Un reportage BD sur les rivières et le Comté vient de paraître en septembre 2024, à la fois dans la Revue Dessinée et le hors-série "Eau" de la revue Salamandre. L'occasion de revenir sur la problématique de pollution qui touche les rivières des départements du Doubs et du Jura.
"Voici une étrange histoire de fromage, de bouses de vaches et de poissons". Ce sont sur ces mots que commence la BD écrite par le journaliste Martin Delacoux et illustrée par Valentine de Lussy. Une BD à découvrir dans deux revues à la fois : la Revue Dessinée et le hors-série de revue naturaliste La Salamandre.
Si le journaliste emploie un ton plutôt léger, c'est pour mieux nous plonger dans l'histoire d'une grave crise environnementale qui touche la Franche-Comté depuis plus d'une dizaine années.
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Pour Manon Silvant, membre du collectif SOS Loue et Rivières Comtoises, cette sortie "tombe à point pour la rentrée du collectif". Cité dans la BD, ce collectif est né en 2010 suite aux pollutions importantes que la Loue et d'autres rivières comtoises, comme le Doubs Frontière, l'Ain ou encore la Bienne ont subi. Il rassemble des associations environnementales, des naturalistes, des associations de pêche et d'autres organismes de la société civile comme la Confédération Paysanne.
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La BD retrace le travail du collectif et plusieurs membres sont représentés dont Manon Silvant. "J'étais un peu inquiète de quel angle, quel message allaient être diffusés. Quelques semaines avant la parution, j'ai demandé au moins l'extrait où je parlais et j'ai été rassurée", livre-t-elle.
D'après Manon, cette BD laisse une trace supplémentaire du travail réalisé par le collectif : "C'est un travail de mémoire. Le collectif est vieillissant et moi, j'ai peur, en tant que jeune que ce travail se perde".
Du Comté aux rivières
Martin Delacoux explique comment la production de Comté, qui a doublé, selon lui, depuis ces trente dernières années, pollue durablement les cours d'eaux et les rivières avoisinantes. Il met en lumière plusieurs lanceurs d'alertes dont le garde-pêche Patrice Malavaux. Celui-ci raconte en détail de quelle manière cette pollution perturbe les écosystèmes des rivières et nous apprend que certaines espèces de poissons sont pour cette raison en voie d'extinction.
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La BD retrace également les discussions entre les ONG environnementales et les agriculteurs de la filière du Comté. "Aujourd'hui, sur 100 litres de lait de vache produits dans la zone, rappelle Alain Mathieu, l'agriculteur président du Comité Interprofessionnel de Gestion du Comté (CIGC), 90 litres sont transformées en Comté. En 1990, c'était seulement 30 litres". Les producteurs de comté sont soumis à un cahier des charges plus exigeant pour le respect de l'environnement que les producteurs de lait, mais cela ne suffit pas.
Ce récit graphique explique intelligemment pourquoi la production d'un des fromages préférés des Français est pointée du doigt, même si la production de lait n'est pas une agriculture intensive, mais extensive. Elle donne aussi le point de vue des producteurs, coincés pour la plupart dans un modèle économique dont il est difficile de sortir.
L'auteur laisse le mot de la fin à Matthieu Cassez, agronome, "Il faut que l'État accompagne une baisse de la production et des revenus. Aujourd'hui, on est dans l'impasse. On continue à voir la réalité économique d'un côté et l'environnement de l'autre, alors que tout est lié". En moins de 25 pages, l'essentiel est dit avec en toile de fond l'impact du réchauffement climatique. Dans dix ans, le climat de la Franche-Comté pourrait bien être celui de l'Italie actuellement. Ni les truites Fario, ni les Montbéliardes ne sont faites pour vivre dans un tel climat.
