L’élévation du niveau de la mer n’est pas en train de détruire le littoral des Pays de la Loire. Selon l'Observatoire des risques côtiers, la région a gagné sur l’océan 1 700 000 m² entre 1950 et 2010, l’équivalent en superficie de 200 terrains de foot.
A la Tranche-sur-mer (85), les tempêtes s’accompagnent d’un paysage de désolation. Destructions, ensablement des maisons, recul du trait de côte : au fil des années, la mer semble progressivement gagner du terrain sur les habitations.
Pourtant l’érosion ne s’accélère pas en Pays de la Loire. Au contraire, la région s'est agrandie et a gagné du terrain sur l’océan. C’est ce qu’a démontré l’équipe de l’Observatoire régional des risques côtiers (OR2C), créé en 2016 à la suite de la tempête Xynthia.
“Les tempêtes ne sont pas plus fortes, l’érosion ne s’accentue pas. Bien sûr le réchauffement climatique existe, mais si des habitations sont aujourd’hui menacées c’est d'abord en raison de leur localisation, pas du changement climatique”, analyse Marc Robin, responsable de l’observatoire.
Entre 1950 et 2010, le littoral ligérien a perdu 830 000 m² dans certaines zones, mais a aussi gagné 2 530 000 m² de surface à d’autres endroits. Au total, pendant 60 ans, la région a gagné 1 700 000 m² sur l’océan, l’équivalent de 200 terrains de foot.
“Il s’agit d’un phénomène normal, explique Martin Juigner, ingénieur littoral au laboratoire. Les littoraux bougent énormément. La mer vient grignoter des bouts de plage et de falaise d’une part, mais le sable ne disparaît pas pour autant. Il peut être transporté un peu plus loin avant de se sédimenter et d’agrandir le territoire”.
“Noirmoutier en est un bon exemple. Beaucoup d’habitations sont menacées mais au niveau global, le territoire ne perd pas en surface”, décrit Marc Robin.
Ce phénomène est visible au niveau de la pointe sud de Noirmoutier. Près de 3km d'étendues sableuses apparaissent sur la carte actuelle alors que sur la vue aérienne des années 1950, elles se situent sous l'océan.
"Si des maisons sont menacées, c’est par l’artificialisation qui fige le trait de côte"
La hausse de trois centimètres du niveau de la mer en 30 ans n’aurait donc pas d’effet destructeur sur les côtes des Pays de la Loire, du moins pour le moment. La pression touristique sur le littoral serait à l’origine des risques accrus de submersion.
“Aujourd'hui la menace ne vient pas uniquement du réchauffement climatique, explique Martin Juigner. Dans les années 1960 la France a urbanisé massivement le littoral, notamment la côte méditerranéenne. Nous avons créé nous-même le risque côtier : si des maisons sont menacées, c’est par l’artificialisation qui fige le trait de côte.”
Les chercheurs restent sceptiques face à certaines projections simplistes qui annoncent la disparition de certains territoires dans les prochaines années. “On ne peut pas lire dans une boule de cristal”, ironise un chercheur. D’autant que la carte produite par le développeur Alex Tingle à partir des données de la NASA, qui annonce la submersion de Saint-Nazaire et Nantes, fait état de prévisions pour l’an 2500, et qu’il ne prend pas en compte certains paramètres comme les courants ou l’érosion des côtes.
Les scientifiques de l’OR2C déplorent le regard anxiogène autour de ce sujet. “Il faut simplement comprendre que tout ce que nous avons fait avant n’est pas bon, conclut le responsable de l’observatoire. Jusqu’ici l’Etat a construit des digues face à la mer, maintenant nous allons vers la relocalisation des habitations menacées.”