Jean-Marc Ayrault retiré de la politique ? De la politique active, oui, puisqu’il n’a plus aucun mandat ou charge ministérielle. Mais pas de la politique citoyenne. Ses commentaires sur l’actualité sont rares. Mais dans Dimanche en Politique, il s’est confié sur la situation du PS, son parti auquel il reste fidèle envers et contre tout. Et sur son combat pour la mémoire de l’esclavage, dont il préside la fondation nationale.
Jean-Marc Ayrault est rare dans les médias. "Je suis pourtant très sollicité. Mais commenter la politique en permanence et démolir les uns ou les autres, ça ne m’intéresse pas". L’ancien 1er ministre et ancien maire de Nantes est pourtant sorti de sa réserve cette semaine pour participer à notre émission Dimanche en politique.
Et c'est au cœur du mémorial de l'esclavage que l'on retrouve l'ancien maire de Nantes et ancien Premier ministre. Très attaché à ne pas oublier ce passé, cette histoire, il préside aujourd'hui la Fondation pour la mémoire de l'esclavage.
La fondation Jean Jaurès, une boîte à idées pour la Gauche
Ces questions liées à la mémoire, à notre histoire sont aussi au cœur d’une autre fondation, également dirigée par Jean-Marc Ayrault. Depuis la fin de l’année dernière, il dirige la fondation Jean Jaurès. Un cercle de réflexion, classé à Gauche et créé par Pierre Mauroy, qui "défend l’histoire sociale, le progrès et la démocratie dans le monde".
Une fondation qui est aussi "une boite à idée pour la Gauche". Pas seulement pour le PS, dont Jean-Marc Ayrault a jugé la situation "pathétique" en janvier dernier lors de l’élection du 1er secrétaire.
La situation "pathétique" du PS selon Jean-Marc Ayrault
"Quand on est si faible et qu’en plus, on se déchire, c’est pathétique" martèle-t-il à nouveau devant nos caméras. "Si ce sont des débats d’idées, des confrontations politiques, OK. Mais, si ce sont des querelles de personnes en pensant que le monde n’a pas changé, qu’on est toujours aussi forts que dans le passé, qu’on peut tout se permettre, on va à l’échec et surtout, on se ridiculise".
Un tacle pour la direction actuelle du PS. Et pour Johanna Rolland, nouvelle N°2 du parti ?
Un soutien pour la maire de Nantes
Jean-Marc Ayrault n’ira pas jusque-là. Il continue à soutenir la maire de Nantes, qui, dit-il, en évoquant l’avenir de la Gauche, "a sa part à prendre, elle est en train de la prendre. On verra dans la durée, mais c’est un combat difficile qui doit être avant tout un combat d’idées".
La Gauche "manque de propositions"
Les idéaux de la Gauche sont pourtant plus que jamais d’actualité, avec une forte demande de justice sociale. "Il faut réfléchir à ce que pourrait être un programme d’alternative. Mais il y a un manque de propositions. Ça m’attriste. Mais ça ne me décourage pas. Il faut que la Gauche aille à l’essentiel, pour que les gens se disent : on peut leur faire confiance à nouveau".
Mais pour l’ex-1er ministre, cela ne passera pas par la Nupes, qu’il ramène à un seul accord électoral. Pas question d’aller plus loin, lui qui avait qualifié ce rapprochement pour le PS de "forme de démission qui n’est pas défendable". Un "rafistolage" qui a pourtant permis à la Gauche de reconquérir 5 sièges de députés en Loire-Atlantique aux dernières législatives (elle les avait tous perdus en 2017).
"L’histoire alerte le présent"
Des querelles à gauche, qui présentent un vrai risque pour l’ancien 1er ministre : ouvrir un boulevard à l’extrême-Droite pour 2027.
"Ce que nous apprend l’histoire, au-delà de celle de l’esclavage, c’est qu’il ne faut pas se laisser happer par le populisme et les régimes autoritaires. Regardez ce qui se passe à St Brévin" [dont le maire Yannick Morez a démissionné après avoir reçu des menaces de groupuscules d’extrême droite]. "C’est un acte fort qu’il a décidé. Un acte courageux qui est une alerte. Je comprends sa colère. Nous tous, citoyennes et citoyens, nous devons écouter son message, et pas seulement dire que font l’État et le gouvernement ? Il faut apporter plus de raison et de respect, face à cette polarisation et cette radicalité dans lesquelles on se laisse un peu trop facilement entrainer".
Un défenseur de la mémoire de l'esclavage
Le lieu de notre interview n'est donc pas anodin. Le Mémorial pour l’abolition de l’esclavage de Nantes est le fruit, avec son équipe municipale, de ses années à la tête de la mairie de Nantes. Inauguré en 2012 sur les bords de Loire, quai de la Fosse.
C’est de là que sont partis plus de 1700 bateaux, vers l’Afrique, avant de reprendre la mer, les cales chargées d’hommes, de femmes et d’enfants vendus comme esclaves une fois débarqués en Amérique ou aux Caraïbes. 1744 expéditions très exactement, qui ont fait de Nantes le 1er port négrier de France.
Retour sur ce passé avec les interviews de : Kristel Gualde (directrice scientifique du musée d'histoire de Nantes) et Éric Saugera (historien et auteur, spécialiste de la traite négrière).
Le Mémorial est très fréquenté, par des scolaires notamment. "C’est un lieu de méditation. Nous sommes ici comme dans une cale de navire, nous évoquons l’épreuve, la douleur, la violence, le désespoir et en même temps la révolte des esclaves qui se sont battus pour leur liberté" rappelle Jean-Marc Ayrault.
Il faut regarder son histoire en face. C’est ce que Nantes a fait.
Jean-Marc Ayrault
Mais que savent les Nantais et les touristes de passage de cette histoire qui concerne la ville, longtemps 1er port négrier de France ? Nous sommes allés leur poser la question.
L’esclavage a été aboli en France il y a tout juste 175 ans, en 1848. Mais il reste encore d’actualité dans de nombreux pays, sous des formes diverses. Les Nations-Unies estiment que 30 à 40 millions de personnes en restent victimes dans le monde.
Il faut un Mémorial National
Et si Nantes a été précurseur, en créant le 1er Mémorial en France et l’un des 1ers au monde, le reste du pays est plus réticent à s’emparer de cette question. Un Mémorial national avait été promis par Emmanuel Macron à Paris, dans le jardin des Tuileries. Un projet dont on n’entend plus parler… Mais qui devrait bien voir le jour. "Le Président m’a promis qu’il serait créé. Probablement d’ici 2 ans et pas aux Tuileries, mais dans un autre lieu de la Capitale."
► Dimanche en politique, spécial Jean-Marc Ayrault, ce dimanche 14 mai à 11h25 sur France 3 Pays de la Loire.
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