Les 26, 27 et 28 décembre 1999, les cyclones Lothar et Martin ravageaient la France. Derrières elles, ces tempêtes ont laissé des forêts totalement ravagées. C'était le cas à Mervent, en Vendée, où il a fallu procéder au renouvellement des essences.
Souvenez-vous... C'était il y a un quart de siècle, deux tempêtes consécutives venaient frapper la France de plein fouet.
Il s'agissait de cyclones respectivement nommés Lothar et Martin. Dans la mémoire collective, ces catastrophes sont considérées comme "les tempêtes du siècle."
Leur passage a été particulièrement destructeur, causant des dégâts humains, matériels et aussi environnementaux. Concrètement, ces deux systèmes dépressionnaires ont conduit à la mort de 140 personnes et à près de 19,2 milliards de dollars (2006) de dommages matériels.
La première tempête est partie de la pointe de la Bretagne vers la Normandie, l'Île-de-France, la Champagne-Ardenne, la Lorraine et l'Alsace avant d'aller chez nos voisins allemands et suisses.
La seconde s'est développée au large de la Bretagne, puis s'est dirigée vers Nantes et l'ensemble des Pays de la Loire, le 27 décembre 1999. Elle a ensuite touché la Bourgogne-Franche-Comté et l'Alsace.
Et parmi leurs grandes victimes : les forêts françaises. Elles ont effectivement subi un dommage sans précédent, avec 6 % de leurs surfaces touchées, d'après les chiffres de l’Inventaire forestier national (IFN). Cela représente 968 000 hectares, soit plus que le département de la Loire-Atlantique à lui tout seul (697 000).
"C'était la première fois que nous connaissions une catastrophe aussi massive et étendue sur l’ensemble de la forêt française, qu'elle soit publique ou privée", détaille Brigitte Pilard-Landeau de la direction Forêts et risques naturels sur le site web de l'Office National des Forêts (ONF).
"Tristesse et désarroi"
Vingt-cinq après la catastrophe, Pierre Courtaud se dit toujours bouleversé par ce qu'il s'est passé. À ce moment-là, l'ancien responsable ONF de la forêt de Mervent, poumon vert de la Vendée, était en Bretagne.
C'est alors devant un poste de télévision qu'il apprend la terrible nouvelle. L'homme se souvient encore des images d'arbres tombés en travers des routes et disséminés un peu partout.
Un choc. Et celui-ci est d'autant plus grand lorsqu'il découvre les ravages dans sa propre forêt, celle qu'il assure "avoir dans le corps". "Sur l'instant, j'ai ressenti de la tristesse et du désarroi", confie-t-il. Des émotions vécues avec toujours autant d'intensité quand les souvenirs lui reviennent.
Mais, sur l'instant, Pierre Courtaud n'a pas laissé ses sentiments s'emparer de lui. Il s'est effectivement mis au travail une fois la tempête partie. Et face aux milliers d'arbres couchés par terre, parfois déracinés, il a fallu aller vite.
D'abord, en tant que représentant de l'ONF, le Vendéen avait comme mission de sécuriser les parcelles pour le grand public. "Les gens étaient curieux, ils voulaient venir voir. Mais ça pouvait être dangereux alors on a dû leur interdire les accès via voie de presse notamment", précise-t-il.
Ensuite, il devait assurer la bonne évacuation des bois sans endommager les sols. "On a fait tout ça à la main parce qu'il était impossible de faire venir des machines, tous les accès étaient bloqués", retrace le forestier.
Des vestiges en pleine forêt
"Imaginez un arbre derrière chaque souche", lance Pierre Courtaud en se promenant dans les allées de la forêt de Mervent. Avec son doigt, il montre le sol. Sous un tapis de feuilles mortes, se cachent effectivement des troncs d'arbres coupés.
Ils forment désormais les vestiges de ces tempêtes. Mais, comme un symbole d'une nature qui semble aller mieux, les souches sont recouvertes par de la mousse.
Un manteau vert constitué d'un millier d'êtres vivants. Ils sont garants de la biodiversité, entre dissémination de la microflore du sol et circulation des nutriments.
On se sent quand même chanceux par rapport à d'autres forêts, dans l'Est de la France notamment, qui ont été totalement mises à plat
Pierre CourtaudAncien responsable de la forêt de Mervent pour l'ONF
"Aujourd'hui, la forêt se porte bien", assure l'ancien représentant de l'ONF. D'après lui, cela est le fruit d'années de travail pour assurer le bon renouvellement de cet écrin de bois.
Il faut dire qu'après avoir nettoyé les débris laissés par les cyclones, il a fallu s'atteler au sauvetage des forêts. Et à Mervent, le travail n'était pas des moindres.
D'après Pierre Courtaud, entre 40 000 et 50 000 mètres cubes de la forêt vendéenne ont tout de même été ébranlés par le passage des tempêtes Lothar et Martin.
L'enjeu du renouvellement
Alors, pour redonner à Mervent toute sa splendeur, l'ancien membre de l'ONF a activement travaillé à son renouvellement. Cela en commençant par la replantation.
Et pour ça, place à la réflexion : "On devait choisir quel type d'arbre on allait mettre à la place des Douglas. On voulait une essence capable de résister davantage à ce type de phénomène météorologique", détaille-t-il.
Après une analyse des sols, la réponse fut celle du chêne rouvre. C'est d'ailleurs l'essence de l'arbre le plus vieux de cette forêt vendéenne, dont la plantation est datée de 1725, ultime preuve de sa robustesse.
On n'a pas souhaité réintroduire du Douglas parce que son enracinement superficiel fait qu'il résiste peu au vent.
Pierre CourtaudAncien responsable de la forêt de Mervent pour l'ONF
Mais la main de l'homme n'a pas été nécessaire partout. Dans certains coins, la forêt de Mervent s'est régénérée par elle-même. Favoriser le renouvellement naturel était d'ailleurs la première recommandation de l'ONF dans son guide d'action publié en 2001.
"Les plantations sont à limiter aux situations où il est nécessaire de changer les essences principales pour des espèces plus adaptées au milieu, et/ou dans les contextes de régénération naturelle difficile : absence de semis, installation d’une végétation herbacée bloquante ", précise Claudine Richter, cheffe du département Recherche, développement et innovation de l'ONF sur le site web de l'organisation.
Toutefois, si la forêt de Mervent semble bel et bien reprendre vie, Pierre Courtaud ne se réjouit qu'à moitié. "Elle va mieux, mais beaucoup d'arbres souffrent toujours des tempêtes. Cela parce qu'ils ont été ébranlés sans pour autant être tués", rappelle-t-il.
Le forestier assure également que l'impact du dérèglement climatique n'arrange rien. "Plus ça va, plus on remarque l'apparition de champignons et d'insectes que l'on ne connaît pas et qui sont néfastes pour la flore", appuie-t-il.
Et, bien que revivre un tel évènement serait un cauchemar pour lui, Pierre Courtaud se montre inquiet face à l'arrivée de potentielles autres catastrophes naturelles dans le futur.
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