Artiste japonaise, Makiko Furuichi vit à Nantes depuis 10 ans où elle a étudié à l'école des beaux-arts. La jeune femme est actuellement en création dans les caves d'Ackerman, spécialiste du crémant de Loire à Saumur. Du Lascaux aux influences orientales.
Accroupie sur le sol, Makiko fouette dans un bac ses mélanges de peinture faites de chaux et de pigments. On n'en saura pas plus : elle tient à ce que reste secrète la recette héritée de Fabrice, un ami.
Pas facile de peindre sur une pierre aussi tendre que le tuffeau. Les fissures laissées par ceux qui ont creusé la roche sont des pistes qu'utilise Makiko pour créer. "Je peins avec l'âme des gens qui ont creusé ici, dit-elle. Je dessine des yokais, des créatures imaginées par les humain, des créatures surnaturelles dans le folklore japonais."
Il arrive aussi qu'elle se laisse influencer par les couleurs qu'elle trouve sur place, comme le vert de la mousse qui teinte la pierre à certains endroits.
"Ça me fait rêver, sourit Makiko dont le plaisir à travailler dans ces grottes est visible. C'est comme si je voyageais dans le temps et que j'arrivais il y a mille ans en arrière, voire même beaucoup plus. C'est la première fois que je travaille dans un endroit aussi grand. Pour prendre du recul, je descends de l'échaffaudage."
Ce que Makiko attend du public dans ces anciennes carrières de tuffeau, c'est qu'il prenne le temps de regarder ses peintures rupestres et de laisser courir son imagination. À chacun de voir une tête, des mains ou une créature, selon ce que sa propre imagination construira. Des miroirs viendront ensuite bouleverser les dimensions des caves et mettre en abyme le visiteur contemplant les œuvres.
De la musique électro japonaise dans les oreilles
Voilà plus d'un mois déjà que Makiko tamponne les parois des caves Ackerman, seule, dans une pénombre qu'éclairent quelques projecteurs. L'artiste vit au quotidien ce confinement créatif avec, dans ses oreillettes, la musique de Miharu Koshi, une compositrice et chanteuse japonais des années 1980. On est loin de la musique zen que l'occidental voudrait coller à une telle scène. Ce serait plutôt de l'électro.
Mais Makiko aime ça. Cela doit sans doute lui donner de l'énergie pour brandir la longue perche au bout de laquelle le pinceau dépose les couleurs sur le tuffeau.
"Le caves de la maison Ackerman accueillent régulièrement des artistes depuis 2007. Et depuis 2015, dans le cadre d'une résidence d'artiste Ackerman-Fontevraud, explique Julien Goudeau, responsable des relations publiques de la maison saumuroise spécialisée dans les vins à bulles. Les galeries permettent aux artistes de s'exprimer avec, à chaque fois, une œuvre sur mesure proposée par l'artiste lauréat et cette œuvre va rester trois années."
Septième artiste en résidence
Makiko Furuichi est la septième artiste accueillie ainsi dans ces caves. Chaque année, la maison Ackerman, le centre culturel de l'abbaye royale de Fontevraud (où l'artiste est hébergé le temps de sa création) et un jury composé de professionnels du monde l'art désigne le lauréat. Actuellement, la plasticienne Audrey Guimard et le peintre Julien Colombier y sont exposés avec Heterotopia, sur le thème du végétal. Une autre plasticienne, Severine Hubard est aussi présente avec La salle des colonnes. Enfin les frères Chapuisat, artistes suisses, y ont investi un puits de lumière.
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Makiko Furuichi doit terminer sa création fin mars-début avril. Mais l'ouverture au public reste dépendante des mesures sanitaires.