ENTRETIEN. Guillaume Musso à Antibes, le retour aux sources de l'un des auteurs les plus lus : "Je suis très fier de fédérer des gens différents"

L'écrivain Guillaume Musso, né à Antibes, est revenu dans sa ville natale ce lundi 4 mars. Il a notamment inauguré une école élémentaire qui porte désormais son nom. Alors que sort ce mardi 5 mars son nouveau roman "Quelqu'un d'autre", France 3 Côte d'Azur l'a rencontré.

Il est certainement l'Antibois le plus connu de France. Ce lundi 4 mars, l'écrivain Guillaume Musso a fait son retour chez lui, à l'occasion du changement de nom de l'école "Juan-Gare". Cette école élémentaire de Juan-les-Pins (Alpes-Maritimes) a été officiellement nommée "école Guillaume Musso" par le maire Jean Leonetti. 

Cette venue prévue de longue date est un véritable retour aux sources pour Guillaume Musso. L'écrivain est né à Antibes en 1974, une ville dont son père était directeur des finances et sa mère de la bibliothèque municipale. De plus, il a été professeur de sciences économiques et sociales au Centre international de Valbonne pendant plusieurs années. 

Un des auteurs préférés des Français

Guillaume Musso est l'un des auteurs les plus prolifiques du paysage littéraire français. Depuis son premier roman Skidamarink, paru en 2001, l'écrivain a beaucoup produit, au rythme d'un nouveau livre publié chaque année ou presque. Aujourd'hui vendus à plus de 35 millions d'exemplaires et traduits dans une cinquantaine de langues, ses ouvrages ont fait de lui l'auteur le plus lu en France durant douze années consécutives.

Selon de récentes données publiées par Le Figaro, c'est la romancière Mélissa Da Costa, auteure la plus vendue en France en 2023, qui a mis fin au long règne du prince antibois, dont l'écriture est parfois décriée par certains critiques littéraires comme "populaire". Son nouveau livre "Quelqu'un d'autre", dont la date de parution est prévue ce mardi 5 mars, pourrait permettre à Guillaume Musso de retrouver son prestigieux statut. Les éditions Calmann-Lévy (Hachette) en impriment 500.000 exemplaires, contre 400.000 pour la précédente livraison, "Angélique", en septembre 2022.

C'est à l'occasion de la promotion de ce nouveau roman et de l'inauguration de l'école qui porte son nom que nous avons posé nos questions à Guillaume Musso. L'Antibois a répondu à notre journaliste Henri Migout, dans la somptueuse Villa Eilenroc du cap d'Antibes. Rencontre. 

France 3 Côte d'Azur : Il y avait beaucoup d'émotion ce matin à l'école "Juan-Gare", pourquoi ?

Guillaume Musso : C'était à la fois un immense honneur et une grande fierté d'avoir mon nom accolé à cette école-là. D'abord parce qu'Antibes, c'est ma ville, c'est chez moi. Je l'ai souvent dit, souvent répété. J'habite Paris uniquement par obligation familiale, mais j'ai toujours mis en avant mon amour profond pour cette ville. Ensuite pour le symbole de l'école, moi qui étais à la fois enseignant, mais qui ai toujours dit combien l'école, notamment à travers les professeurs, avait été déterminante dans ma construction d'écrivain. C'est par exemple un professeur de français de lycée qui m'a mis le pied à l'étrier et qui a fait que j'ai écrit ma première nouvelle et qui a déclenché cette vocation d'écrivain.  

Vous avez étudié au lycée Jacques Audiberti, à Antibes. C'est un écrivain, poète et dramaturge né à Antibes, comme vous. Maintenant, il y a un lycée Jacques Audiberti et une école Guillaume Musso... Qu'est-ce que ça signifie pour vous d'être mis presque sur le même plan que cet écrivain prestigieux ? 

Je ne voulais pas du tout que cela soit considéré comme une sorte de consécration. Je voulais que cette école, j'en sois un peu le parrain, mais que tout ça vive ! C'est un plaisir de voir les enfants, c'est un plaisir de voir l'équipe éducative, l'équipe de direction, et d'avoir des projets ensemble. Que tout cela soit moderne dans le mouvement, et pas une sorte de mausolée... Ce type d'honneur ne m'intéresse qu'à partir du moment où il a aussi du sens pour les autres...

Vous écrivez un livre tous les ans depuis 20 ans. Votre nouveau livre est l'histoire d'une héritière que l'on retrouve morte sur un yacht entre les îles de Lérins... Ces îles au lare de Cannes sont un lieu assez particulier, très festif l'été et qui devient un peu plus sombre lorsque tout le monde part... Ce cadre a-t-il été inspirant pour vous ? 

Oui, il a été inspirant. Je suis allé visiter Saint-Honorat il y a deux ans avec mes enfants. Cela faisait très longtemps que je n'y étais plus allé. C'était au moment où je commençais la rédaction de ce livre et le déclic s'était fait entre ce lieu et l'histoire. Moi, j'ai toujours, à travers cette histoire-là, envie de jouer avec le lecteur ! De lui dire : "Tu vas avoir les mêmes informations que l'enquêtrice pour essayer de résoudre l'enquête". 

Vous dites que la littérature se joue à deux, entre l'écrivain et le lecteur... Est-ce que c'est encore plus vrai cette fois-ci, puisqu'on va voir la vérité à la dernière ligne [du livre] ? 

Oui. C'est encore plus vrai parce que là, on a un meurtre et on a quatre personnes qui donnent leur vision du meurtre. On a le mari de la victime qui est en garde à vue, on a la flic cannoise qui enquête sur l'affaire, on a la jeune maîtresse du mari et on a la victime qui raconte ce qui lui est arrivé les mois précédant son assassinat. L'idée, c'est que personne ne ment, tout ce qu'on lit est vrai, et pourtant personne ne s'accorde sur la vérité. 

En bas de cette Villa Eilenroc, il y a le sentier des douaniers, les îles de Lérins… Tous ces éléments sont chargés de sens ici à Antibes et sur la Côte d’Azur. Est-ce que c'est des cadres pour les intrigues que vous écrivez ?

Oui. Alors d’abord, ils appartiennent à ma propre histoire parce que quand j’avais 16, 17 ou 18 ans, je travaillais l’été, je nettoyais les plages de Juan-les-Pins. Le sentier du littoral et ces paysages étaient restés gravés en moi. C’est comme s’il y avait une centaine de petits tiroirs où le romancier va chercher, va piocher, des lieux, des dialogues qui l’ont inspiré. C’est vrai qu’ici, ces paysages méditerranéens ont dans l’imaginaire des gens, à la fois le côté de la beauté, du soleil, des célébrités, et il suffit que le temps change, que quelque chose se passe, pour que l’on switche en fait, très vite, d’une ambiance très paisible à une ambiance beaucoup plus sombre, propre au roman à suspens.

La Jeune Fille et la Nuit (publié aux Éditions Calmann-Lévy en 2018) a donné lieu à une série qui a été en partie tournée ici à Antibes. Est-ce que cela pourrait être le cas pour le roman qui sort demain ?

On a déjà eu effectivement des demandes, des marques d’intérêt, d’adaptation. Moi, je suis ravi quand on met en scène ces endroits chers à mon cœur.

Guillaume Musso, ce sont 34 millions d’exemplaires vendus dans le monde, vous êtes traduit dans 47 langues. Vous êtes l’auteur français le plus traduit avec Michel Houellebecq. Quand on vous dit auteur populaire, cela vous vexe, ou est-ce l’inverse ?

Non, c’est la vérité. Je suis un auteur qui est lu par des gens très différents. Vous ne pouvez pas avoir un lectorat aussi large sans parvenir à fédérer des gens qui, à la base, ne vous lisent pas pour les mêmes raisons. L’adolescent qui, lui, aime les histoires à suspens, ne vous lit pas de la même façon que le professeur de français qui aime bien les citations que je mets en début de roman. Je suis très fier de ça, de fédérer les gens différents.

Il y a un mot aussi qui est distraction, au sens étymologique, c’est se détourner de, du chemin sur lequel on est. Cela peut être simple, c’est-à-dire se détourner du quotidien, cela peut être plus profond, se détourner de notre aspect mortel, et vous insistez sur la noblesse du mot distraction.

Oui, la distraction, c’est ce qui nous arrache effectivement à notre quotidien, à notre finitude, au fait que l’on va tous mourir. Ça, c'est le sens "pascalien". Pascal nous explique qu’un roi sans divertissement est un homme plein de misère, parce que finalement, un homme qui n’arrive pas à se divertir est renvoyé à sa triste condition d’être mortel. On a tous besoin de divertissement, pour temporairement être arraché à notre triste condition de mortel.

Est-ce que l’intelligence artificielle vous inquiète ? On en parle beaucoup en ce moment. Est-ce qu’un jour, on pourrait faire du Guillaume Musso sans Guillaume Musso ?

Je pense qu’elle doit tous nous inquiéter, nous romanciers, vous journalistes, et on a tous besoin de mettre en place des cadres, des règles finalement, pour éviter de voir nos professions remplacées par des machines. Oui, on a lieu de s’inquiéter, mais il n’est pas encore trop tard pour mettre des cadres et des règles à cela.

L'interview filmée complète de Guillaume Musso est à retrouver dans le journal régional ICI 19/20 de lundi 4 mars. 

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