Le nail art, l'autre star des Jo de Paris 2024 : parfois œuvre d'art, mais pas sans danger

On en voit de plus en plus. Au bout des doigts des stars ou sur les mains des athlètes aux JO, les ongles sont les nouvelles stars du moment. Le marché de l'onglerie se développe, et avec lui une profession pas vraiment encadrée.

Société
De la vie quotidienne aux grands enjeux, découvrez les sujets qui font la société locale, comme la justice, l’éducation, la santé et la famille.
France Télévisions utilise votre adresse e-mail afin de vous envoyer la newsletter "Société". Vous pouvez vous désinscrire à tout moment via le lien en bas de cette newsletter. Notre politique de confidentialité

Il serait apparu en Chine ou en Égypte antique, il y a plus de 3 000 ans. Il était, à l'époque, fait de laque, de pétales de fleurs ou de henné et pouvait même donner des indications sur la classe sociale de celle ou de celui qui le portait. Vous donnez votre langue au chat ? Il s'agit du vernis à ongles.

Cette parure esthétique a traversé les âges pour arriver jusqu'aux Jeux olympiques de Paris 2024. Plusieurs athlètes, des hommes comme des femmes, ont exhibé leur manucure et leur nail art lors de la compétition sportive. 

Apparue dans les années 1950, la prothésie ongulaire s'est largement développée et la professionnalisation des métiers de l'onglerie s'est fortement enrichie. Aujourd'hui, il existe de multiples techniques, par exemple : la manucure japonaise ou russe, le vernis semi-permanent, les faux ongles en gel, en acrylique ou en capsules.

Une étude de Transparency Market Research, évalue le marché mondial actuel de l'onglerie à 13,3 milliards de dollars. La société d'intelligence économique prédit que le marché va grossir de 77,4 % d'ici à dix ans.

L'expansion de l'onglerie doit aussi beaucoup aux réseaux sociaux. De nombreux professionnels indépendants utilisent Instagram comme vitrine et plateforme de communication. Aujourd'hui, une bonne partie de ces spécialistes sont des autoentrepreneurs indépendants.

Un petit truc en plus

Derrière les chiffres d'un marché florissant, il y a des personnes. En dehors des salons de manucure, de nombreuses prothésistes ongulaires exercent chez elles, en indépendantes. 

Chloé Omnes a 21 ans, et accueille Maddy David chez elle, à Nantes, pour une prestation. Il y a encore peu, la jeune femme ne se doutait pas qu'elle deviendrait prothésiste ongulaire. "J'ai fait un BTS commerce international et commencé une licence commerciale. Mais je crois que j'ai fait des études juste pour faire des études", confie-t-elle.

Je ne pensais pas du tout que ce serait mon métier

Chloé Omnes

Prothésiste ongulaire

Depuis toute petite, Chloé est attirée par l'esthétique. Mais la jeune fille n'envisageait pas ce centre d'intérêt comme un véritable métier. En se faisant ses porpres ongles, elle se découvre une passion pour le nail art. Le côté artistique la séduit. "Je voulais toujours m'améliorer et aller plus loin, faire plus de nail art et finalement, c'est devenu mon métier. Avec du recul, finalement, ça ne m'étonne pas", reconnaît-elle. 

Face à Chloé, de l'autre côté d'une petite table blanche, Maddy. La jeune blonde de 22 ans vient dans ce petit coin de salon toutes les trois semaines ou une fois par mois depuis décembre. Faire ses ongles, c'est son petit plaisir. Elle raffole des nail arts complexes aux couleurs extravagantes.

Si elle semble calme et sage en apparence, c'est au bout de ses doigts que Maddy exprime son grain de folie. La jeune femme travaille en caisse, "on a une tenue à respecter, ça permet de rajouter un petit truc en plus". Ses extensions ongulaires, elle les aime longues, avec des éléments en reliefs et, de préférence, roses.

Au travail, j'ai des clients qui viennent me voir juste pour mes ongles

Maddy David

Cliente régulière de Chloé David et caissière

Ce jour-là, Maddy montre à Chloé une inspiration qu'elle a trouvée sur Instagram. La jeune prothésiste va essayer de reproduire ce nail art en y ajoutant un peu de son esthétique. "Je fais d'abord les contours et les french. Après, je ferai tous les effets 3D et les strass", explique Chloé. 

Ça vous paraît complexe ? Ce n'est rien à côté du nombre d'étapes nécessaire pour ressortir de chez Chloé avec des mains impeccables.

Une prestation aux mille étapes 

Déjà, il y a la dépose, c'est-à-dire le retrait de l'ancienne manucure. En fonction de ce que la cliente avait sur ses ongles, la dépose peut être plus ou moins longue. Ensuite, il faut s'occuper de l'ongle et des cuticules, on rentre dans la partie soin proprement manucure.

Puis, il faut choisir le type de procédé. Est-ce que la cliente veut des ongles en gel, un gainage, des extensions au chablon, des capsules ou juste une pose de semi-permanent sur ongles naturels , Une fois le choix fait, il faut constituer l'ongle pour la technique au gel et au chablon, coller les capsules ou commencer à appliquer les (nombreuses) couches du vernis semi-permanent.

Il existe davantage de savoir-faire et de procédés, nous énumérons ici simplement les techniques de base.

Enfin, le nail art. La décoration ne représente qu'une petite partie des séances. En fonction de la professionnelle, cette dernière étape peut prendre plus ou moins de temps. C'est ce que préfère Chloé, chez elle, cette partie représente deux tiers de la prestation.

Aujourd'hui, Maddy a opté pour des capsules américaines. Il s'agit de faux ongles en gel souple, que l'on vient coller sur toute la surface de l'ongle naturel. La décoration sera extravagante, comme toujours. Fleurs en relièfe, strass et zébrures, le tout sur fond rose bonbon.

La prothésie ongulaire est issue en partie des innovations dentaires. Ce serait un dentiste américain qui aurait eu l'idée, en 1950, d'allonger les ongles des actrices de cinéma avec des résines destinées aux soins dentaires. C'est à partir de ce moment que les extensions se sont démocratisées, jusqu'à arriver aujourd'hui au bout des doigts de Maddy.

Ce petit point d'histoire est important pour comprendre que les ongles, au même titre que les dents, peuvent être travaillés minutieusement, et même, médicalement.

Réparer et soigner l'ongle

En-dehors du champ de l'esthétique, certaines professionnelles se concentrent sur la restauration et le soin de l'ongle. Alors oui, aller soigner ces ongles est moins important que d'aller régulièrement chez le dentiste. Mais de nombreuses personnes, sans être intéressée par les extensions ou le nail art, souhaitent avoir des ongles en bonne santé.

Certaines clientes qui rongent leurs ongles prennent rendez-vous chez les prothésistes ongulaires pour essayer d'arrêter cette mauvaise habitude. Le vernis semi-permanent peut les dissuader de mettre les mains à la bouche et leur faire gagner en longueur.

Outre la vitalité de l'ongle et la beauté des mains, s’il faut soigner les ongles, c'est aussi parce que la mode des extensions ongulaires et des nail arts extravagants n'est pas sans risques. Avoir des faux ongles n'est pas néfaste pour l'ongle, car il s'agit de cellules mortes. En revanche, lors de la repousse de l'ongle, si la cliente ne fait pas de dépose suffisamment tôt, l’extension peut venir appuyer sur la plaque naturelle et endommager les différentes couches de kératine.

Lauraline Vételé est prothésiste ongulaire dans une petite commune de Loire-Atlantique. Elle reçoit souvent des clientes dont les ongles ont été abîmés par d'autres professionnelles. "Il y a des risques quand on fait les ongles de quelqu'un", rappelle la jeune femme de 24 ans.

C’est important d'avoir des notions d'hygiène et de sécurité

Lauraline Vételé

Prothésiste ongulaire

"Quelqu'un qui n'a pas les notions d'anatomie de l'ongle, c'est problématique. Il faut respecter l'ongle parce qu'il peut y avoir des dangers, des infections, des allergies, des douleurs ou des complications", explique Lauraline. Elle ajoute, "on se doit d'utiliser des produits aux normes européennes, mais beaucoup l'ignorent".

Parmi les cas qu'elle a dû rattraper, Lauraline a eu affaire à des ongles creusés et fragilisés. "L'ongle va être creusé parce qu'il y a une mauvaise pratique de la ponceuse", analyse-t-elle. "La ponceuse, il faut apprendre à l'utiliser, on ne peut pas se former toute seule avec cet outil. C'est important de faire attention à l'inclinaison par exemple, puisque derrière, cela peut être douloureux et abîmer l'ongle en profondeur", rappelle Lauraline.

La jeune femme avoue, "si je me suis permis de me former toute seule à l'onglerie, c'est parce que j'avais des bases grâce à mon CAP esthéticienne". Mais pour elle, les prothésistes ongulaires doivent se former d'une manière ou d'une autre.

Formation à tout prix, reconnaissance nulle part

Se former pour exercer. Une indication, pour rassurer les clientes, qui n'est malheureusement pas obligatoire. Aujourd'hui, n'importe qui peut devenir prothésiste ongulaire du jour au lendemain. Pourtant, comme nous l'avons dit, la pratique n'est pas sans risque.

Ce qui prouve ma qualité de travail, ce sont mes photos, mon Instagram et le bouche-à-oreille

Lauraline Vételé

Prothésiste ongulaire

La plupart des prothésistes ongulaires indépendantes, qui ne travaillent pas dans un salon de manucure, pratiquent depuis leur domicile. Elles utilisent les réseaux sociaux comme vitrine où exposer leur travail. Sur Instagram, il est possible de trouver des milliers de prothésistes ongulaires indépendantes et de prendre rendez-vous directement par message ou via un lien laissé dans leur bio.

J'ai passé un diplôme d'esthétique, car les formations ne sont pas reconnues par l'État

Lauraline Vételé

Prothésiste ongulaire

Depuis qu'elle est toute petite, Lauraline sait qu'elle veut travailler dans l'esthétique. Au collège, avec sa meilleure amie, elle commence à se faire les ongles. Elle se souvient, "toutes les semaines, on se retrouvait et on faisait nos petits ongles avec du vernis simple. On commençait à faire de la déco. À partir de ce moment, j'ai adoré ce que je faisais". Après un Bac professionnel Commerce, Lauraline se dirige vers un CAP esthétique suivi d'un brevet professionnel d'esthétique, car elle voulait avoir un diplôme reconnu.

C'est dommage que ce ne soit pas réglementé

Chloé Omnes

Prothésiste ongulaire

"Quand je me suis lancée, raconte Chloé, j'ai fait des formations. Mais j'ai cherché de moi-même, personne n'a pu me conseiller et me dire, celles-là est bien, mais pas celle-ci".

La Nantaise déplore la situation de sa profession, "pour les clientes aussi, c'est compliqué de se repérer. Et puis être formé ça ne veut pas forcément dire qu'on est une bonne prothésiste. En fait, comme ce n’est pas reconnu, ça ne veut presque rien dire".

Comme le souligne Chloé, les clientes peuvent vite être perdues. Elle recommande donc, pour éviter les mauvaises expériences, de se renseigner sur les avis clients, de se fier au bouche-à-oreille, et d'échanger en amont avec la prothésiste pour voir si elle est sérieuse et si ses prestations correspondent aux besoins de la personne. Elle souligne, "il faut aussi analyser les photos sur Insta, regarder les détails, si les finitions sont propres ou pas. Voir si la personne met des photos un peu du lieu et son visage. Ça peut aussi être rassurant et aider à bâtir une relation de confiance".

Des oeuvres d'art au bout des doigts

Si Chloé et Lauraline s'inquiètent du manque de reconnaissance de leur profession, elles n'en sont pas moins passionnées. Prendre soin et embellir les mains de leurs clientes les motive chaque jour à s'investir dans un travail très chronophage. Les deux jeunes filles doivent gérer, seule, la prise de rendez-vous, les échanges avec les clientes et la communication via les réseaux.

Ce qui les anime, c'est aussi le souci du détail, l'expression artistique possible dans ce métier, où (presque) tout est possible.

Voir cette publication sur Instagram

Une publication partagée par MADRINAILS (@madrinails)

Sculpture, dessin, couleur et strass. Les possibilités sont infinies, de la plus simple french aux ornements les plus complexes. Du plus kitsch au plus subtile, tout dépend de la prothésiste ongulaire et de son univers. Qu'on aime ou qu'on n'aime pas, certains nail art force le respect et ajoute un peu de fantaisie dans notre quotidien.

Retrouvez-nous sur nos réseaux sociaux et sur france.tv.

 

Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité