"Mensonges et manipulations" excèdent les syndicats

Alors que le principal actionnaire de la SNCM, Transdev se prépare à nommer mercredi son nouveau président du directoire, le démantèlement de la compagnie semble être l'issue probable, selon les observateurs.

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Mercredi, la SNCM se dotera d'un nouveau président du directoire, deux semaines après l'éviction de Marc Dufour à l'issue d'un long bras de fer avec son principal actionnaire Transdev, avec en ligne de mire, un possible démantèlement de la compagnie maritime marseillaise.
Le conseil de surveillance s'annonce une fois encore tendu et les échanges vifs entre les trois protagonistes de cet interminable feuilleton.
Grand gagnant du dernier round, le groupe de transports Transdev (66%, sept sièges), filiale de Veolia et de la Caisse des dépôts, a repris le 12 mai le contrôle de l'entreprise, après plusieurs tentatives infructueuses, avec un seul objectif: trouver au plus vite une issue de sortie.
Pourra-t-il mercredi compter sur le soutien de l'Etat (25%, trois sièges) qui, par son abstention lors du précédent conseil, a renversé la donne ?
Une "trahison" selon les actionnaires salariés (9%, 4 sièges), qui soutenaient la direction évincée et se montrent désormais très inquiets pour la survie de leur société.
Car avec le départ de M. Dufour, en conflit ouvert avec Transdev depuis plusieurs mois, c'est le plan de redressement de la SNCM qui se trouve compromis, en particulier l'achat de quatre navires appelé de leurs voeux par les syndicats.
D'autant que le seul repreneur qui se soit fait entendre depuis l'abandon du groupe norvégien Siem Industries a remis aux calendes grecques le renouvellement de la flotte.
L'armateur en question, Daniel Berrebi, dirigeant de la société américaine Baja Ferries, a en revanche réfuté tout projet de démantèlement, assurant être intéressé par l'ensemble des activités de la SNCM, opérateur historique des lignes reliant la Corse et le continent, mais qui navigue aussi vers le Maghreb.
Au sein de la compagnie aux 2.600 salariés, cette nouvelle a été accueillie avec scepticisme: la CFE-CGC a ainsi dénoncé "une pure mascarade", quand une source proche du dossier l'a accusé de "masquer son projet de prédation" derrière un discours rassurant.
C'est ce que pense aussi le journaliste du Marin, paru jeudi dernier, lorsqu'il écrit : "Vendre une partie de la flotte et des activités de la SNCM, tel semble bien être le travail de Jean-Marc Janaillac (le PDG de Transdev) qui ne s’est jamais caché de vouloir rapidement mettre en œuvre la solution dite de «discontinuité» : autrement dit, le démantèlement par appartement de la SNCM. Une première conclusion semble naturellement s’imposer : pendant que Pierre Sallenave travaille « officiellement » sur le financement de la nouvelle flotte de la SNCM, (...) Magellan s’emploie en réalité et simultanément à vendre les actifs de la compagnie".
Sur son blog personnel, Alain Verdi, l'un des spécialistes de l'affaire, réagit à cet article en précisant que si cette thèse se confirmait, "cela signifierait que l'Etat a fait semblant de préparer un plan de financement en vue d'une relance de la SNCM et qu'en fait, il préparait son démantèlement".

Menace de grève

Toutefois les salariés espèrent encore un sursaut de l'Etat qui doit aussi gérer le dossier très sensible des contentieux européens.
La SNCM est en effet sous le coup d'une double condamnation de Bruxelles à rembourser 440 millions d'euros d'aides jugées illégales.

"Le gouvernement est sur une pente dangereuse"


"Il faut rapidement que les responsables politiques redressent la barre dans ce dossier, sans quoi la CGT mettra tout en oeuvre d'ici au 30 juin pour faire respecter les engagements et préserver l'emploi", prévient Frédéric Alpozzo, délégué CGT-Marins (majoritaire).
Pour les représentants CFE-CGC Maurice Perrin et Pierre Maupoint de Vandeul : 

"il n'est pas trop tard pour changer le scénario"


et réaffirmer les arbitrages fondamentaux qui donneront un avenir" à l'entreprise.
Dans une lettre ouverte en forme d'"alerte sociale", sonnant comme "une semonce" avant le dépôt d'un préavis de grève - qui serait le troisième depuis le début de l'année -, le syndicat de l'encadrement demande au secrétaire d'Etat chargé des Transports Frédéric Cuvillier de "cesser et faire cesser les mensonges et manipulations".
Il y a en tout cas urgence. La SNCM, chroniquement déficitaire depuis sa création il y a un peu plus de 30 ans, a vu chuter ses réservations depuis l'épisode du 12 mai.
Privatisée en 2006 dans des conditions "contestables", selon un récent rapport parlementaire, elle accumule les pertes, confrontée à la concurrence croissante de Corsica Ferries, aux navires battant pavillon italien et aux équipages multinationaux, quand la SNCM opère sous pavillon français "premier registre", aux normes plus contraignantes.
M. Cuvillier avait promis au printemps l'entrée en vigueur en juin du décret dit "Etat d'accueil", un texte anti-dumping social visant à lutter contre cette "distorsion de concurrence". Or le décret vient d'être repoussé, déplore la CGT, qui y voit un autre signe de la défaillance de l'Etat dans ce dossier.
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