À 26 ans, le Sarthois Alexandre Allain va courir le marathon de Paris dimanche 17 octobre, une première pour lui. Né avec la mucoviscidose, greffé des poumons, ce garçon qui n'a peur de rien, veut remercier greffon et médecins qui lui ont permis de reprendre son souffle. Et courir pour la vie.
À 26 ans, Alexandre Allain a tout du rescapé de la vie. Il est né avec la mucoviscidose, et il doit son salut à un don d'organe. Et sans doute à un caractère en acier trempé ! Il respire désormais au travers des poumons d'une ou d'un autre. Et puisqu'il respire à nouveau, ce sportif qui pratiquait le foot assidument durant son enfance, a voulu courir le marathon de Paris pour remercier ce donneur inconnu.
"Je me suis mis à la course à pied il y a neuf mois, le sport a toujours fait partie de ma vie. Avant la greffe, je jouais au foot à Noyan-sur-Sarthe, et je faisais de la danse modern jazz. Dans la perspective du marathon, je me suis mis à courir quotidiennement avec des entraînements chaque semaine".
Dans son cas, le sport est envisagé par les médecins comme un moyen thérapeutique. "J'ai dû arrêter le foot du fait d'opérations qui me contraignaient, je ne pouvais plus recevoir de chocs physiques au niveau de l'abdomen". Alexandre ne s'est pas pour autant éloigné beaucoup de sa passion de gosse, "je suis devenu éducateur sportif, pour les plus petits, et je me suis remis à la danse". Assurément c'était plus sage.
Deux poumons greffés
La mucoviscidose est une de ces sales maladies qui vous handicape quand elle ne vous tue pas. Et pour laquelle la science reste encore impuissante. "Lorsque la maladie prend de plus en plus de place, c'est de nombreuses séances de kinésithérapie, c'est des hospitalisations régulières avec des cures d'antibiotiques par voie intraveineuse. Et moi ça allait même jusqu'à une alimentation par voie entérale la nuit".
La seule solution pour sortir de ce supplice sans fin, c'est la greffe d'organe. La maladie affecte également son pancréas, Alexandre dispose d'un médicament pour suppléer la faiblesse de son activité. "On m'a greffé deux poumons en juillet 2017. Après la greffe tout devait aller mieux". Mais la suite fut longue et pénible avant de respirer à nouveau. "L'année qui a suivi a été particulièrement difficile avec de nombreux épisodes de rejet de mon greffon. Maintenant ça fait trois ans que tout va bien".
Remercier le greffon
Plus de séances de kiné, plus d'antibiotiques par voie intraveineuse, seulement un rendez-vous avec le médecin tous les quatre mois et la prise d'un médicament antirejet. Alexandre respire et peut se relancer dans de nouveaux projets. "Pour moi c'est une nouvelle vie", on imagine bien cette renaissance.
Sportif, courageux autant qu'infatigable, Alexandre aime se dépasser. Se prouver qu'il peut faire des choses nouvelles. Des efforts à sa mesure bien sûr, mais des efforts quand même. Le marathon lui est apparu comme accessible.
"Je voulais communiquer sur la mucoviscidose et le don d'organe, j'avais effectué en 2014 un tour d'Europe en Renault 6 avec des amis, en 2019 j'ai traversé l'Atlantique à la voile. J'ai recherché une nouvelle aventure avec une dimension sportive et du dépassement de soi, être en solitaire tout seul dans sa tête. Et le marathon de Paris tombe la journée mondiale du don d'organes".
Un heureux hasard qui permet au jeune greffé de s'élancer pour sensibiliser au don d'organe. "C'est un don à la vie, ça me permet de remercier le corps médical, remercier le greffon et sa famille qui m'ont fait ce don anonyme".
Son chirurgien avec lui au départ
Alexandre court depuis neuf mois dans cette perspective. Il se fait encadrer par deux coachs pour ne pas faire d'erreur, ne pas se blesser. "Je n'y vas pas serein, parce que je n'ai jamais fait de marathon et je vais découvrir une part de moi que je ne connais, mais j'y vais en ayant mis toutes les chances de mon côté". À raison d'au moins trois entraînements par semaine et pratiquement 1 000 km parcourus, on mesure le sérieux qui anime Alexandre pour affronter les fameux 42,195 km.
Alexandre ne partira pas seul. Il sera entouré d'amis et de proches dans sa course. Plus un personnage, central, dans son retour à la vie. "C'est Antoine Mugniot, le chirurgien qui m'a greffé à Lænnec à Nantes. Pendant trois ans et demi après la greffe, on n'a pas eu de contact. Il m'a appelé il y a deux mois, pour m'annoncer qu'il avait dit à sa femme et à ses enfants qu'il allait courir le marathon de Paris, qu'il voulait le courir avec moi".
Un optimiste forcené
"J'ai fait six rejets la première année, je n'imaginais pas que trois ans après j'allais m'élancer pour le marathon de Paris avec une super capacité respiratoire". D'autres auraient baissé les bras, ou se seraient fachés après leur corps. Pas lui. "Il y avait un peu de rage un moment donné à me dire, mais moi je l'accepte ce greffon, et pourquoi mon corps n'en veut pas. Ça été un long cheminement".
Et Alexandre d'ajouter, alors qu'on souligne, admiratif, sa ténacité, "je ne suis pas quelqu'un d'extraordinaire, quelle que soit la pathologie, je veux montrer qu'on peut s'engager dans de nouvelles aventures. Ça va le faire je reste optimiste !" L'optimisme serait-il un remède à la maladie ? Avec lui, on peut le croire.
Alexandre Allain a mis des mots sur les maux de son histoire. Il a publié un livre en septembre 2021, récit de son parcours et intitulé "Un souffle d’espoir". Chez Hugo Publishing.