Le scandale des respirateurs Philips commercialisés en France est loin de s'éteindre. Faute d'avoir remplacé l'ensemble des appareils défectueux, l'Agence du médicament a saisi le procureur de la République. 500 patients ont saisi un avocat. Certains plaignants vivent en Maine-et-Loire.
Souffrant d'apnée du sommeil depuis plusieurs années, Muriel Le Gall, une habitante d'Angers utilise quotidiennement un respirateur, en l'occurrence celui de la marque Philips. En février 2022, elle reçoit un courrier l'informant que son appareil devra être changé, en raison d'un problème avec la mousse insonorisante présente dans ces dispositifs médicaux.
Avec le temps, cette mousse en polyuréthane se dégrade et libère des particules fines. Leur inhalation peut provoquer de nombreux effets indésirables, comme des irritations, des maux de tête, des vomissements. Le risque de cancer ne serait pas avéré, mais les études se poursuivent.
Son appareil a bien été remplacé, mais aujourd'hui la quinquagénaire porte plainte contre la société néerlandaise et demande un dédommagement. "Ils auraient pu nous le dire avant ! puisqu'ils savaient depuis 2021", s'insurge Muriel Le Gall.
Le rappel des faits
En juin 2021, sous la pression d’usagers américains, Philips rappelle 5,3 millions de respirateurs à travers le monde, dont 382 000 sont enregistrés en France.
En février 2022, en raison du non-respect de ses engagements, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) exige, dans une décision de police sanitaire, le remplacement de l'ensemble de ces appareils d'ici à fin 2022.
Le 18 novembre 2022, Franceinfo publie une enquête sur le sujet. Selon un collectif d’avocats, "Philips et certains de ses sous-traitants américains ont eu connaissance d’un problème grave concernant la mousse en polyuréthane utilisée dans ces respirateurs bien avant le rappel de leurs produits, sans en informer ni les autorités sanitaires concernées ni les usagers de respirateurs à travers le monde", relatent les journalistes de Franceinfo.
Selon le bilan publié par l'ANSM, au 31 mars 2023, Philips n'a toujours pas respecté ses engagements : " 99 % des appareils pression positive continue défectueux (PPC) et 78 % des ventilateurs non support de vie destinés au remplacement des appareils défectueux. En revanche, seul 8% des ventilateurs support de vie ont été livrés aux prestataires de soins à domicile (PSAD) par la société Philips."
"Par conséquent, nous avons mis en demeure la société Philips pour qu’elle mobilise, sans délai, la totalité des moyens à sa disposition afin de procéder au remplacement, au besoin à ses frais, des appareils défectueux restants", précise l'ANSM. L'agence du médicament a également saisi le procureur de la République au titre de l’article 40 du code de procédure pénal.
Plus de 500 patients ont saisi un avocat
"Aujourd'hui, on va être aidé par le fait que l’agence du médicament, à l’issue d’une enquête qui a recueilli plus de 3 000 plaintes est elle-même convaincue qu’il existe des indices graves concordant de mise en danger", assure Me Bertrand Salquain, avocat de Muriel Le Gall. L’agence nationale du médicament américaine avait interdit à la société Philips América de continuer à commercialiser ces appareils avec cette nouvelle mousse.
Plutôt que d’appliquer cette préconisation au monde entier, on a le sentiment, l’enquête le déterminera, que Philips a écoulé en Europe et sur d’autres continents vraisemblablement, les appareils qu’elle ne pouvait pas écouler sur le marché américain.
Bertrand SalquainAvocat
En Europe, Philips s'enfonce toujours plus dans la tourmente. La justice italienne a même condamné le groupe pour le non-remplacement de ces respirateurs défectueux.