Climat. Nos assiettes en 2050, sale temps pour les choux, la filière maraîchère face aux défis climatiques

La COP 28 bat son plein, mais quel avenir pour les légumes de nos régions ? Alors que les conditions climatiques sont de moins en moins propices à la culture de certains légumes, les maraîchers cherchent des solutions pour des jours meilleurs.

De quoi sera faite notre assiette en 2050 ? Alors qu'à Dubaï, les délégués de 198 pays doivent dresser le bilan des engagements pris à Paris en 2015, en Pays de la Loire, les maraîchers s'interrogent sur leur avenir.

De la Vendée à la Mayenne, certains légumes phares sont déjà menacés par les changements climatiques. C'est le cas de toute la famille des Brassicacées (choux, brocolis, kale, radis), ces légumes ont besoin de températures douces et de précipitations abondantes, ce qui est de plus en plus rare. 

Un avenir incertain 

À Saint-Georges-sur-Layon (Maine-et-Loire), Gérard Bernier est maraîcher depuis 35 ans. Quant à son futur, il a du mal à se projeter, "c'est difficile d'anticiper au-delà d'une ou deux années. Pour l'instant, les années 2050 ne sont pas très réjouissantes."

Le métier de maraîcher a toujours été dicté par les saisons et la météo. Mais, ces dernières années, une météo imprévisible s'est installée. D'une année sur l'autre, températures, précipitations et orages peuvent énormément varier.

Les maraîchers de la région rencontrent des difficultés dans leur production due à un réchauffement climatique général : augmentation des températures et déficit de précipitation, surtout sur la période estivale. Mais ils doivent également faire face à un changement climatique à géométrie variable. 

Le changement climatique n'est pas linéaire. Tous les ans, pour des raisons toujours différentes, on rencontre de nouvelles difficultés

Gérard Bernier

Maraîcher bio, Saint-George-sur-Layon

Pour s'adapter au mieux, Gérard Bernier mise sur plusieurs stratégies. Il produit une quarantaine de légumes différents, stocke sa propre eau de pluie en hiver, installe des haies et évite les cultures sensibles.

"Pour éviter de prendre trop de risques, on a arrêté 80 à 90 % de notre production de Brassicacées (choux, radis, etc)" estime le maraîcher. 

En 2050, 20 à 30 % de ce que l'on produit aujourd'hui va disparaître

Gérard Bernier

Maraîcher bio, Saint-George-sur-Layon

Salades et choux sont de plus en plus difficiles à produire, et risquent à terme de ne plus se retrouver sur les étals de la région. Céleri-rave, oignons, petits pois et brocolis sont aussi en danger. Pour cause : des températures élevées et un manque de précipitation en été. 

A contrario, certains légumes commencent à s'implanter dans la région. C'est le cas de la fameuse patate douce, devenue ces dix dernières années un incontournable de nos assiettes.

Gérard Bernier, produit quant à lui déjà des tomates, aubergines et poivrons sous serre dans le Maine-et-Loire. "En Vendée, il y a même des maraîchers qui plantent ces légumes en pleine terre. Aujourd'hui, ces productions sont plus adaptées" remarque le maraîcher. 

Un nouveau calendrier

De nouveaux légumes, et un nouveau calendrier. Si les changements climatiques ne sont pas toujours prévisibles, de nouvelles tendances apparaissent dans la profession. 

"Ces dernières années, on observe deux saisons de culture estivales" analyse Louis Amiot, doctorant en climatologie. "Le printemps, avec des cultures qui commencent beaucoup plus tôt, et l'automne qui dure beaucoup plus longtemps" ajoute le chercheur. 

Le calendrier de production des maraîchers s'étend à mesure que les températures se réchauffent. Mais plusieurs problèmes viennent se greffer à ce phénomène.

S'il est possible de produire plus tôt et plus tard, encore faut-il qu'il y ait assez d'eau. Les mois les plus chauds bloquent les productions durant la période estivale et, à l’automne, il ne reste pas assez d'eau pour reprendre les cultures.

L'été, les maraîchers ont besoin de produire quelque chose

Louis Amiot

Doctorant en climatologie à l'Université Rennes 2

Or, les solutions pour lutter contre la sécheresse sont assez limitées. Les arrêtés de restriction d'eau viennent compliquer le travail des producteurs et la viabilité des cultures.

"Les producteurs peuvent éviter les cultures sensibles, mais c'est compliqué pour eux. Ils se sont créé un marché autour de leurs productions, ils ne peuvent pas en changer du jour au lendemain" rappelle Louis Amiot.

Pour le jeune chercheur, plusieurs stratégies sont envisageables pour faire face à la sécheresse. Il est possible d'installer des voiles à un mètre au-dessus des cultures, comme en Espagne, pour apporter un peu de fraîcheur et éviter les rayons du soleil.

"On peut également changer les sols, soit trouver des parcelles plus argileuses qui ont besoin de moins d'eau, soit apporter des matières organiques qui vont mieux retenir l'humidité" propose le doctorant. Il ajoute, "une autre possibilité est d'arroser un peu moins les cultures pour que les racines aillent plus loin dans les sols et soient plus résistantes."

Un métier d'adaptation

L'avenir des maraîchers se dessine dès aujourd'hui avec un décalage des récoltes et des cultures beaucoup plus courtes.

"Pour produire toute l'année, les maraîchers peuvent jouer sur plusieurs leviers : irrigation, sols, calendrier et variété" résume Maelle Depriest, conseillère en productions légumières à la Chambre d'agriculture des Pays de la Loire.

Le maraîchage est un métier d'adaptation, mais pour l'instant l'avenir est encore un vaste champ d'exploration

Maelle Depriest

Conseillère en production légumière à la Chambre d'agriculture des Pays de la Loire

Au-delà des pratiques agronomiques, la formation des maraîchers et des conseillers spécialisés est aussi une manière de prévenir les changements climatiques.

"Il faut qu'il y ait un échange possible entre les maraîchers, c'est aussi le point fort des formations, de mettre en contact les professionnels" précise Maelle Depriest.

"Mais il faut également que les conseillers soient formés pour pouvoir accompagner les maraîchers, ajoute-t-elle, le dialogue entre maraîchers est important, mais il faut aussi un accompagnement individuel." Car chaque maraîcher, et chaque production, est unique. Les solutions sont donc, elles aussi, singulières.

Quelle météo dans 27 ans ? Grâce à des projections scientifiques basées sur l'ensemble de l'historique des relevés de Météo France (plus de 110 ans de données) et sur le travail des scientifiques du GIEC, il est possible de consulter la météo de 2050 dans sa préfecture.

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