Les règles du code de la route ont beaucoup changé depuis un siècle pour s'adapter aux transformations de la société et des technologies. Le président des Codes Rousseau, Michel Goepp, revient sur l'évolution de ce code, bien plus complexe qu'à sa création.
Feux rouges, rond-points, excès de vitesse : tout cela n'existait pas dans le premier code de la route paru il y a tout juste 100 ans, le 27 mai 1921. A l'époque, on parle seulement de "priorité à droite", mais quand les règles se complexifient avec les années, il faut bien les expliquer aux automobilistes.
"Au fil du temps, il a fallu en apprendre de plus en plus [...]. Le Code Rousseau est passé de 15 pages à 270 aujourd'hui !", explique Michel Goepp. L'entreprise basée aux Sables-d'Olonne propose des manuels et des exercices depuis 1937, pour expliquer les règles toujours plus complexes - et nombreuses - du code de la route.
Un code "pas forcément très assimilable"
"Le code officiel, c’est une succession d’articles de loi pas forcément très assimilables", témoigne Michel Goepp. A l'origine du manuel devenu référence, Louis Rousseau voulait aider ses élèves en auto-école. "Son idée c’est de vulgariser le code qui venait de naître quinze ans auparavant, pour le rendre accessible à tout le monde."
Recourir aux dessins, puis aux photos dans les années 60 : les Codes Rousseau s'adaptent pour expliquer les nouvelles règles, pas forcément comprises par les conducteurs, à une époque où les auto-écoles viennent tout juste d'être créées.
A l'heure du numérique, les outils sont maintenant bien différents, et les règles bien plus nombreuses encore. "Les règles de bases - la priorité à droite, les feux -, se sont complexifiées avec les règles de stationnement, les dépassements. Aujourd'hui il y a une part importante consacrée au comportement, et ces cinq dernières années on a ajouté des notions sur l’écologie, les aides à la conduite comme le freinage d’urgence ou le GPS."
Les règles ont été multipliées car le trafic a évolué, il y a de plus en plus de monde. Il a fallu réguler toute cette cohabitation entre les usagers, les piétons.
"Dans les grandes agglomérations, il y a eu des changements très importants, analyse le directeur des Codes Rousseau. Si vous prenez un automobiliste en 1930, aujourd'hui il serait sûrement surpris par la forêt de panneaux ! Maintenant quand vous roulez il y a des panneaux partout, des signaux lumineux… Lire tout ça, c’est parfois un petit peu surprenant quand on n’a pas l’habitude." Le code actuel recense plus de 600 panneaux de signalisation, qui doivent être connus par les 40 millions d'automobilistes français.
Prévenir les accidents de la route
"En 1972, il y a eu 18 000 morts sur les routes françaises. C’est le pic", explique Michel Goepp, qui considère la date comme un tournant. "On a mis en place les règles de limitation de vitesse, l’obligation du port de la ceinture, tout un tas de règles pour sécuriser la route et les usagers qui ont fait aussitôt chuter le nombre de morts."
Au début des années 2000, le nombre de morts par accident de voiture tombe à 9 000. Il est aujourd'hui trois fois moins élevé, avec 3 200 décès en 2019. Le durcissement des règles a ainsi fait chuter drastiquement la mortalité sur les routes, grâce à des politiques successives de sécurité routière.
Parmi les mesures mises en place, le permis à points fait son apparition en 1989. "Avant il y avait aussi des retraits de permis, mais pas le système à points. On faisait un excès de vitesse, on perdait le permis trois semaines, et on le retrouvait après [...]. On repartait comme si rien ne s’était passé."
Evoluer avec son époque
De nombreux facteurs conduisent au changement du code de la route. "Généralement, les évolutions technologiques amènent des nouveautés où le législateur est obligé de réagir". Pour le reponsable des Codes Rousseau, cela a notamment été le cas avec le téléphone portable.
"Il existe aussi des évolutions sociales : les pistes cyclables, les zones 30. Et des drames, quand il y a eu un incendie dans le tunnel du mont Blanc ; derrière il y a eu toute une règlementation sur les tunnels et de nouveaux panneaux ont été créés."
Michel Goepp imagine facilement des changements importants dans l'apprentissage du code dans les prochaines années, en lien avec le progrès technique et le changement climatique. "On va tous passer en boîte automatique, il va sûrement y avoir un changement des examens du permis de conduire [...]. Les voitures électriques ou hybrides sont toujours en boîte automatique. Demain, les constructeurs ne feront plus que ça".
Et que deviendrait le code de la route si les voitures autonomes, sans conducteur, devenaient majoritaires ? "Si on va dans un monde où la voiture est 100% autonome, il faudra un code de la route quand même. Mais il sera dans le programme de la voiture, il n’y aura pas besoin qu’il soit dans la tête du conducteur", considère le président du Code Rousseau.
"Des questions éthiques vont se poser : imaginons une voiture 100% autonome, et qu'un piéton traverse, qu’est-ce que je fais ? Je mets les passagers dans le fossé ou j’écrase le piéton ? Il faudra que l’ordinateur prenne des décisions, et ça fait partie des questions que l'on peut se poser."