Comme tous les vignobles de France, le Val de Loire n'est pas épargné par le changement climatique. Mais à Montreuil-Bellay dans le Maine-et-Loire, on prépare l'avenir sur des parcelles expérimentales, suivies par les techniciens de l'institut français de la vigne et du vin. Les variétés de raisin récoltées ici ont toutes été sélectionnées pour résister aux maladies ou s'adapter aux caprices de la météo.
Sur cette petite parcelle à Montreuil-Bellay dans le Maine-et-Loire, il faut un oeil expert pour déceler la dizaine de variétés différentes. Quelques caisses suffisent pour finaliser la récolte. Autant dire que la moindre grappe compte...
"18, 95", entend-on derrière un rang de feuille bien verte. "Il compte toutes les grappes qu'il ramasse, moi je les note et on pèse aussi. En fait, cela permet de faire des estimations de rendement", explique Virginie Grondain, technicienne matériel végétal de l'institut français de la vigne et du vin.
Dans ces rangs, l'expérimentation porte sur des raisins résistants aux maladies fréquentes de la vigne, le mildiou et l'oïdium. Obtenues à partir de croisements, ces variétés font l'objet d'une observation au long cours.
15 à 20 ans de recherche
"De l'hybridation de ces variétés jusqu'à l'inscription au catalogue, on a 15 à 20 années de recherche et sur la dizaine de variétés présentes sur cette parcelle, on va pouvoir proposer à l'inscription au catalogue français certaines variétés", explique Esteban Fortin, responsable domaine expérimental IFV.
Sur ces 12 hectares, la recherche se concentre aussi sur un cépage plus résistant aux fortes chaleurs : le Chenin. Ici, pas moins de 500 déclinaisons de cette variété ont été plantées.
"On va avoir des Chenins avec des petites grappes, avec des grosses grappes. On va avoir des Chenins plus ou moins acides, plus ou moins riches en sucre. Ici, c'est vraiment un conservatoire", raconte Étienne Goulet, directeur régional Institut français de la vigne et du vin.
On a une diversité génétique et là on va aller puiser dedans pour pouvoir s'adapter au changement climatique en choisissant les Chenins les plus adaptés pour la viticulture de demain.
Étienne GouletDirecteur régional Institut français de la vigne et du vin
En 30 ans, 3,5 degrés de plus
Comme pour n'importe quelle autre vendange, les techniciens procèdent ensuite à la vinification de chacune de leurs récoltes. Commencent alors les relevés et analyses. On contrôle notamment l'acidité et la quantité de sucre. Des composantes caractéristiques du vin, impactées par le changement climatique.
Depuis 30 ans qu'on mesure l'élévation de température, on a pris 3 degrés en Val de Loire et la vigne produit de plus en plus de sucre. Des quantités trop importantes qui donne trop d'alcool dans les vins
Philippe ChrétienIngénieur oenologue IFV
"Au niveau oenologique on intervient soit en enlevant des sucres soit en enlevant de l'alcool sur les vins", poursuit Philippe Chrétien.
Les données météorologiques et scientifiques croisées avec les informations du terroir permettent même désormais de réaliser des projections pour les prochaines décennies.
"On va gagner un peu plus d'un mois années dans la maturité du Chenin. Des vendanges qui se faisaient fin septembre dans les années 90-2000 se feront fin août voire mi-août dans les années 2100", conclut Etienne Goulet.
Les scénarios de ce futur proche seront bientôt consultables dans un atlas disponible sur internet. Un outil pour aider les viticulteurs du Val de Loire à se préparer aux évolutions de la vigne dans les années à venir.