REPLAY. Le musée Grimaldi de Cagnes-sur-Mer met en lumière Mendjizky, peintre oublié de la Côte d’Azur

Une cinquantaine de tableaux et dessins de Maurice Mendjizky sont exposés au musée-château Grimaldi. L'occasion de découvrir ce peintre juif polonais, passé par l'école de Paris, qui est tombé amoureux des paysages méditerranéens.

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Qui était Maurice Mendjizky ? Un artiste méconnu qui a enrichi son trait de crayon et sa palette au gré de ses influences et de ses rencontres.

L’artiste juif va traverser les deux guerres mondiales, l’Europe et la plupart des courants picturaux sans que son nom soit resté dans la mémoire des amoureux de l’art.

Et pourtant, découvrir sa peinture au château-musée Grimaldi de Cagnes-sur-Mer est un pur plaisir pour les yeux. Et un voyage riche en couleurs dans cette première partie mouvementée du 20ème siècle.

Au début du 20ème siècle, le peintre s’exile de sa Pologne natale (Lodz) et il arrive à Paris, comme de nombreux artistes attirés par la ville lumière.

Elève à l’Ecole de Paris, il enrichit son trait de crayon et sa palette. Dans les années 20, il peint un portrait de rabbin et une scène de circoncision. Sur le tableau du Rabbin il signe encore son nom en hébreu.

Il côtoie d'autres artistes exilés comme lui à Paris et rencontre Alice Prin, qui ne s'appelle pas encore  Kiki de Montparnasse 

Elle deviendra sa compagne et sa muse et posera nue pour lui dans leur atelier. 

Des nus qui rappellent la palette de Modigliani. Mais après quatre ans de vie commune, elle le quitte. Mendjizky part dans le sud de la France, peut-être pour l'oublier. 

Dans les salles du château on découvre aussi des portraits expressifs, comme celui du poète Jacques Prévert, dont le visage affiche un teint verdâtre, un possible clin d'œil à son nom. 

Cette exposition permet d’en apprendre davantage sur cet artiste, tombé amoureux de la lumière de la Côte d’Azur, qui a côtoyé les plus grands. 

Renoir, qu’il a rencontré aux Collettes à Cagnes-sur-Mer, Picasso qu’il a croisé à Paris et dans le sud.

Palette d'ocres 

Pendant 30 ans, Mendjizky va peindre ces paysages méditerranéens, explorer ces chemins dans la garrigue, bordée d’oliviers. Ses tableaux montrent une nature originelle, sans l’urbanisation massive qui a eu lieu ensuite. Sa palette d'ocres et sa composition rappellent aussi les œuvres de Cézanne. 

C’est là aussi qu’il construit sa vie de famille. Il épouse Rose, originaire de Colomars, avec qui il aura deux fils, Claude et Serge. Il peindra sa femme et ses enfants dans une scène de sieste, à l'ombre des oliviers en 1930 (cf photo du tableau en haut de l'article).

Emeric Pinkowicz, conservateur des musées de Cagnes-sur-Mer explique que ses tableaux sont exposés à Paris mais il n'a pas été à l’époque reconnu à la hauteur de son talent.

"Peut-être lui a-t-il manqué les réseaux, peut-être aussi a-t-il payé le prix de l’éloignement parisien" , avance le conservateur. Même si Mendjizky avait un atelier à Paris et venait régulièrement dans la capitale.

Petite revanche : aujourd’hui sa côte d’envole et les collectionneurs ne se trompent pas !

Les dessins sur le ghetto de Varsovie

Les horreurs de la guerre vont briser cette quiétude familiale méditerranéenne.

Résistant, communiste, son fils Claude est fusillé dans le quartier de l’Ariane à Nice.

Sa femme est internée pendant 4 ans par la police française. Il apprend que sa famille en Pologne est entièrement décimée.

La guerre porte un coup d'arrêt à sa peinture ensoleillée. Il tente alors de dessiner l’indicible : les corps décharnés, déformés du ghetto de Varsovie. 

Il réalise une trentaine de dessins, à l'encre et au crayon, tous en noir et blanc.

"Une symphonie pathétique en noir et blanc"

Des scènes fortes et d’autant plus poignantes qu’elles sont sorties de son imaginaire. Le peintre exilé n'est jamais retourné en Pologne.

Après avoir vu ses dessins, Picasso dira de cette série : "c'est une symphonie pathétique en noir et blanc".

Pour Emeric Pinkowicz, conservateur des musées de Cagnes-sur-Mer, "c’est son œuvre testament face au monde",

Comment expliquer que ses œuvres n'aient pas été plus connues ? Le conservateur explique :

On voit bien les critiques de l'entre deux guerres, dès qu'une exposition de Maurice Mendjizky a lieu à Paris elle fait l'objet d'éloges, alors le fait peut-être d'avoir quitté la capitale, peut-être une question de réseaux, fait qu'il n'a pas percé à la hauteur de son talent.

Emeric Pinkowicz, conservateur des musées de Cagnes-sur-Mer

Petite revanche : aujourd’hui sa côte d’envole et les collectionneurs ne se trompent pas. 

Famille d'artistes

Maurice Mendjizky meurt peu après la guerre, à Nice en 1951, il  est enterré à Saint Paul de Vence. Son talent, il l'a transmis à son deuxième fils Serge Mendjizky, devenu peintre, puis photographe dans les années 2000. Il est décédé en 2017.

La femme de Serge, Patricia Mendjizky, poursuit aujourd'hui le travail de mémoire de cette famille d'artistes. Car il existe peu d'archives, de documents et quasiment aucune correspondance pour renseigner davantage l'œuvre prolifique de ce peintre qui a absorbé les différents courants de peinture. 

« Maurice Mendjizky, de Montparnasse à la Côte d’Azur », cette exposition qui dure jusqu’au 7 novembre, rend hommage et réhabilite, plus de 70 ans après sa mort, un artiste méconnu.

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Une émission présentée par Aline Métais à voir aussi tous les samedis à 19h15 sur France 3 Côte d'Azur.

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