L'amendement transpartisan visant à encadrer l'installation des médecins a été rejeté ce mercredi par l'Assemblée nationale. Ce texte, déposé par le député socialiste mayennais Guillaume Garot, obligerait les médecins libéraux à s'installer dans les territoires les moins bien dotés afin de lutter contre les déserts médicaux. Un amendement, qui selon la profession médicale, ne ferait que dégrader l'offre de soins.
Faut-il réguler l'installation des médecins face à l'urgence de la désertification médicale ? Par 168 voix contre 127, l'Assemblée nationale a rejeté, ce mercredi, l'amendement transpartisan porté par le député socialiste de la Mayenne Guillaume Garot, qui parle de "déception", mais estime que l'idée de régulation fait son chemin.
Cet amendement n'était pas soutenu par le gouvernement et dès l'ouverture des débats, lundi, le ministre de la santé, François Braun, a balayé d'un revers de main une mesure qu'il juge "coercitive" et qui risquait de stigmatiser les médecins, entraînant des refus d'installations et des déconventionnements massifs. "Le vrai problème, c'est le manque de soignants. Réguler l'installation des médecins est une fausse bonne idée qui risquerait de dégrader plus encore l'accès aux soins".
Une mesure jugée coercitive
Un avis que partage une majorité de médecins libéraux, farouchement opposés à cette proposition, comme l'explique le docteur Luc Duquesnel, président des généralistes de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) : "Aujourd'hui, à cause de tous ces amendements, il y a de plus en plus d'internes en médecine générale qui décident de se réorienter vers une autre spécialité médicale. Ca veut dire que tous ces étudiants-là, dans quelques années, ne seront pas des médecins généralistes alors qu'ils voulaient le devenir et qu'on en a besoin".
La moitié des médecins a plus de 60 ans et les étudiants en médecine libérale se réorientent vers d'autres spécialités
Luc DuquesnelPrésident des généralistes de la Confédération des syndicats médicaux français
Et selon le médecin, la multiplication de ces amendements inciterait les généralistes en âge de partir à la retraite à ne plus "faire de rab", en cumulant emploi et retraite, et de partir dès l'âge de 60 ans. "Ce serait un raz-de-marée... Aujourd'hui, presque la moitié des médecins généralistes a plus de 60 ans, ça ferait un sacré vide ! D'autant plus que la relève n'est plus assurée. C'est une double peine", s'insurge Luc Duquesnel, qui estime, lui aussi, que ce texte aggraverait l'accès aux soins.
C'est pourtant bien l'idée de la régulation que prône le groupe transpartisan porté par le député socialiste Guillaume Garot face à l'urgence de la situation. "Nous n'avons pas gagné, mais nous n'avons pas vraiment perdu. L'idée de la régulation avance et pour preuve, il est soutenu par un groupe transpartisan d'une centaine de députés, de LFI à LR, assure le député socialiste Guillaume Garot, qui dénonce une interprétation "facile et déformée" de l'amendement, "loin d'être coercitif", en réponse au Ministre de la santé.
Notre santé ne peut pas dépendre de notre code postal !
Guillaume GarotDéputé socialiste de la Mayenne à l'initiative de l'amendement
"On oblige personne à s'installer ici où là, on dit simplement n'allez plus vous installer là où les besoins de santé sont déjà pourvus. Ce n'est pas exactement la même chose, l''idée n'est pas de nommer les médecins dans telle ou telle commune. La liberté d'installation est évidemment préservée, mais dans certains territoires, elle est soumise à autorisation de l'ARS", précise-t-il.
En attendant, statut quo sur la question de l'accès aux soins, qui préoccupe les Français, alors que les déserts médicaux grappillent chaque jour un peu plus de terrain, dans les villes comme dans les campagnes.