Nantes : ces magasins climatisés qui gardent leurs portes ouvertes

Chez vous, est-ce que vous laissez vos portes grandes ouvertes quand vous chauffez l'hiver ou quand vous mettez la clim' en marche l'été ? Non bien sûr ! Ce serait une aberration économique et écologique. Pourtant, de nombreux magasins continuent de pratiquer cette gabegie. Reportage à Nantes.

Jeudi 27 juin, 14h et 39° dans le centre-ville de Nantes.

C'est le deuxième jour des soldes, les vitrines affichent les rabais et les portes sont largement ouvertes sur des rayonnages bien garnis.

Le premier pas dans ce magasin de textile du quartier Decré donne la température, ici on climatise et on l'assume. 
 


La canicule ? On s'en satisfait. "On va vendre notre (collection) été ! se réjouit Sarah la gérante. Jusqu'à maintenant,  il ne faisait pas beau, les gens n'achetaient pas pour l'été, là ça va mieux marcher."

Pourquoi climatiser le magasin et laisser la porte grande ouverte ?

"Ça donne plus envie de rentrer ! nous répond-on avec enthousiasme. Et puis pour nous (l'équipe de vente) c'est plus confortable. On a un peu de chaleur qui rentre. Ce serait dur de rester en permanence sous la clim !"

Au fond du magasin notre thermomètre affiche 25.2°, soit plus de 13 degrés de moins qu'à l'extérieur. 
 

Près de 17 degrés de moins qu'à l'extérieur du magasin !


Quelques pas plus loin sous un soleil écrasant, toujours dans le quartier Decré :
 

Là, c'est une enseigne de déco. Les portes coulissantes sont ouvertes et le restent. Petit test avec notre thermomètre : 22.8° à l'intérieur, soit plus de 16 degrés de moins qu'à l'extérieur. La clim marche bien. Personne pour répondre à nos questions, ni ici, ni au siège parisien de l'enseigne.

De l'autre côté du Cours des 50 Otages, nous allons prendre la température d'un magasin de cosmétique.

Les portes sont ouvertes sur la rue d'Orléans mais la fraîcheur est moins agressive, plus agréable. Effectivement, le thermomètre affiche 30°. Seulement 9 degrés de moins qu'en pleine rue. C'est bien plus confortable, on n'a pas l'impression de changer de lattitude.
 

quand on ferme, le gens rentrent moins...


Ici donc, on semble un peu plus vigilant mais on garde les portes ouvertes quand même.

"L'hiver aussi on garde les portes ouvertes, nous dit très spontanément la gérante. On voit bien la différence quand on ferme, le gens rentrent moins !"

Démarche donc purement commerciale et tant pis pour la facture ou l'environnement. C'est une directive... de la direction.

Cette pratique n'est pas généralisée, loin de là. Dans cet autre magasin situé lui rue Boileau, on a choisi en cette période de canicule de garder la porte fermée et le niveau de climatisation est à 28°.

"Si on est un peu responsabilisé, on ferme la porte déclare Marie-Laure, la gérante. Sinon, on gaspille de l'électricité et c'est un gouffre ! Ici on utilise des sacs en papier recyclés pour faire la chasse au gaspillage. Garder les portes fermées par temps de canicule c'est logique." Et la direction régionale de cette enseigne de textile pour enfants semble soutenir cette démarche.

Même point de vue dans cette maroquinerie du square La Pérouse. Climatisation en marche mais porte fermée.

"Quand je mets la clim', je ferme, quand je mets le chauffage je ferme" déclare Christine la patronne des lieux.
 

 

Il y a quelques années, elle travaillait à côté pour un patron qui obligeait le personnel à garder les portes ouvertes quelle que soit la température extérieure. Maintenant qu'elle est chez elle, Christine adopte une attitude plus responsable et sans doute plus économique.
 

Jusqu'à 50% d'économies si on ferme les portes


A la Chambre de Commerce et d'Industrie de Nantes-Saint-Nazaire on ne s'intéresse pas vraiment à la question au motif, sans doute, que chacun est libre de refroidir la rue.

Sauf que la climatisation réchauffe la rue et la ville. Car les climatiseurs sont de sacrés réchauffeurs d'atmosphère. Une étude du CNRS et de Météo-France alerte d'ailleurs sur la question en prévoyant une hausse des températures en ville du fait des climatisations.

Et pourtant le sujet est connu des commerçants. 

Jérôme de  Coster est animateur transition énergétique et commerce à l'association "Plein centre" qui fédère 450 commerçants du centre-ville de Nantes. Il tente d'alerter les adhérents sur cette question :

"Le chauffage et l'éclairage sont des gros postes de dépense. On peut faire jusqu'à 50% d'économie quand on ferme la porte !"

A travers des ateliers, des mails ou des newsletters envoyés aux commerçants, Jérôme travaille à sensibiliser la profession en rappelant les bonnes pratiques. Mais il reconnaît que les grandes enseignes dépendantes de directives nationales sont les plus difficiles à convaincre.

Les indépendants eux n'ont pas les moyens de chauffer ou de climatiser en laissant leur porte ouverte.
 

On n'a aucun moyen de pression...
 

A Nantes Métropole, on y travaille aussi. Ne serait-ce qu'en finançant avec l'ADEME le poste de Jérôme de Coster.

Mais autant sur la question de l'éclairage, les maires peuvent par leur pouvoir de police contraindre les commerçants à appliquer la loi et à éteindre leurs vitrines la nuit, autant sur la question des portes qui restent ouvertes il n'y a pas de réglementation.

"Ça concerne principalement les grandes enseignes confirme Nathalie Lambert, chargée de l'accompagnement des entreprises sur la transition énergétique et écologique à Nantes Métropole. On n'a aucun moyen de pression là-dessus. On leur explique qu'elles (les enseignes) ont tout à intérêt à changer leurs pratiques si elles ne veulent pas être clouées au pilori par les associations environnementales."


Rappelons que le 15 mars dernier plus de 10 000 jeunes manifestaient pacifiquement dans le centre-ville de Nantes pour appeler les décideurs à prendre les orientations nécessaires pour sauver la planète.

Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité