Ce fut la maison-atelier du couple emblématique de l'art abstrait Hans Hartung et Anna-Eva Bergman, tous deux disparus dans les années 80. La splendide propriété sur les hauteurs d'Antibes, jusqu'ici réservée aux historiens de l'art, ouvre au public à partir du samedi 7 mai.
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Une route qui serpente entre les grands pins. Un portail, préservant des regards ce qui fut tout d'abord et avant tout un lieu d'intimité.
Un coup de sonnette, et s'ouvre à nous un univers inattendu : quelques bâtisses blanches se devinent dans une oliveraie centenaire. Un écrin pour la vie et le travail de création d'un couple d'artistes, et aujourd'hui pour leur postérité.
"Maison-mémoire, maison-utopie"
C'est Hans Hartung lui-même qui a dessiné cette maison avec la complicité de sa femme Anna-Eva Bergman. Ils s'y installèrent en 1973.
Cette maison a été conçue comme un beau cadre de vie, un endroit pour accueillir aussi, et surtout, un lieu dédié à la peinture. C'est ça qui comptait avant tout.
Thomas Schlesser, directeur de la Fondation Hartung-Bergman
Après la mort d'Anna-Eva Bergman en 1987 puis celle de Hans Hartung en 1989, la gestion du lieu et des collections est revenue à la Fondation portant leurs noms.
C'est à la fois une maison-mémoire, destinée à la transmission d'un patrimoine, de la vision de la vie des deux artistes, et une maison-utopie, dans le sens où j'ai envie que ce soit un lieu qui se projette vers l'avenir, avec encore beaucoup de choses à créer.
Thomas Schlesser
Les archives de la création
Premier projet mené à bien, cette grande exposition montée à l'occasion de l'ouverture au public de la Fondation.
"Les archives de la création" nous plongent au plus profond du processus créatif des deux artistes. Juliette Persilier, commissaire de l'exposition, a eu l'embarras du choix parmi la multitude de pièces conservées par le couple.
Toute sa vie, Hans Hartung a conservé à la fois ses œuvres, un panorama de toute sa création, et également quantité d'archives : du ticket de caisse à l'agenda, en passant par les clichés pris par des photographes ici même et qu'il a conservés… pour la postérité.
Juliette Persilier, commissaire de l'exposition "Les archives de la création".
On peut ainsi découvrir, sur les murs de l'ancien atelier du peintre, ce que signifie "l'abstraction lyrique et gestuelle" dont Hartung fut un des pionniers. En opposition à l'abstraction géométrique, elle est très émotionnelle, née d'un geste qui jaillit sur la toile, à l'image de cette "palmée" emblématique du travail d'Hartung dans les années 1950 :
Dans l'ancien atelier d'Anna-Eva Bergman, on admire la manière dont l'artiste norvégienne manie la feuille de métal, or, argent, cuivre, aluminium, pour que la lumière irradie à l'intérieur de ses toiles. Des oeuvres inspirées aussi bien des paysages de glace en Norvège, que de la mer Méditerranée, à l'image de ces vagues :
Les deux artistes ne travaillaient jamais ensemble.
Hartung et Bergman avaient pris soin d'avoir chacun son atelier, dans deux bâtiments différents. Par contre tous les jours, après leur journée de travail respective, ils se rendaient visite l'un à l'autre et choisissaient parmi les œuvres du jour lesquelles étaient leurs préférées, et qu'ils n'avaient pas le droit de vendre.
Juliette Persilier
Ce sont donc leurs toiles préférées qu'il est aujourd'hui donné au visiteur de voir.
Si leurs œuvres sont totalement distinctes, les deux artistes avaient en commun cette volonté de laisser une trace, de transmettre leur art et leur approche créatrice. "Ca les a animés l'un comme l'autre toute leur vie, ils avaient la même manière de concevoir ces choses", confirme Juliette Persilier. Ce qui explique l'immense richesse de leur leg artistique.
A partir du samedi 7 mai 2022, jour de l'inauguration, la Fondation Hartung-Bergman sera ouverte au public les mercredis, jeudis et vendredis, et l'exposition "Les archives de la création" sera visible jusqu'au 30 septembre 2022.
La Fondation plus que jamais ouverte aux historiens de l'art
Parallèlement à cette ouverture au public, la Fondation poursuit et amplifie son accueil des historiens de l'art voulant accéder à ses archives. Ils disposeront désormais d'un centre de recherche réaménagé, de chambres en résidence dans la villa. La Fondation Hartung-Bergman ambitionne de devenir, pour la France, un pôle de recherche à la hauteur du Getty Center à Los Angeles ou la Villa Médicis à Rome.
Le premier cycle thématique de deux ans sera consacré aux "Sciences et Abstractions".