The Bridge : le journal de bord de notre reporter sur le Queen Mary 2

L'une de nos équipes a pris place à bord du Queen Mary 2. Eléonore Duplay nous raconte sa vie de journaliste à bord car, oui, elle est partie avant tout pour travailler...

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Vendredi 30 juin

Dernier jour de bord, réveil en mer au large de l’île du Prince Edward, au Canada, dernier réveil au milieu de l’immensité, puisque demain, dès l’aube, nous passerons sous le fameux pont Verrazano, ce pont suspendu qui relie Brooklyn et Staten Island.
A l’heure du bord, il sera 4h30, mais grâce à la 25e heure, cela équivaudra pour nous à 5h30 du matin. Une heure après, le Queen Mary 2 passera devant la statue de la Liberté, un privilège, car normalement, celle-ci ne fait jamais partie de l’itinéraire du paquebot de la Cunard.

Et à 7h, une chorale de 300 chanteurs, recrutés et entraînés toute la semaine sur le navire, saluera l’amarrage à Brooklyn. L’émotion devrait être au rendez-vous, mais le soleil, pas forcément : on nous annonce une arrivée pluvieuse.

En attendant, journée de rangement, et de détente pour la plupart des passagers. Avec les autres journalistes, nous faisons le point sur les reportages réalisés à bord. Sur cet immense navire, nos regards ont finalement été très différents.

La journaliste de BFM TV a surtout raconté la course. L’équipe de TF1 ne parlera que du paquebot, ses passagers, ses petites mains et ses coulisses, faisant l’impasse sur l’événement The Bridge. La journaliste de Society a notamment enquêté sur l’usage de Tinder à bord. Ma collègue de France Bleu a raconté l’histoire de deux passagers ayant embarqué sur le France…

J’aurais aimé les rencontrer, tout comme j’aurais aimé avoir le temps d’assister à la vente aux enchères pour soutenir les associations qui secourent les migrants, en Méditerranée (sujet particulièrement cher au coeur de Damien Grimont, fier d’avoir en quelque sorte « pris en otage » les chefs d’entreprises, pour les forcer à s’investir sur le sujet)

Mais il faut accepter que notre métier est affaire de regards, de hasards, de rencontres… et de temps : plus de 2000 passagers, autant d’histoires, et seulement 5 jours en mer ! Espérons que nos reportages, et ce carnet de bord, vous aient permis d’appréhender un peu de cette semaine particulière, à bord du Queen Mary.


Jeudi 29 juin

Réveil au large de Terre Neuve. Cette nuit, nous sommes passés au sud du lieu du naufrage du Titanic, le 14 avril 1912. A l’horizon, une forme blanche se détache nettement. Un iceberg ? Probable, sous ces latitudes, à la période de fonte des glaces. Je prends une photo, qui alimentera de longs débats pendant cette journée : pour certains, il s’agit d’une trouée de lumière, pour d’autres d’un nuage, et pour certains, d’un iceberg. Je vous laisse juges !
Bientôt, la traversée s’achève, et nous faisons le point avec Damien Grimont, l’instigateur de cette traversée, et du retour à Saint Nazaire du Queen Mary 2. Les échanges à bord, les retombées médiatiques, tout est au-delà de ses espérances. A New York, Fox News et CNN retransmettront notre arrivée ! Surtout, l’idéaliste en lui, qui rêve de changer le monde, exulte : "C’est vrai que c’est un projet qui s’inscrit plutôt dans le monde des riches. Mais ce sont les riches qui ont le pouvoir, et quand on veut changer les choses, il faut s’adresser à eux en priorité"

A bord, petites et grandes entreprises ont discuté partage de la valeur, bienveillance au travail, écologie… Cela suffira-t-il à changer les pratiques ? On verra au retour.

Sur le paquebot, les mondes se croisent, discutent, se mélangent. Celui des petites entreprises familiales, et des très grosses, côtées au CAC 40. Celui des artistes, des experts. Le message de Jean Jouzel, vice-président du GIEC, déteindra-t-il à force de conférences, de dîners thématiques, d’échanges informels avec les décideurs?

Et il y a ceux qui ne se mélangent pas. Les passagers des suites, avec leur restaurant réservé, leur piscine réservée… qui semblent comme flotter, au-dessus de tout ça.

Et surtout, ceux qui sont partout, et pourtant invisibles. Le personnel de chambre, les serveurs, les cuisiniers, les petites mains, venues de l’autre moitié du monde. Celui qui nous parle aujourd’hui est philippin, comme une majorité du personnel. Embauché sur le premier voyage du Queen Mary 2, voilà 13 ans qu’il navigue, 6 à 9 mois par an. "Au début, j’étais célibataire, mais maintenant, j’ai une épouse, un petit garçon, et un enfant à naître au mois de juillet" Il ne pourra pas être à l’accouchement, et nous raconte les retours où son fils premier né avait peur de son père, devenu pour lui un inconnu, à force d’absence prolongée.

Pour les employés, c’est tous les jours lundi. Pas de  jour de repos, mais une alternance de vacation courte, et de vacation longue, pour un salaire "qui ne dépasse pas les 1000 euros par mois." Notre interlocuteur a pu acheter une maison à sa famille, aux Philippines. Il espère d’ici une dizaine d’années, avoir suffisamment pour quitter le navire, et monter un commerce au pays.

Ce sont les pourboires des passagers qui améliorent l’ordinaire, soit de la main à la main, soit versés au lobby central, pour être partagés entre tous les travailleurs du bord. Pour changer le monde, on pourra commencer par là !

Mercredi 28 juin, la 25ème heure

Nous sommes à présent au large du Groënland, et comme d’habitude, je me réveille trop tôt : chaque jour passé à bord, nous reculons d’une heure sur le temps GMT. En théorie, cela doit nous permettre d’arriver à New York sans ressentir le décalage horaire, mais cela provoque quotidiennement des quiproquos dans nos rendez-vous avec notre monteur, et pour les interviews.

La journée commence pour nous de la plus belle des manières, dans la passerelle de commandement, où nous avons la chance de filmer une navigation par gros brouillard, au son de la corne de brume, à l’endroit précis où se mélangent les eaux froides du courant du Labrador et celles du Gulf Stream, arrivées du Mexique.

Un endroit foisonnant, où il est très courant de croiser des dauphins, des baleines, et des colonies d’oiseaux pêcheurs tels que les macareux. Personnellement, je ne croiserai que quelques fous de Bassan, trop occupée à monter notre reportage du jour à l’heure où d’autres passagers rapporteront ensuite avoir vu des dauphins.

Le soir, j’ai rendez-vous dans la suite 9078, après une rencontre au jacuzzi… Mais n’y voyez rien d’équivoque : piscine et jacuzzi sont simplement les lieux où se délassent en fin de journée, les journalistes, les artistes et les entrepreneurs.

Dans l’eau chaude, les discussions dérivent du plus léger vers le professionnel, et c’est ainsi que je rencontre deux jeunes directeurs du promoteur immobilier, Réalités, un des plus gros sponsors de The Bridge. Pendant la traversée, une suite sert à des réceptions, festives, ou plus studieuses… que la 25e heure permet de prolonger jusque tard dans la nuit.

Ce soir, j’espérais un cocktail, mon collègue du Figaro m’ayant raconté une mémorable fête survenue là, la veille au soir. En fait, j’assisterai ainsi à un hallucinant concours de pitchs improvisés, où des starts ups de la région décrocheront en direct, leurs premiers contrats avec le groupe Réalités (et que je vous raconterai très bientôt, promis, dans un prochain article avec photos et vidéos)


Mardi 27 juin

Sur la télé, la chaîne consacrée à notre progression m’apprend que nous sommes au large de l’Islande. Gros vent, mais les températures restent tempérées.

Le matin, nous suivons, avec toutes les télés à bord, la visite presse des coulisses du Queen Mary 2. Pas question de dériver et d’aller trop loin sur les questions aux employés, tout est cadré. La veille, une hôtesse française, embarquée juste pour cette traversée, m’a cependant confirmé ce que j’avais lu par ailleurs : il y a bien, dans les quartiers du personnel, des équipements "miroirs" de ceux des passagers, en moins luxueux. Un bar, une discothèque, une salle de sport, et un accès à l’extérieur, pour voir la mer.

Pendant la visite, le journaliste du Figaro me montre aussi l’intitulé what the f*** d’un des dîners thématiques de la veille. Entre un dîner consacré aux moyens d’attirer les "millenials dans l’entreprise", un autre sur la robotisation de notre société, il y avait, et ce n’est pas une coquille, un dîner pour "Savoir faire la différence entre un Chinois, un Coréen et un Japonais" !

L’après-midi est, pour nous, consacré au gros morceau, les entreprises et les starts ups, mais aussi, le livre blanc pour l’emploi. Une initiative du PDG d’Actual, pour réagir à l’annonce d’Emmanuel Macron, qui compte en septembre, réformer notre code du travail par ordonnances.

Pendant toute la traversée, tous ceux qui le souhaitent font leurs propositions, leurs remarques, et la synthèse sera pendant l’été, envoyée au président de la République, à son premier ministre, et au ministre du travail. Gageons que les contributions de 180 entreprises ne seront pas complètement ignorées...

Le président de la CCI Nantes Saint Nazaire, Yann Trichard, également président d’un petit groupe d’entreprises en informatique, nous fait part de l’une des siennes : überiser Pôle Emploi en créant une application de mise en relation directe des employeurs avec les demandeurs d’emploi, faisant évoluer le métier des conseillers vers une sorte de back office de cette application. Selon lui, cela créerait presque instantanément des milliers d’emploi, suivant l’exemple de sa boîte qui peine à recruter 40 personnes en ce moment.

Par ailleurs, je teste l’efficacité de l’application The Bridge : j’envoie directement ma demande d’interview au PDG d’Actual, Samuel Tual, sans service de presse ni rien… Et 30 minutes plus tard, il est en face de moi ! Improbable. Inimaginable dans notre "vraie vie" de journaliste.


Lundi 26 juin

Premier réveil au large, premier envoi de reportage depuis la mer… Et petit à petit, nous prenons la mesure de ce qui va se jouer ici. Partout, depuis le jaccuzzi jusqu’au coin des fumeurs, des liens se créent, des connections entre chefs d’entreprises, de PME, starts ups. Ni vraiment du travail, ni vraiment du repos… Les conversations dérivent, depuis l’anecdotique vers le professionnel. Des cartes s’échangent, avec une déroutante facilité, en scandant simplement le QR code de l’interlocuteur grâce à l’application The Bridge.

Des apéros s’organisent dans les cabines où certains ont fait passer en fraude de l’alcool pour éviter l’exorbitant tarif de bord : le patron d’une PME vendéenne me montre la photo de la bouteille de troussepinette qu’il est très fier de passer jusqu’en Amérique (elle ne durera pas jusque-là). Jamais un tel huis clos n’avait été organisé ! Cinq jours en mer, pendant lesquelles le patron d’entreprise familiale discutera directement avec le PDG du CIC ! Ce qui sortira de ce "bouillon de culture" sera sans doute, tout aussi inédit.


Dimanche 25 juin

Journée à Saint Nazaire. Nous profitons de la proximité avec le plateau de nos émissions spéciales, sur le toit de l’Espadon, pour récupérer quelques effets : des carnets pour moi, car je réalise que le voyage sera sans doute bien plus riche en infos que je ne l’imaginais, et une lumière de caméra pour Dominique, ma collègue.

Je découvre que des visiteurs peuvent venir découvrir le bateau pour la journée, mais il fallait s’y prendre bien à l’avance, donner leur numéro de passeport… et de toutes façons, cette offre ne concernait pas les journalistes.

Je ne vous raconterai pas à nouveau l’émotion du départ, juste cette anecdote : nous apprendrons dans la soirée que Damien Grimont et tout le bureau de l’association the Bridge ont laissé exploser leur joie en se jetant tout habillés dans une des piscines extérieures ! Les photos existent, et nous sommes sur leur piste ;)
 

Samedi 24 juin

Première nuit difficile pour ma collègue : dans le rush de l’arrivée quasi simultanée de 1300 personnes, plusieurs bagages ont été égarés dans les couloirs du Queen Mary 2, dont celui qui contenait tous ses effets personnels. Le matériel, heureusement, a bien été livrés dans nos cabines, mais elle a dû se contenter d’un kit d’hygiène offert par la Cunard.

Au petit-déjeuner, des navires militaires arrivent à nos côtés, et feront le spectacle jusqu’à notre arrivée, à Saint Nazaire. Entre tournage et le montage du reportage du jour, nous n’aurons pas le temps de nous attarder bien longtemps sur le spectacle…

16h30, mise en place de notre point de direct, un avion nous survole pour établir une liaison avec le continent. La suite, vous la connaissez tous !


Vendredi 23 juin

8h00, le voyage commence à Nantes, au bout du hangar à banane. Le parvis de la grue Titan est transformé en terminal de bus. Beaucoup de monde, il faut presque une heure d’attente pour faire enregistrer ses bagages… Remontent de vieux souvenirs de départ en colonie de vacances, à ceci près que la foule des voyageurs n’a rien d’une bande d’adolescents. Beaucoup de têtes connues, chefs d’entreprises pour la plupart : je repère notamment Alain Mustière, le président des Ailes pour l’Ouest, le président de la CCI Nantes Saint Nazaire, les Start uppers nantais de Matlo, quelques journalistes, et aussi, Jean Le Cam accompagné de son épouse !

9h45, Nos bus partent enfin ! Le départ du club des 100 est une machine très lourde à démarrer, 1300 passagers…

15h30, après une pause repas dans un karting en Normandie, nous arrivons à Cherbourg, face au Queen Mary 2. Notre équipe bénéficie d’un passe-droit, pour un embarquement express car nous avons rendez-vous à 16h15 avec le capitaine, sur la passerelle de commandement. 19h, la terre s’éloigne. Notre voyage, et nos tournages, ont commencé.
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