Les Ponts-de-Cé, une commune, près d'Angers, est la première commune du Maine-et-Loire à devenir "ambassadrice du don d'organes". Des panneaux seront installés aux entrées de ville. Ce samedi 19 octobre, greffés et familles de donneurs se sont réunis autour d'un même message : le don il faut en parler, car il sauve des vies.
Bientôt, la ville des Ponts-de-Cé, qui jouxte Angers, affichera sur ses panneaux d'entrée son engagement pour le don d'organes et de tissus humains. L'équipe municipale a décidé que la commune entrerait dans le réseau "VADO", Villes Ambassadrices du Don d'Organes.
"Une façon d’inciter les passants à réfléchir sur le sujet, mais également d’afficher leur solidarité et agir pour la santé", expose la page du site de l'agence de biomédecine consacrée à cette initiative. Ce qui impliquera pour la commune des Ponts-de-Cé de faire la promotion du don d'organes dans ses établissements scolaires, ses services municipaux et lors de la journée nationale du don d'organes, chaque 28 juin.
Créé en 2023, le réseau VADO compte déjà 200 communes ambassadrices.
"On voyait que mes poumons se détruisaient, mais on ne savait pas pourquoi"
Ce samedi 19 octobre, greffés, familles de donneurs et praticiens hospitaliers engagés dans ce type de soins, s'étaient donnés rendez-vous dans une salle des Ponts-de-Cé pour dire l'importance du don d'organes et de tissus humains.
Julien Sinan, greffé des deux poumons, étaient là pour témoigner. Ce jeune homme de 24 ans a développé une détresse respiratoire suite à la prise d'un antibiotique. C'était lors de la crise sanitaire du Covid-19.
"Petit à petit, ça m'a conduit à être plongé dans le coma, raconte Julien qui était alors hospitalisé à l'hôpital de Cholet. J'ai été transféré à l'hôpital d'Angers où j'ai passé trois semaines et demi de coma."
Ce fut une période particulièrement difficile pour ses parents qui n'avaient pas beaucoup d'informations sur ce dont souffrait leur fils Julien.
"On voyait que mes poumons se détruisaient, mais on ne savait pas pourquoi, poursuit Julien. Les médecins ont annoncé à mes parents qu'il fallait une greffe parce qu'il n'y avait que ça qui pouvait me sauver."
Inscrit sur la liste des super urgences 1
Le jeune homme est alors inscrit sur la liste des super urgences pour les greffes et Julien est transféré à l'hôpital Foch de Suresnes, en région parisienne. Pour les parents, cette annonce qui confirme l'extrême gravité des symptômes est un nouveau coup dur.
Ils signent l'autorisation de greffe et, très vite, un greffon arrive.
"Comme dit ma mère, avoue Julien, dans notre malheur, on a eu beaucoup de chance. Mes parents ont signé les papiers à 17h. Le lendemain dans la nuit, ils ont trouvé les greffons."
S'ensuivra une opération de plus de six heures. Le jeune Julien est placé en réanimation. La greffe a bien pris.
"C'est une renaissance"
"J'ai mis deux ans avant de reprendre le sport", précise tout de même Julien qui parle d'une seconde chance. "C'est une renaissance", dit Julien qui tient à remercier le donneur "qui, malheureusement, n'est plus là aujourd'hui."
Plus largement, Julien veut remercier les familles de donneurs, car ce sont souvent les proches qui donnent, ou non, leur accord.
"Je ne vois pas pourquoi il aurait gardé ses organes"
Marie-Thérèse Coquerie, elle, est de l'autre côté de l'histoire. Il y a une trentaine d'années, son mari a été victime d'un grave accident de voiture. Lorsqu'elle est allée le voir à l'hôpital, il était inconscient et sous assistance respiratoire. De retour chez elle, Marie-Thérèse reçoit un appel de l'équipe médicale qui dit vouloir lui parler.
"Je suis revenue, se souvient Marie-Thérèse. Mon mari était comme lorsque je l'avais quitté la première fois. Ils m'ont dit qu'il était en état de mort cérébrale. Ils voulaient savoir si on avait parlé du don d'organes."
Pour Marie-Thérèse, la question, en fait, ne se posait pas. Son mari était une personne généreuse.
"Je ne vois pas pourquoi il aurait gardé ses organes alors qu'ils pouvaient sauver d'autres personnes", dit simplement Marie-Thérèse qui reconnait aussi que le fait d'avoir évoqué cette possibilité dans des conversations avec son mari a permis de répondre sans hésiter à la sollicitation de l'équipe médicale. Plusieurs organes ont pu être prélevés.
Un enfant et quatre adultes greffés
"On peut savoir combien d'organes ont été greffés, explique Marie-Thérèse. Un enfant a reçu son foie, mais il était trop fragile cet enfant et il n'a pas pu survivre. Celui qui a reçu le cœur a pu vivre 11 ans de plus. Une personne qui a reçu un rein a vécu 18 ans de plus. Le receveur de l'autre rein était toujours vivant en 2018 (soit plus de 20 ans après la greffe)."
Marie-Thérèse Coquerie est, depuis, membre de l'association pour le don d'organes et de tissus humains. "C'est important de dire oui", dit-elle.
Il faudrait plus de 20 000 donneurs par an
On le répète souvent, mais, en France, on manque de donneurs d'organes. Les besoins nécessiteraient plus de 20 000 donneurs par an, mais il y en a moins de 6000 ! Le taux d'opposition au don d'organes a même augmenté depuis la crise sanitaire du Covid-19. 36 % des personnes interrogées disent s'opposer à ce geste pourtant susceptible de sauver une vie humaine.
"Objectivement, quand on fait des sondages, les gens ne sont pas opposés. Pour la très grande majorité, ils sont favorables à donner leurs organes, explique Aurore Armand qui est médecin de la coordination des prélèvements d'organes et de tissus humains au CHU d'Angers. Mais quand on interroge leur entourage, on arrive à ce fameux chiffre de 36% qui est extrêmement important."
D'où l'importance, rappelle Aurore Armand, de se positionner et de dire à son entourage que l'on est donneur d'organes et de tissus humains.
►Le reportage de Céline Dupeyrat, Klervie Gouiffes et Christophe Person.
Un exemple étonnant et un peu hors normes, il faut l'avouer, du succès des greffes : celui d'Alexandre Alain. Ce sarthois de 28 ans souffre de la mucoviscidose et est greffé des deux poumons. Depuis, il ne cesse de repousser ses limites. Il vient de participer au marathon des sables dans le désert marocain. 105 kilomètres. "Qu'est-ce qu'elle est bonne cette putain de vie !" dit celui qui a été sauvé par un donneur d'organes.
►Le reportage de Maya Larguet et L. Feuillebois sur Alexandre Alain.
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