L'augmentation générale des températures entraîne une migration de la production de truffe vers le nord de la France, et notamment dans les Pays de la Loire. Le sol calcaire de la Sarthe est particulièrement propice pour cultiver ce coûteux champignon, et de plus en plus d'agriculteurs se forment à la trufficulture.
À Mareil-en-Champagne (Sarthe), la récolte est bonne en ce début d'année 2023 pour Antoine Heurtebise, qui a planté une centaine de chênes truffiers en 10 ans.
Elles se vendent 30-40 euros la truffe. On est des enfants, on est tous pareils. Quand on en trouve, c'est comme trouver un trésor.
Antoine HeurtebiseTrufficulteur en Sarthe
Souterraine, précieuse et chère : la truffe a en effet tout d'un trésor, si ce n'est l'aspect. Typique du terroir français, le champignon est produit à 70% dans le sud-est de la France.
Mais ce monopole pourrait bien changer à la faveur des canicules estivales et du manque de pluie causés par le réchauffement climatique.
La truffe a déjà entamé son déplacement vers le nord de la France, où le sols sarthois, riche en calcaire, se prête bien à l'implantation de truffières.
► Voir le reportage réalisé en Sarthe par Jérémy Armand, Laurence Couvrand et Mariano Zadunaisky.
La poule aux œufs d'or ?
Pour cultiver des truffes, il faut d'abord planter des arbres truffiers, dont les racines ont été associées avec des cellules de champignons (spores).
Ensuite, "il faut attendre 6 à 7 ans pour que les truffes puissent pousser et être récoltées", détaille Abdallah Meghazi, conseiller en agro-foresterie à la Chambre d'agriculture des Pays de la Loire.
/regions/2023/01/25/63d14278b7baf_truffe4.jpg)
Selon lui, il faut compter 6 000 à 8 000 € d'investissement pour planter un hectare de truffe noire. Le rendement attendu pour la même surface est de 30 à 40 kg de truffe, vendus à 1 000 € le kilo.
Mais si la culture de la truffe semble être la poule aux œufs d'or, Abdallah Meghazi insiste : "Ça demande beaucoup de boulot et de suivi".
Cultiver la truffe demande de la technicité, de l'entretien et de l'arrosage.
Abdallah MeghaziConseiller en agro-foresterie à la Chambre d'agriculture des Pays de la Loire
Formation d'agriculteurs
Abdallah Meghazi et sa collègue Claire Lemarié animent des formations dédiées aux agriculteurs qui envisagent de se mettre à la culture de la truffe.
"Les premiers ont commencé à planter vers 2002-2003, des petites parcelles d'une dizaine d'arbres. Au fur et à mesure on a formé des gens. Aujourd'hui, certains plantent 2 à 3 hectares", explique le conseiller.
Les volontaires ne manquent pas, notamment parce que les agriculteurs souhaitent valoriser leurs terres non cultivées. Certains sont prêts à se lancer dès 2023, comme le vigneron Fabien Duveau : "Ça me paraît très réalisable, même s'il faut de la patience".
Il a suivi une formation à la trufficulture dispensée par l'Association interprofessionnelle de la trufficulture en Nouvelle-Aquitaine à Sarcé (Sarthe), à laquelle a aussi assisté Julien Gincheleau, agriculteur céréalier au sud du Maine-et-Loire.
"J'ai voulu cultiver de la truffe noire parce que j'avais un souci sur une parcelle de lapin, sur une surface de 12 hectares, et pour diversifier et voir autre chose", confie-t-il.
Je ne sais pas ce que ça va donner, j'espère un petit complément de revenus en plus de l'exploitation.
Julien GincheleauAgriculteur céréalier
Bastion historique de la truffe au 18ème siècle, la Vallée de la Loire semble être en bonne voie pour retrouver cette vocation.
La trentaine de trufficulteurs des Pays de la Loire espère proposer au public un premier marché aux truffes dans la région à la fin de l'année 2023.
