Ça fait partie des petits bonheurs du printemps sur la table. La pomme de terre nouvelle de plus petit calibre et avec un goût plus subtil fait la joie des papilles. Mais la fermeture des restaurants et des marchés perturbe ce début de saison. Reportage sur l'île de Noirmoutier en Vendée.
Victor travaille d'ordinaire en restauration de temps en temps pendant ses études. Plus de cours, plus de boulot, il est confiné et a décidé de faire la saison de pommes de terre.
"Ma mère connaissait un peu Laurent, explique Victor, je me suis dit que j'allais travailler aux patates plutôt que de rester à rien faire chez moi. C'est agréable, il fait beau, c'est toujours bien de sortir un peu de chez soi."
Laurent, c'est le producteur. Sur ses champs de Noirmoutier-en-l'île, il récolte d'habitude 700 à 800 tonnes de pommes de terre par an. Cette année, la récolte sera là mais les ventes ne vont pas suivre.
"on savait pas sur quel pied danser..."
La saison pour le ramassage a commencé le jour-même du confinement. Un coup dur pour les producteurs."Ça a été difficile, témoigne Laurent Damour, on savait pas sur quel pied danser. On a du mal à vendre notre production en ce moment."
Car si le tubercule est là, le circuit de vente est grandement bousculé par la crise liée au covid-19. Habituellement, Laurent vend 30 à 40 % de sa production chez les restaurateurs, les grossistes ou sur les marchés. Un circuit qui n'existe plus depuis le début du confinement.
"Ça a été pénible, explique Laurent, la fermeture des restaurants, ça a fait de la vente en moins. On vend majoritairement aux grandes surfaces mais ça fait pas tout. Cette saison va être vraiment difficile pour nous. On n'évalue encore rien, c'est au jour le jour, on ne sait pas où on va."
"tout passe à 90 % en grande surface..."
Un constat que fait également la coopérative "La Noirmoutier" qui rassemble une vingtaine de producteurs de l'île."En début de campagne, rappelle Nicolas Paille, son directeur, 30 à 40 % des ventes se font en restauration et grossistes. Et là toute cette part de vente a disparu et tout passe à 90 % en grande surface. Donc, nous avons besoin du soutien des grandes surfaces, ce qui est globalement le cas."
La perte d'une partie de ce circuit de vente a fait chuter les prix de 20 à 30%, pile en début de saison, là ou la pomme de terre nouvelle, encore rare, se vend le plus cher.
L'autre conséquence de la pandémie, c'est le rejet du vrac par les consommateurs.
"C'est un élément contradictoire, reconnaît Nicolas Paille, parce que sociétalement on est plutôt dans la volonté de réduire l'utilisation des emballages plastiques. Or, cette année, c'est l'emballage qui connait le plus de succès parce que qu'il offre le plus de sécurité alimentaire par rapport au cornavirus. Du fait du covid-19, le consommateur est méfiant par rapport au produit en vrac et s'oriente plus vers du pré-emballé."
Pour sa récolte, Laurent n'a en revanche eu aucun mal à trouver des saisonniers. La fermeture des restaurants a laissé beaucoup de monde sur le carreau à Noirmoutier.
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