DOSSIER. Maraîchage : un an après l'interdiction du metham sodium

C’est l’un produits phares de l’hiver : la mâche. 85% de la production nationale se fait en Pays de la Loire. Le secteur fait pourtant grise mine. En novembre 2018, l’interdiction du métham sodium, un pesticide utilisé par les maraîchers, a été difficile à encaisser. 

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Le 9 octobre 2018, une soixantaine de personnes sont intoxiquées par un pesticide à Brain-sur-l'Authion, dans le Maine-et-Loire. 17 d'entre elles sont hospitalisées.

Trois jours plus tard, une nouvelle intoxication a lieu à Mazé-Milon, commune située à une quinzaine de kilomètres de Brain-sur-l'Authion.

Très vite soupçonné, un produit phytosanitaire à base de metham sodium utilisé par un maraîcher.

Initialement autorisé jusqu’en 2022, l’usage de ce produit est finalement interdit le 5 Novembre 2018 par l’Anses, agence nationale de sécurité sanitaire car jugé dangereux pour la santé et l’environnement. 

Un an après, où en est-on ?

Un an après, les habitants des environs ne sont pas totalement rassurés quant aux pratiques des maraîchers voisins.

"On ne sait pas ce qu’ils utilisent comme produits, on est quasiment sûr qu’ils en utilisent d’autres’’ nous dit Stéphanie, qui habite Brain-sur-l'Authion, la commune où tout a commencé.Une promesse de désherbage manuel leur a été faite mais celle-ci ne semble pas être tenue. "On imagine assez mal toutes ces surfaces désherbées manuellement, sinon on verrait du monde, ça nécessite un peu de main d’œuvre"
Avec Christian, Michel et Eric, Stéphanie a monté un collectif pour savoir quels pesticides sont utilisés sur leur commune. Mais, selon eux, difficile de dialoguer avec les intéressés.

"Nous discutons avec eux, ça avance tranquillement (…) On est professionnel, on fait notre métier", nous répond brièvement par téléphone un maraicher.

Un bref échange dans un climat de tensions exacerbées depuis le retrait du marché du métham sodium.
 

Quelles alternatives ?

Fin 2018, les tracteurs sont à l'arrêt, leurs cuves, encore pleines d'herbicide. Très vite, les mauvaises herbes prolifèrent.

"On le vit comme un retour en arrière. C'était l'assurance pour nous d'avoir beaucoup moins d'herbe" nous expliquait à l'époque Bertrand Redureau, producteur de mâche.

A l'époque, les maraîchers tentent de trouver des méthodes alternatives comme le désherbage à la vapeur. Des techniques plus coûteuses.

Les maraîchers nantais prévoient une chute de leurs rendements : 30 à 40% en moins et donc une hausse des prix pour compenser.

Un an après, nous faisons le calcul à partir du cours de la salade. Octobre 2018, le kg de mâche nantais se vend 3,79 euros, octobre 2019, il passe à 4,08 centimes. Seulement, 29 centimes de plus.
Les rendements ont-ils réellemment chuté ? Les producteurs absorbent-ils cette hausse ? Impossible de faire toute la lumière plus d'un an après. Trop tôt, selon eux.

"Nous préférons attendre le printemps prochain, nous aurons passé un hiver sans metham et nous pourrons faire le bilan", nous répond l'un d'eux via Messenger

Aucune réponse sur la rentabilité sans metham sodium. Alors pour être sûrs qu'on ne nous raconte pas de salades, nous sommes allés à l'assemblée générale de la fédération des maraîchers Nantais, peu enclins à parler jusque là.

"Quand le metham a été suspendu (en novembre 2018, NDLR), un certain nombre de traitements avait déjà été effectués puisque le gros des traitements c'est à l'hiver", précise Antoine Thiberge, directeur des maraîchers nantais, "On a pu en partie bénéficier des effets du metham sodium sur la campagne écoulée et c'est sur la nouvelle campagne qu'on va mesurer les effets pleins parce que là, on se débrouille avec ce que l'on a".

Conclusion : les maraîchers assurent travailler sur de nouvelles méthodes, sans plus de précisions.
 

350 contrôles d'exploitations en Pays de la Loire

Le metham sodium pourrait-il être encore utilisé ?  Au Ministère de l'agriculture, les réponses ne sont pas beaucoup plus longues. 

En 2019, les autorités auraient procédé à 350 contrôles d'exploitations en Pays de la Loire, idem en Bretagne, mais aucune vérification spécifique liée au metham sodium.

Les associations écologistes peinent aussi à en savoir plus, malgré la plainte déposée après l'affaire des intoxications.

Selon Xavier Metay, de France Nature Environnement Pays de la Loire, le parquet d'Angers, un temps encourageant, tarde à traiter l'affaire. Une lenteur bénéfique pour certains.

"Ces questions gênent les acteurs et gênent, aussi les maraîchers nantais qui, en terme d'image, de notoriété, se basent sur : Nous produisons propre, n'hésitez pas à manger nos produits", explique-t-il, "ça a été un peu abîmé comme image".

On imagine bien que le lobby agroalimentaire fait en sorte qu'on oublie cet incident - Xavier Metay, France Nature Environnement Pays de la Loire

Aujourd'hui, le metham sodium est formellement interdit et n'est donc, à priori, plus appliqué sur les parcelles. Alors quels autres pesticides ou quelles techniques les producteurs de mâches utilisent-ils ? Pas de réponse formelle, ni de la filière, ni des autorités.

Un flou qui entretient la crainte de nombreux citoyens.

► Le reportage de notre rédaction
 
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