Ils comparaissent devant le tribunal correctionnel d'Angers. 11 prévenus âgés de 20 à 39 devront répondre de trafic de résine de cannabis et de cocaïne. L'organisation utilisait des messageries cryptées pour écouler la marchandise.
Il est le cerveau d'une bande de dealers choletais. Ce jeudi matin, à l'audience, celui qui est à la barre a choisi la nonchalance. Il répond vaguement aux questions posées, hausse les sourcils, soupire. Pour peu, il se demanderait presque ce qu'il fait là. Lui, c'est Johan B. Le chef d'un vaste trafic de stupéfiants, le Pablo Escobar des Mauges.
Résine de cannabis, cocaïne, le réseau aurait écoulé plus d'une tonne et demie de produits.
Le "Zanzi Shop", la marque de l'organisation, œuvrait sur les messageries cryptées comme Signal ou Telegram.
C'est un dossier assez particulier, il y a une forte utilisation des réseaux sociaux. Nous sommes en zone périphérique, en milieu rural au cœur des Mauges, ça change du deal urbain
Olivier RollandAvocat de deux prévenus
1,5 tonne de marchandise, l'équivalent d'1,2 million d'euros
Pour attirer un maximum de clients, la plateforme ne se refusait rien. Publicités, promos, envoi de goodies, tout était bon pour engranger un maximum.
L'enquête a duré plus d'un an, de janvier 2023 à avril 2024, date de l'interpellation des membres du clan. Du grand banditisme à la campagne, tous sont originaires de May-sur-Evre dans les Mauges. Pas franchement un quartier chaud. Ils ont pourtant fait de ce village un véritable plaque tournante. 1,5 tonne de drogue a été écoulée pour un montant évalué à 1,2 million d'euros.
"Une véritable entreprise"
Pour la procureure, "une véritable entreprise" était organisée autour des petites mains, les livreurs et les nourrices, des comptables, des dépanneurs, du cerveau. Si les dealers du bas de l'échelle ont tous reconnu les faits, le boss et ses deux adjoints, eux, ont eu plus de mal à admettre quoi que ce soit. Ils se sont courageusement renvoyés la balle, une fois appelés à la barre.
"Ça se joue aussi sur la personnalité de chacun. Dans le box des prévenus, beaucoup n'ont pas de casier judiciaire et c'est assez rare pour être souligné alors que l'on est sur des sommes et des quantités de produits importants", précise Olivier Rolland, avocat de la défense.
Ils se fournissaient à Mantes, la ville en région parisienne, et arrosaient toute la région des Pays de Loire et bien au-delà. Jusqu'à 120 kilos pouvaient être vendus en seulement trois semaines. Une activité extrêmement lucrative. Et pour certains, des trains de vie de millionnaires avec voitures de luxe, voyages, hôtels 5 étoiles. "Pour certains sans aucun doute, c'est un choix de vie, pour d'autres non. Dans le monde des stupéfiants, il y a les dettes, le consommateur qui en participant au trafic peut payer ses propres doses."
De 12 mois avec sursis à 6 ans ferme
La procureure a plaidé la relaxe pour un des prévenus et de 12 mois avec sursis à un an de prison ferme pour les autres. Quant à ceux qui ont été identifiés comme les chefs du réseau, ce sont 4 à 6 ans fermes qui ont été requis.
Des interdictions de séjour dans le Maine-et-Loire pendant 2 ou 3 ans ont par ailleurs été demandées. "Mes deux clients ont intégré le système depuis peu de temps. Ils sont interchangeables, ils ont colmaté les brèches. L'enquête d'ailleurs parle de remplaçants. Ils acceptent le principe de culpabilité et la peine qui va aller avec. Les réquisitions sont lourdes, mais elles sont ce que l'on pouvait attendre du ministère public", conclut l'avocat de la défense. "
Il ne faut pas exagérer, ce n'était pas un hypermarché de la drogue, mais un drive de campagne
Olivier Rolland, avocat de la défense
Dans sa plaidoirie, Naïri Zadourian, avocate de la tête de réseau, a justifié le train de vie de son client "par l'excellent chiffre d'affaires de l'entreprise de son père".
Un seul des prévenus s'est exprimé en fin d'audience, "je regrette mes bêtises", a-t-il déclaré.
Voilà qui pourrait mettre fin à une belle amitié, les membres du gang rural se connaissent depuis toujours, ils ont grandi ensemble avant de monter leur très juteux business.
Johan B. ne pourra pas, comme il l'avait fait entendre, "reprendre l'entreprise paternelle". Il écope de 6 ans de prison dont une avec sursis. Ses deux bras droits sont respectivement condamnés à 4 et 3 ans fermes.
Pour le reste de la bande, les peines prononcées vont du sursis à un an de détention.
Un des protagonistes bénéficie d'un aménagement avec bracelet électronique pendant 15 mois. Seul un des prévenus est relaxé.
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