À Cagnes-sur-Mer, les "gilets jaunes" réinventent les cahiers de doléances

Depuis une semaine, les "gilets jaunes" de Cagnes-sur-Mer (Alpes-Maritimes) proposent aux passants de déposer leurs doléances dans des cahiers, un peu comme en 1789 avant la Révolution française.

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Messages de désespoir nerveusement griffonnés, revendications surlignées avec application en orange, argumentaires collés sur une pleine page ou simples mots d'encouragements : à Cagnes-sur-Mer (Alpes-Maritimes), les habitants noircissent les pages de cahiers de doléances, à la mairie ou sur un rond-point occupé par des "gilets jaunes". Sur le rond-point Bachaga Boualam, où les protestataires ont installé leur campement à la sortie de l'autoroute A8, un cahier de texte, jaune comme il se doit, sommairement réintitulé "Doléances Cagne/Mer", fait l'affaire. En mairie, c'est un cahier 21x29,7 à grands carreaux, disposé dans l'entrée, qui recueille la parole des habitants.

A "la Ruche", le surnom du rond-point occupé, en une semaine, "une vingtaine de personnes sont venues remplir le cahier", explique Lucie, une serveuse de 30 ans. En mairie, le cahier a été installé à la demande de ces "gilets jaunes", qui ont aussi obtenu, après un vote du conseil municipal le 7 décembre, l'installation de toilettes chimiques sur leur rond-point et la signature par la municipalité d'une motion "en faveur d'une écoute des gilets jaunes".

Quand ils sont venus me voir, ils m'ont dit "Vous avez vu, tout est nickel, impeccable, et en plus on balaye le rond-point", raconte Louis Nègre, le maire LR de Cagnes-sur-Mer. Le cahier de doléances avait été demandé au niveau national, j'ai trouvé que ça pouvait être une idée, à partir du moment où ces gens sont respectables à travers leur contestation, leur protestation.


Sur le cahier installé en mairie, dans des messages parfois ponctués de fautes d'orthographe, Marie-Paule demande par exemple de "considérer la France comme une gigantesque copropriété, dont nous les Français sommes les copropriétaires", et insiste pour que "l'Etat arrive à nous dire comment il utilise notre argent".
 

"Ça suffit !!!"


Un autre habitant résume sa situation: "Je suis en invalidité 742 euros par mois pas de quoi manger rien ne vas" (sic), tandis que Jean-Paul, retraité, demande notamment de "rétablir le pouvoir d'achat pour les personnes qui travaillent". Flavie, elle, soutient "l'idée de référendum afin que tous les citoyens français puissent s'exprimer en faveur de leurs revendications".
 

Un pays qui ne consulte pas ses citoyens est une dictature!", lance-t-elle: "Je veux une vie meilleure pour mon enfant, vivre et non survivre". Un ou une autre jette une bouteille à la mer: "Nous sommes le 20 décembre et ma fille n'aura pas de cadeaux car ma priorité est de la faire manger. Ça suffit!!! Je veux une France juste.


L'antenne de Cagnes-sur-Mer du collectif des petits patrons et artisan a pour sa part collé dans le cahier de la mairie une photocopie de sa revendication: "la suppression, à compter du 01/01/2019, de la taxe Cahuzac confiscatoire, qui soumet les dividendes des SARL à gérant majoritaire aux cotisations sociales". Un autre, signant seulement de ses initiales, demande d'une belle écriture la "légalisation de la marijuana, cela ferait rentrer de l'argent dans les caisses et donnerait du boulot aux jeunes".

Un habitant a quant à lui couvert quatre pages du cahier pour lister ses revendications, surlignant les plus importantes, "représentation véritable du peuple", "changement de constitution", "imposition maximale des banques", "suppression de l'assistanat dans les banlieues" et de "l'aide de l'Etat aux migrants de 49 euros par jour".

"On va demander un rendez-vous au préfet pour qu'il se rende compte des revendications de la population de son département, on a besoin du soutien de tous les préfets et de tous les maires de France", poursuit Lucie quand on l'interroge sur le devenir de son petit cahier de textes jaune.

D'ici là, avec ses camarades Vincent, Dylan, Noelly ou Sandra, elle est bien décidée à passer les fêtes sur ce bout de terrain coincé entre l'autoroute du Soleil et la quatre-voies qui mène au village de Saint-Paul-de-Vence.

 
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