Alors qu'aucune n'annonce n'a été faite ce lundi soir à l'issue d'une réunion entre les syndicats majoritaires et le Premier ministre Gabriel Attal, les actions des agriculteurs se poursuivent. Ils réclament notamment un allégement des tâches administratives. "Une épée de Damoclès" que déplore le président de la FDSEA de la Mayenne Florent Renaudier.
Gabriel Attal avait déjà promis, ce samedi 20 janvier, de « faciliter la vie » des agriculteurs en réduisant les « paperasseries ». Mais au lendemain d'une réunion avec les principaux syndicats agricoles, aucune mesure concrète n'a été annoncée par le gouvernement.
"Une asphyxie administrative" dont ne veulent plus les agriculteurs, comme en témoigne Florent Renaudier, éleveur laitier et président de la FDSEA de la Mayenne. "La coupe est pleine, on en a marre de remplir des papiers en permanence. Ce sont des heures de travail en plus, qui se rajoutent à des journées déjà bien remplies".
Les tâches administratives représentent l'équivalent d'un mi-temps !
Florent RenaudierEleveur laitier et président de la FDSEA 53
Depuis plusieurs années déjà, les syndicats se mobilisent pour que le gouvernement allège cette lourdeur administrative. Encore dernièrement avec l'opération nationale "Panneaux renversés", à l'entrée des villes et des communes pour dénoncer symboliquement le quotidien des agriculteurs qui estiment aujourd'hui "marcher la tête à l'envers".
En novembre dernier aussi, les agriculteurs mayennais s'étaient mobilisés devant les grilles de la préfecture, où ils avaient fixé une bâche sur laquelle on pouvait lire : "Boulets aux pieds, agriculteurs en danger".
"C'est une image pour dire qu'aujourd'hui, les agriculteurs sont prisonniers d'un système économique agricole dont ils ne peuvent s'échapper. Ils sont pieds et poings liés...", regrette Florent Renaudier, éleveur laitier à Laubrières.
Il estime qu'aujourd'hui, le temps passé chaque année aux tâches administratives représente l'équivalent d'un mi-temps. "C'est à peine croyable, mais c'est pourtant vrai. Avec mon épouse, on a fait le calcul, pour se rendre compte exactement de la charge de travail que ça représentait. Je vous laisse imaginer...".
Comme nombre d'agriculteurs qui manifestent depuis plusieurs jours leur colère avec des actions de blocage, Florent Renaudier dénonce lui aussi la multiplication des règles économiques, environnementales, sociales et des normes administratives... une "Epée de Damoclès" qui les empêche, affirme-t-il, d'être compétitifs.
"Ce qu'on oublie souvent de dire, c'est que toutes ces normes qui arrivent de l'Europe sont souvent surtransposées de façon française, alors forcément, ça vous empêche d'être concurrentiels, c'est même l'inverse... C'est à ne plus rien y comprendre, mais on continue quand même à remplir les papiers !".
Le travail administratif est en train de nous bouffer tous les jours, il est même en train de prendre le pas sur notre cœur de métier : produire pour nourrir
Florent RenaudierEleveur laitier et président de la FDSEA 53
Autant de normes, de réglementations, d'exigences, qui font aujourd'hui du métier d'agriculteur, un véritable chef d'entreprise, avec de nombreuses responsabilités. À la différence près, que leur entreprise, elle, ne dépasse guère les trois ou quatre salariés.
Agriculteur, un métier couteau suisse
" On n'est pas des entreprises de 500 salariés où il y a un responsable qualité, un responsable environnement, un responsable traçabilité, un responsable sécurité au travail, un responsable des ressources humaines, un expert-comptable, un contrôleur de gestion, un service juridique, un service administratif, un chargé de maintenance... Aujourd'hui, on doit assumer toutes ces casquettes-là avec les mêmes exigences que des entreprises agroalimentaires, métallurgiques ou autres. Il faut vraiment l'aimer ce métier ".
Avec mon épouse, on s'est "amusé" à recenser tous les métiers qu'un agriculteur est amené à exercer, on est arrivé à une bonne vingtaine ! Une liste à la Prévert...
Florent RenaudierEleveur laitier et président de la FDSEA 53
Une polyvalence à toute épreuve qui n'est pas sans générer du stress. Parfois même, beaucoup de stress. "Il vaut mieux être à jour dans toutes ses formalités administratives et surtout bien se relire, car il y a parfois tellement de lignes à remplir qu'on a peur de se tromper. Et là, quand on se trompe, c'est reparti pour de nouvelles démarches ! Mais ce que les agriculteurs redoutent le plus, ce sont les contrôles, car même si on est très pointilleux, on n'est pas à l'abri d'une erreur et ça peut se transformer en cauchemar... C'est une épée de Damoclès".
Et pourtant, son métier, celui d'agriculteur, de paysan, Florent Renaudier ne l'échangerait pour rien au monde. Un métier qu'il aime comme il le défend. Son combat aujourd'hui, c'est de redorer le blason d'une agriculture en mal de reconnaissance et d'encourager les jeunes à se lancer dans ce métier pas comme les autres. "Contrairement à ce que l'on peut entendre, ils sont nombreux ces jeunes qui rêvent de devenir un jour agriculteur", conclut Florent Renaudier.