IMAGES. Cannes : Jean Pigozzi dévoile sa collection d'art contemporain africain, en vue d'un nouveau musée dédié à ce genre

Après avoir voyagé dans les plus prestigieux musées du monde, la collection privée du jet-setteur Jean Pigozzi fait escale sur la Croisette. Une centaine d'œuvres d'art contemporain africain, bientôt réunies à la Chapelle Saint-Roch de Cannes.

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Plongez dans les abysses de l'Afrique contemporaine, en admirant ses créations artistiques. Une exposition qui n'offre pas à voir statuettes antiques et objets d'un autre temps, mais qui se consacre à révéler le présent de tout un continent.

Ce tourbillon créatif questionne la place de l'Afrique dans le monde, sa complexité politique et sa diversité culturelle. Dans la gare Maritime de Cannes, c'est une centaine de sculptures, peintures, photographies et dessins qui lui rendent hommage jusqu'à la fin de l'été.

De Bamako à Johannesburg, les artistes laissent libre cours à leur imagination. Lors du vernissage le 11 juillet, nous rencontrons Jean-Paul Mika, peintre congolais. Son univers, c'est la couleur et les motifs, ils recouvrent l'ensemble de ses vêtements et font partie intégrante de ses tableaux, "c'est l'inspiration divine", affirme-t-il.

Je donne la joie de vivre, je donne l'espoir, j'apporte la bonne nouvelle à travers mes œuvres. Je ne voulais pas présenter l'Afrique des problèmes, moi, je fais l'Afrique dynamique et d'avenir.

Jean-Paul Mika, peintre congolais

Sur cette œuvre peinte en 2014, on y voit les présidents Barack Obama et Nelson Mandela se tenir la main. Pour l'artiste, c'est une façon de symboliser le triomphe de la démocratie.

"Il y a certains dirigeants africains qui ne veulent pas lâcher leur trône, moi je veux rappeler au peuple qu'il y a d'autres modèles politiques", ajoute-t-il.

L'exposition comprend aussi les célèbres masques faits à partir de bidons d'essence du Béninois Romuald Hazoumé. Pour lui, c'est une façon de rappeler "d'où l'on vient", un clin d'œil à sa communauté qui mêle rites et coutumes.

"Lorsqu'une femme avait les cheveux dressés sur la tête, ça signifiait qu'un oiseau pouvait s'y poser et donc qu'elle était célibataire", confie l'artiste présent sur les lieux.

Chaque œuvre fait écho à une tradition ancestrale. Les cheveux des femmes tirés vers le bas, symbolisent quant à eux l'adultère du mari, "c'est un langage secret, cela signifie que le serpent a passé la nuit dehors", s'amuse Romuald Hazoumé.

A travers cette exposition, conçue comme un labyrinthe, on retrouve également les œuvres du Sénégalais Soly Cissé et Mor Faye ainsi que du Congolais Chéri Samba.

Elles ont toutes un point commun : elles sont issues d'une collection privée, celle du jet-setteur et photographe italien Jean Pigozzi, grand amateur d’art contemporain africain.

Jean Pigozzi, un collectionneur hors-normes

Fils et héritier du patron italien de la marque automobile Simca, revendue à Chrysler en 1963, Jean Pigozzi, qui a grandi entre Antibes, Genève et Paris, s'est d'abord consacré à la photographie. Puis, en 1989, après avoir visité l'exposition "Magiciens de la terre" au Centre Georges-Pompidou à Paris, il se passionne pour l'art contemporain africain.

Un an après, après sa rencontre avec le commissaire d'exposition, André Magnin, il finance la création de la Contemporary African Art Collection (CAAC), la plus grande collection d'art contemporain africain du monde. 

Toutes les œuvres sont originales, ces artistes ne s'inspirent pas du monde occidental, ça vient du cœur, des traditions et de leur imagination. C'est pour ces raisons, que je suis tombé amoureux de cette école artistique.

Jean Pigozzi, collectionneur d'art contemporain africain

Depuis, il a réuni plus de 10 000 œuvres, couvrant une période allant des années 1950 à nos jours. Sa collection, actuellement entreposée à Genève, a côtoyé les musées les plus prestigieux du monde comme celui de Guggenheim à Bilbao ou encore le MoMA à New-York.

Une collection admirée, mais parfois critiquée, voire qualifiée de "néocoloniale". Après un vernissage à Houston, un groupe de militants noirs avait brandi des pancartes où l'on pouvait lire: "Vous ne pouvez pas contenir ma négritude dans votre boîte blanche", révèle en 2006 le média Swissinfo.

Un musée dans la chapelle Saint-Roch désacralisée

"Nous avons entrepris une démarche ambitieuse de promotion et de valorisation de l'art moderne et contemporain", a déclaré David Lisnard, le maire (LR) de Cannes lors du vernissage de l'exposition. "Ce travail se concrétise aujourd'hui par la création du premier musée au monde consacré à la prestigieuse collection d'art contemporain africain de Jean Pigozzi", a-t-il ajouté.

Le musée, dont la date d'ouverture n'a pas été précisée, proposera sur plus de 600 m2 une exposition permanente où se relaieront différentes œuvres de Jean Pigozzi. Ainsi qu'un espace d'exposition temporaire, dans l'ancienne chapelle Saint-Roch de Cannes. La Croisette pourra dorénavant se vanter d'avoir sur ses terres son petit "quai Branly" modernisé.

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