Quatre jeunes danseurs ukrainiens ont intégré l'Académie Princesse Grace, école des Ballets de Monte-Carlo. C'est l'une des actions des Ballets de la Principauté qui s'engagent, avec leurs moyens, pour soutenir le peuple ukrainien victime de la guerre.
Martin Kovol, 17 ans, s'exprime dans un anglais encore hésitant.
Le 24 février dernier est le pire jour de ma vie.
Le jeune garçon de 17 ans a quitté en quelques heures sa vie, sa famille, ses amis et son avenir tout tracé au sein de l'école de danse de Kiev.
"Ce matin-là mes parents qui vivent à Kharkiv m'ont appelé et m'ont dit : "La guerre a commencé". J'ai rassemblé des vêtements et des chaussures, et je suis parti".
Cette histoire, qu'une des danseuses des Ballets de Monte-Carlo a apprise par sa famille en Ukraine, a ému Jean-Christophe Maillot. Le directeur-chorégraphe de la compagnie a décidé d'accueillir le jeune garçon au sein de l'Académie Princesse Grace.
"La première semaine a été très difficile pour moi. Mes parents sont à Kharkiv près de la frontière russe, la situation y est très dure. Je veux croire que ça va." Malgré l'inquiétude, Martin a retrouvé ici une forme d'équilibre : "La danse est dans mon sang. Si je ne danse pas une semaine, je ne me sens plus humain. Ici, je peux faire progresser mon corps, ensuite je veux retourner à Kiev".
Comme lui, trois autres jeunes danseurs ukrainiens, un garçon et deux filles, ont posé leurs valises sur le Rocher, en internat au sein de l'académie. Des jeunes accueillis par solidarité plutôt que par charité, car tous ont le potentiel nécessaire pour acquérir, avec du travail, le niveau de l'école.
Alisa Garkavenko a 17 ans elle aussi. Si elle a commencé la danse à Kiev, elle a ensuite poursuivi son apprentissage en Russie à Saint-Pétersbourg qu'elle a quitté en catastrophe au début de la guerre.
"C'est un honneur d'être élève dans cette académie. Même si je suis inquiète pour ma famille. J'espère que ma mère et mes frères vont essayer de quitter le pays, car c'est impossible d'y rester. Ici, tout le monde nous a aidés. Pas seulement les enseignants, les élèves aussi, ils nous soutiennent, et ont été très gentils avec nous".
C'est très important que nous puissions, à notre niveau, témoigner de cette solidarité envers le peuple ukrainien qui subit les assauts de cette guerre insupportable déclarée par la Russie.
Jean-Christophe Maillot, directeur-chorégraphe des Ballets de Monte-Carlo
Jean-Christophe Maillot, le directeur des Ballets de Monte-Carlo dont fait partie l'Académie Princesse Grace, s'est engagé sans aucune hésitation pour venir en aide aux Ukrainiens. Malgré, ou peut-être justement à cause de la longue histoire commune qui lie la compagnie monégasque à la Russie, et notamment au Théâtre du Bolchoï.
"J'ai une relation forte avec ces danseurs russes, et notamment avec Olga Smirnova qui a eu le courage de quitter le Bolchoï, et qui viendra danser avec nous prochainement", souligne Jean-Christophe Maillot. "Je sais que ce n'est pas simple de prendre position là-bas, que ce n'est pas facile de dire qu'on est contre cette guerre, dans un pays où la liberté de parole n'est pas du tout la même que chez nous."
Lui qui a la possibilité de le faire, a donc pris une position claire. En tant que chorégraphe, Jean-Christophe Maillot a retiré au Bolchoï le droit de présenter La Mégère Apprivoisée, ballet qu'il a spécialement créé pour la compagnie russe en 2014 et qui fait toujours partie de son répertoire.
Les Ballets de Monte-Carlo ne se sont pas arrêtés à cette action symbolique. Ce lundi, un camion de la compagnie était tout juste de retour de la frontière ukrainienne. Il a livré sur place du matériel de première nécessité donné par les danseurs eux-mêmes.
La tournée à Saint-Pétersbourg a été annulée. Le départ pour Saint-Pétersbourg était prévu ce mardi.
"Le drame c'est que la Russie s'était beaucoup ouverte, après avoir été très fermée pendant des années, à l'Occident et à la culture internationale".
Conformément au souhait de la Principauté pour toutes les structures culturelles monégasques, la recette du premier spectacle des Ballets de Monte-Carlo au mois d'avril ira intégralement à l'aide aux Ukrainiens, via la Croix-Rouge.