Ce jeudi 14 mars, Bruno Vandelli a répondu à la rédaction de France 3 Côte d’Azur sur l’ensemble des affaires de mœurs dont il est la cible depuis des mois, parmi lesquels des faits de viol, agression sexuelle sur mineur et corruption de mineur.
Bruno Vandelli a commencé sa carrière de danseur dans sa ville natale : Cannes. Sa carrière l'a très vite porté vers d'autres horizons, notamment aux Etats-Unis. Le grand public garde en tête sa participation comme chorégraphe et juré de l'émission télévisée Popstars en 2002. L'ancien professeur fait face depuis plusieurs semaines à différentes accusations.
Durant un long échange téléphonique accordé à France 3 Côte d'Azur, le chorégraphe de 62 ans n’élude aucun point ce jeudi 14 mars. Il a répondu à l’ensemble des questions posées après voir attendu le feu vert de son avocat, Maître Joseph Cohen-Sabban.
Bruno Vandelli a d'abord hésité avant d'accepter "une discussion", destinée à revenir sur l'entièreté des accusations dont il est l'objet.
Viol, agression sexuelle sur mineur et corruption de mineur, ainsi qu'un témoignage fourni par un Azuréen - qui assure vouloir porter plainte à son tour - sont au cœur de l'interview.
Tout comme l'affaire qui doit le mener au tribunal correctionnel de Grasse le 17 avril, ou sa relation avec Yanis Marshall, à l'origine de la première plainte qui le vise.
Plainte de Yanis Marshall
Le 18 janvier 2024, Yanis Marshall publie sur son compte Instagram un message destiné à Bruno Vandelli, dont il a été l’élève.
"Cela fait plusieurs années que les faits dont j’ai été victime à l’âge de 14 ans me hantent, me détruisent et me plongent dans une véritable détresse" et assure qu’il n’est pas "malheureusement le seul dans cette situation", écrit l’ancien professeur et juré de la Star Academy en 2022.
Voir cette publication sur Instagram
Le 20 janvier, Yanis Marshall confie, en larmes, interviewé par BFM TV, qu’il a recueilli "16 ou 17" témoignages qui dépeignent certains types de comportements. "Les vrais attouchements et bien plus sont arrivés à 14 ans" a-t-il expliqué à l'antenne de la chaîne d'information en continu.
"N’importe quelle personne qui est dans le milieu de la danse, qui connaît Bruno Vandelli, sait qu’il n’y a aucune surprise aujourd’hui, aucune", a poursuivi celui qui est né à Grasse en novembre 1989.
Yanis Marshall dépose plainte auprès du parquet de sa ville natale quelques jours plus tard, "pour les faits de viol et agression sexuelle sur mineur et corruption de mineur", a confirmé l'instance judiciaire.
Le Grassois évoque une journée durant laquelle il s'est rendu au domicile de Bruno Vandelli, après un passage sur une plage privée de Cannes dans les Alpes-Maritimes. Il est invité à voir un concert de Janet Jackson en vidéo.
Il se met à côté de moi et j'ai les jambes qui commencent à trembler d'instinct, comme si je sentais que ça commençait à être bizarre et sans rentrer dans les détails, il m'a fait ce qu'il m'a fait.
Yanis MarshallBFM TV, le 20 janvier 2024.
Dans le cadre de cette affaire, une enquête a été diligentée par le parquet de Nice et confiée à la police judiciaire. Une information révélée en exclusivité par notre rédaction le 25 janvier dernier.
"Une relation complètement consentie"
Face à ces accusations, Bruno Vandelli nie toujours en bloc ce 14 mars : "Il n’y a jamais eu de viol, je suis quelqu’un de pacifiste". "On est resté deux, trois mois ensemble" poursuit-il.
Cette relation, Bruno Vandelli la situe "fin 2006, début 2007", après une séparation, alors qu'il est dans sa 45ème année. Yanis Marshall avait à l'époque 17 ans. La majorité sexuelle en France est de 15 ans.
C’est à Paris que l’on s’est mieux connus. J’étais en couple entre 2003 et novembre 2006. Quand je me suis séparé, on s’est rapproché [avec Yanis Marshall, NDLR], il y a une histoire, une relation complètement consentie, très courte.
Bruno Vandelli
"Je n’ai jamais violé personne dans ma vie, jamais, jamais, jamais" persiste Bruno Vandelli. Avant d'ajouter : "Je ne dis pas que je suis parfait, mais j’ai des valeurs et une déontologie en tant qu’enseignant, formateur. En tant qu’homme. Je ne peux pas accepter ce genre de choses."
Bruno Vandelli accuse à son tour Yanis Marshall, contre qui il a porté plainte pour dénonciation calomnieuse et subornation de témoins : "J’ai su par une très bonne amie à moi […] qu’il l’avait appelée en disant ‘oui, je manque de preuves, il faut que tu dises oui à ce que mon avocat tu demanderas".
Ces sollicitations auprès de plusieurs proches, Bruno Vandelli affirme qu’elles ont été faites par téléphone.
"C’était quelqu’un que j’aimais beaucoup, qui était très doué. Je ne l’ai eu qu’un an, en 2005, il s’est confié à moi, car il était très très mal" argumente Bruno Vandelli qui allègue que Yanis Marshall a repris des cours, 10 ans après, au sein de son école, lorsqu’il est revenu à Cannes.
Le chorégraphe de 62 ans explique qu'il détient de nombreux témoignages en sa faveur, qu'il souhaite réserver exclusivement au débat judiciaire. Et d'avoir des centaines d’attestations d’anciens élèves, ou bien de leurs parents, mais aussi de directeurs d’école dans lesquelles il est intervenu. "Je fais confiance à la justice" clame-t-il.
Bruno Vandelli se dit éprouvé par cette plainte et être en consultation régulière avec une psychiatre : "Je me lève le matin, je suis angoissé. Je me couche, je suis angoissé".
Il dit être devenu "agoraphobe" et "ne plus supporter le regard des gens" qui sont pourtant "bienveillants" avec lui.
Des "mots totalement monstrueux"
En décembre 2023, une scène relayée par plusieurs médias se déroule au sein de l'école de danse dans laquelle le chorégraphe est associé.
L’Espace 2, école Masson-Vandelli se trouve à Cannes. Un élève prend la parole lors d'un cours et accuse le chorégraphe cannois d’envois de "SMS pervers" comme le relate le quotidien national Le Parisien.
Cette saillie contre le professeur de danse se fait devant quelques dizaines de personnes. "J’ai eu une altercation avec un danseur, et un groupe s’est monté" justifie l'ancien chorégraphe de Popstars, l'émission diffusée sur M6. "Une jeune femme m'a même accusé de lui avoir touché les seins lors d'un cours" explique celui qui revendique sans tabou être homosexuel et avoir, dans le cadre de ses cours, retouché la posture de ses épaules.
Un courrier, rédigé avec l'avocat du chorégraphe, a été adressé aux parents des élèves de l'école par le chorégraphe s'est dit "traumatisé", par des "mots totalement monstrueux".
Bruno Vandelli s'est retiré de certains cours qu'il prodiguait pour continuer uniquement à donner des leçons à des adultes, "une cinquantaine".
Il a bien confirmé lors de l'entretien de ce 14 mars qu'"il y a eu des professeurs qui ont voulu arrêter" après cet épisode, source de malaise au sein de l'école.
Dans son article, Le Parisien affirme avoir "recueilli les témoignages d’autres élèves qui accusent Bruno Vandelli de comportements déviants".
Le parquet de Grasse a confirmé ce 15 mars avoir reçu une plainte fin d'année dernière "dans une brigade de gendarmerie du ressort de Grasse. Ce dossier a été transmis pour enquête à la PJ de Nice, déjà saisie des faits dénoncés par Monsieur Marshall."
Et d'ajouter : "à ce stade de l’enquête, Monsieur le procureur ne communiquera pas davantage sur ces procédures en cours."
Vers une nouvelle plainte ?
Fin janvier, un autre témoignage parvient à la rédaction de France 3 Côte d'Azur. Il y a une douzaine d'années, un homme aujourd'hui trentenaire affirme qu'un soir, il lui est demandé de déposer un CD au domicile de Bruno Vandelli, après une répétition, à la demande de son associée. Ses souvenirs du lieu sont précis, l'ascenseur, la cuisine...
"Pour tout vous dire, j’ai bu un verre, je ne me rappelle plus, mais ça devait être un soda. Et ça a été derrière ça, le trou noir. J’ai de vagues souvenirs, mais c’est très flou pour moi. Je me rappelle avoir eu des souvenirs dans lesquels Vandelli était très proche de moi" se souvient celui avec qui nous avons pu échanger plus d'une demi-heure la première fois, par téléphone.
Le jeune homme continue de vivre en Côte d'Azur et relate la fin de cette soirée qu'il juge troublante, et à laquelle il pense encore régulièrement. Il dit s'être retrouvé "tard dans la nuit… dans [s]a voiture sans permis à l’époque. J’avais 16 ans, presque 17 ans."
Il assure ne garder aucun souvenir, sauf fragmenté, par "images", de ce qu'il s'est passé entre le moment où il a bu ce soda et le moment où il s'est retrouvé dans son véhicule.
"Je suis certain que ce soir-là... Plus le temps passe et plus je suis certain [...] que j’ai été victime de quelque chose. Je ne peux pas l’affirmer, mais tout porte à [le] croire".
Passionné de danse à l'époque, il se souvient en avoir parlé "peut-être trois jours après", avec l'associée de Bruno Vandelli : "Elle ne s’est pas sentie gênée… Enfin, gênée, sûrement, mais j’ai envie de vous dire, pas surprise. C'est-à-dire, elle m'a dit 'ah non, mais ce n’est pas grave, vous avez dû mal vous comprendre'".
Contactée par téléphone dans l'après-midi du jeudi 6 mars, l'associée de Bruno Vandelli est catégorique. "On vous ment" lâche-t-elle lorsque l'on évoque ce témoignage, avant de poursuivre : "je n'ai pas souvenir de quelque chose de si grave".
"Mes courses, je les fais moi-même" conclut-elle.
Bruno Vandelli, lui, garde en mémoire cette soirée. Ce 14 mars, il répond à ce sujet : "Il est venu effectivement à la maison, mais c'est quoi cette histoire de black-out ?"
"On a bu un coup, on a parlé, on a discuté. On a parlé d'une chorégraphie, on a travaillé dessus, et ensuite il est parti. Tout d'un coup ça devient un black-out, c'est quoi un black-out ? Je sais ce que c'est mais enfin, cela signifie que je mets de la drogue dans la boisson pour endormir les gens ?" s'insurge Bruno Vandelli.
Contacté à nouveau le lundi 11 mars, le désormais trentenaire affirme avoir déposé une main courante à l'époque et qu'il a entrepris des démarches pour retrouver trace de ce dépôt auprès des forces de l'ordre. Il se dit désireux de déposer une plainte contre le chorégraphe, "à 90%", et nous a autorisés à relayer sa parole, dans cet article, et auprès de Bruno Vandelli.
Un procès le 17 avril
Bientôt palpable, une autre réalité judiciaire rattrape Bruno Vandelli. En avril prochain, il va se retrouver confronté à la justice dans une tout autre affaire de mœurs.
Le parquet de Grasse a confirmé à France 3 qu’une plainte a été déposée en 2017 pour des faits de "corruption de mineur par une personne mise en contact avec la victime par un réseau de communications électroniques".
"Suite au dessaisissement du parquet de Brest et après enquête, l’affaire est renvoyée devant le tribunal correctionnel" nous a encore confirmé le cabinet du procureur de la République de Grasse, ce lundi 11 mars.
Ça n'a rien à voir avec ça (les autres sujets abordés lors de notre entretien, NDLR). C'est quand j'étais avec mon mari. C'est mon mari et moi qui avons eu ce souci. On a eu un échange vidéo avec quelqu'un que l'on ne fréquentait pas, que l'on ne connaissait pas.
Bruno Vandelli
"On a eu un échange vidéo très court. Voilà, j'étais avec mon mari. On doit répondre de cela, on va le faire. On l'a fait sans vouloir de mal, sans fréquenter la personne. On n'est jamais allé boire un café avec elle, on ne l'a jamais vue, c'était un échange vidéo".
La voix plus tremblante, Bruno Vandelli évoque au téléphone cette vidéo d'une trentaine de secondes dont on ne connaîtra pas la teneur, après plus de 45 minutes d'entretien.
L'audience se tiendra le 17 avril, à 14h, après plusieurs renvois.