Les ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne ont lancé ce lundi une mission navale en Méditerranée qui doit s'attaquer aux réseaux criminels de passeurs de migrants, et devrait être déployée une semaine plus tard.
Les Etats membres ont levé ce vendredi tous les obstacles au lancement formel de l'opération, prévu lundi à l'occasion d'une réunion des 28 chefs de la diplomatie à Luxembourg.
Le plan opérationnel de cette mission baptisée "EU Navfor Med" et dirigée par un amiral italien a été adopté. Les contributions en navires, dont des frégates et peut-être des sous-marins, en hélicoptères, avions patrouilleurs et drones sont suffisantes, et la mission pourra commencer à se déployer "une semaine après la décision", a expliqué un responsable européen.
L'UE a promis d'agir fin avril après une nouvelle tragédie en Méditerranée dans laquelle 800 migrants sont morts noyés au large de la Libye lorsque leur chalutier a chaviré.
EU Navfor Med est censée s'attaquer aux bateaux utilisés par les trafiquants qui exploitent la détresse des migrants en les envoyant en haute mer au péril de leur vie.
Mais en l'absence d'un feu vert du Conseil de sécurité des Nations unies à l'usage de la force dans les eaux libyennes, l'opération sera limitée à ce stade à une surveillance à distance des côtes, d'où partent la grande majorité des migrants qui tentent de gagner l'Italie. L'objectif est d'améliorer la collecte et le partage de renseignements sur les réseaux de passeurs.
"Les navires, avions et drones seront déployés dans le sud de la Méditerranée pour collecter du renseignement et préparer les phases futures", a expliqué le responsable européen.
"Mais on a vocation à aller plus loin", a assuré un diplomate, tandis qu'un second a décrit "une première phase" destinée à "préparer une montée en puissance". D'autres sources soulignent qu'en l'absence d'un mandat clair du Conseil de sécurité, qui demande lui-même un consentement préalable des autorités libyennes, l'opération est à ce stade "coincée" et réduite à patrouiller loin des côtes, avec une efficacité limitée.
Pas une opération humanitaire
"Nous sommes plutôt optimistes qu'in fine, il y aura une résolution du Conseil de sécurité" permettant d'arraisonner les navires suspects, de couler les embarcations des passeurs voire de bombarder leurs caches sur la côte, a affirmé le responsable européen.L'UE entendait notamment s'attaquer aux puissants bateaux-mères utilisés par les trafiquants pour tracter en haute mer les radeaux de fortune surchargés de migrants, ensuite laissés à la dérive par les passeurs, qui délèguent ainsi aux garde-côtés italiens la tâche de les secourir et de les amener sur les rivages européens.
La chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, espère que les négociations actuelles entre factions rivales en Libye aboutiront rapidement à la formation d'un gouvernement d'unité nationale, qui pourrait ensuite unanimement présenter sa requête à l'ONU.
De nouveaux pourparlers sont prévus ce dimanche soir ou lundi à Skhirat, au Maroc, a assuré le responsable européen. "Il n'y a pas de certitude
absolue, mais de bonnes perspectives", selon lui.
"L'objectif très clair, c'est que ce n'est pas une opération humanitaire pour secourir des migrants, mais pour lutter contre les passeurs", a insisté la source diplomatique.
Les Européens ont aussi triplé les moyens des missions maritimes de sauvetage italienne et grecque, Triton et Poséidon, mais ils se déchirent sur l'accueil de 40.000 demandeurs d'asile, alors que Bruxelles les pousse à mieux les répartir au sein des 28. La Commission européenne aimerait aussi faire venir 20.000 réfugiés syriens de pays tiers, pour éviter qu'ils ne choisissent la périlleuse voie maritime. (Avec AFP)