au décapage des couches des vases des berges soumises au marnage. Les ravines ont été creusées sur 2,5 m de profondeur, puisque les têtes avaient été déposées dans l’une d’elles. Ces fouilles ont été effectuées les 13 juin 2017 et les 3 et 4 avril 2019.

En conclusion nous n’avons trouvé aucun reste de têtes ou restes osseux

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Le médecin indique ensuite comment les autopsies ont été pratiquées au vu du nombre de fragments humains. Aucun tissu cutané n’a été relevé. 379 scellés ont été examinés.

"On a pu retrouver des parties des corps de Sébastien, Brigitte, Charlotte. Un estomac a été retrouvé dégageant une forte odeur d’alcool. Des analyses génétiques ont été effectuées, des prélèvements toxicologiques également".

"Des éléments de chair et de gras présentent des colorations violacées inconnues. Elles ne sont pas des dépôts pigmentaires laissés par le marquage d’une scie par exemple. Il s’agit probablement d’une putréfaction liée à la température et de l’environnement".

Les médecins légistes identifient au moins quatre victimes, dont deux femmes et un homme formellement. La cause du décès n’a pas pu être déterminée, faute d’éléments. Certains corps présentent des traces de contusions. Un seul fragment cutané a été trouvé.

"Aucun élément de la face visible, œil, élément dentaire, ou encéphale n’a été retrouvé. Ce qui confirme le témoignage du mis en cause relatif à la décapitation". Le médecin indique qu’un bloc de viscères pulmonaire et digestif a pu être extrait en découpant le bloc de cartilage avec un couteau.

L’autre bloc reste solidaire de la sangle abdominale. "Aucune technique d’éviscération connue ne permet de le faire. Que ce soit en médecine légale, en chasse, en boucherie. Sauf en désossant le corps. En théorie c’est très difficile à réaliser au niveau de la technicité anatomique, c’est assurément extrêmement compliqué".

Les blocs présentent des plaies nettes de type couteau. Pas de type scie. Le médecin indique qu’il s’agit d’un dépeçage défensif, il n’y a pas de volonté d’abîmer le corps, pas d’ablation des seins ou des organes génitaux par exemple. Le tronc de Pascal ne présente pas de cœur. Là, on a un processus volontaire pour enlever le cœur du bloc viscéral. Hubert Caouissin, qui semblait suivre l’expert attentivement jusque-là, replonge sa tête en avant.

"Il y a forcément eu un broyage"

L’anthropologue indique comment dans les cendres, les restes osseux non brûlés ont été analysés. Il s’agit de fragments millimétriques, côtes ou homo-plates. Ces fragments sont liés à un évènement traumatique local.

Dans les éléments osseux retrouvés dans le bûcher indiquent que la crémation a été assez hétérogène. Des fragments d’émail ont été identifiés. Des éléments vestimentaires, boutons rivets, plomb fondu, également des agrafes de papeterie sont retrouvés.

Dans la chaudière, des fragments osseux ont été retrouvés, sans pouvoir leur attribuer une origine anatomique. On trouve aussi des éléments non organiques, des agrafes en fer de type papetterie, ainsi que des éléments d’une plaque minéralogique.

Dans le bac de maçon près de la chaudière on a trouvé des éléments osseux sans pouvoir leur donner une origine anatomique.

Dans les deux zones du poulailler, on retrouve des esquilles d’os. Le degré d’information ne permet pas d’en identifier la provenance. Leurs couleurs, blanche et grise, indique des températures hétérogènes.

En bord de rivière on retrouve 352 esquilles et fragments d’os dont 258 fragments d’os. Le poids moyen est largement supérieur à ceux du bûcher ou de la chaudière, il est plus facile de les rattacher à un os ou segment anatomique. Les couleurs indiquent des différences de températures, ou des fractures liées à la température.

"On trouve des fragments de vertèbres, de radius, de rotules, de fémur, d’une longueur de 5 cm. On retrouve presque 3 000 fragments osseux pour 326 grammes. Il y a forcément eu un broyage" précise l’anthropologue.

L’experte indique que la totalité des os a été brûlée, en faisant le rapport entre poids des os retrouvés et poids théorique des squelettes. Moins la boîte crânienne. Mais seulement deux individus peuvent être comptabilisés. La crémation ne permet pas de faire des analyses ADN pour attribuer les fragments à tel ou tel individu. Le collagène de l’os ayant disparu.

18h. La présidente suspend la séance pour 20 minutes.
    
Tout au long de cette sixième journée de procès, les experts se sont penchés sur les détails macabres de ces meurtres motivés, selon l'accusé, par l'existence d'un "magot" familial que le couple Troadec aurait dissimulé à son détriment.

Hubert Caouissin est accusé de "meurtre précédé, accompagné ou suivi d'un autre crime" et "atteinte à l'intégrité de cadavres". Lydie Troadec, son ex compagne, comparaît pour "recel de cadavres" et "modification des preuves d'un crime".

Au premier jour du procès, mardi 22 juin, Lydie Troadec a décrit à la barre le contexte d'une haine familiale ancienne et mystérieuse entre elle et son frère Pascal, au premier jour du procès du quadruple meurtre de la famille.

Mercredi 23 juin, c'est la vie d'Hubert Caouissin qui a été examinée. "Compulsif", "obsessionnel" et volontiers paranoïaque, Caouissin, toujours "ancré dans le passé" et convaincu de l'existence du "magot" qui l'a conduit au quadruple meurtre de la famille Troadec.

Jeudi 24 juin, la personnalité des quatre victimes a été évoqué. Une journée riche en émotions avec les témoignages notamment des soeurs de Brigitte Troadec.

Vendredi 25 juin, la journée a été consacrée aux témoignages des enquêteurs. L'un des enquêteurs a décrit un homme au comportement "étrange" et particulièrement "volubile" lors de sa première garde à vue alors que l'on était sans nouvelle desquatre membres de la famille Troadec.

"Je pensais qu'ils étaient assommés" : la cour d'assises de Loire-Atlantique a tenté lundi 28 juin de comprendre "l'état d'esprit" dans lequel Hubert Caouissin se trouvait, la nuit du quadruple meurtre de la famille Troadec, en février 2017, pointant les nombreuses incohérences dans le récit principal accusé.

Le procès des deux accusés se tient aux assises de Loire-Atlantique à Nantes jusqu'au 9 juillet prochain.

Hubert Caouissin, 50 ans, comparaît depuis le mardi 22 juin et pendant trois semaines devant la cour d'assises de Loire-Atlantique. L'ancien ouvrier chaudronnier de l'arsenal de Brest encourt la réclusion criminelle à perpétuité. 
    
Lydie Troadec, 51 ans, comparaît libre. Elle encourt trois ans de prison et 45 000 euros d'amende pour modification de scène de crimes et recel de cadavres.

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