C’est le nouveau spectacle de Jean-Christophe Maillot présenté en avant-première au Grimaldi Forum à Monaco. Le directeur des ballets de Monte-Carlo traduit en mouvements l'histoire d'une nouvelle sombre et violente, un polar noir.
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Une histoire de vengeance… et de voyeurisme ! « Œil pour Œil », c’est le nouveau spectacle de Jean-Christophe Maillot. Le directeur des ballets de Monte-Carlo a repris une création de 2001 plutôt visionnaire sur le monde actuel. Des caméras filment en direct les danseurs, certaines images ont été enregistrées. Les coulisses deviennent des antichambres où se déroulent d’autres scènes, l’envers du décor généralement interdit au public.
Sexe, trahisons et vidéo
Une critique ou un constat du voyeurisme au 21ème siècle ? Jean-Christophe Maillot met en mouvement la trilogie du mal : sexe, trahisons et vidéo. Avec des caméras sur scène et des écrans géants dans la salle, le chorégraphe veut plonger le spectateur dans une immersion totale et exposer la qualité d’interprétation des danseurs, en étant au plus près de leurs émotions. Une transposition audacieuse.
Nouvelle et bande dessinée
Le chorégraphe qui revisite habituellement les contes de fées du répertoire classique, s’éloigne de son univers enchanteur. L’artiste s’est inspiré d’une nouvelle écrite avec son ami, l’écrivain Jean-Marie Laclavetine pour qui « le polar est la version nocturne du conte de fées ». Ensemble, ils ont créé des personnages dignes d’un polar noir dans un décor de ville plongée dans la nuit. Un décor de Jérôme Kaplan qui aurait pu sortir d’une bande dessinée. Même le sol est hachuré de noir et blanc.
Près d'une vingtaine de danseurs participent au spectacle dans des costumes étonnants et des coiffures parfois assez punk.
Chimères, Pieuvre et chiens policiers
L’histoire commence de manière classique, comme celle d’un trio amoureux entre la belle Iris, le pur Adam et Loup. La jeune Iris choisit Adam. L’amoureux déchu n’aura de cesse de reconquérir Iris et de détruire leur bonheur. D’autres personnages peuplent cet univers noir, celui des bas-fonds d’une ville imaginaire avec les Chimères qui grouillent dans l’ombre, des chiens affublés d’une camisole qui servent parfois l’autorité d’une Pieuvre mystérieuse et maléfique. C’est la seule danseuse sur pointes.
"Déchirures sur le costume"
Pour les danseurs, habitués à la relecture des contes de fées, cette création est une nouvelle aventure. Comme, Ashley Krauhaus, jeune danseuse des Ballets de Monte Carlo, a fait sa formation au sein de l’Académie Princesse Grace pendant 5 ans. Elle a été choisie pour interpréter Iris, une jeune femme sensible, naïve et fragile, confrontée à l’univers sombre de « Œil pour Œil » : « Pour quelqu’un d’aussi jeune, c’est vraiment un défi de correspondre à ce côté sombre. J’étais moi-même bousculée. J’avais des déchirures sur mon costume et ça allait avec ce côté noir… Ça m’a aidé à rentrer dans le personnage. »
Francesco Martinotti, alias Adam, a aimé travailler sur cette création, car le chorégraphe est au service de l’histoire, plus que pour un ballet classique comme Roméo et Juliette par exemple : « Pour moi c’est beaucoup, beaucoup mieux de travailler comme ça… car vous pouvez vraiment travailler sur chaque détail, sur chaque pas et donner un sens à ce que vous êtes en train de faire."
Montrer l'envers du décor
En créant cet univers où les forces maléfiques ont une part importante, où tout est filmé, Jean-Christophe Maillot présente presque l’ébauche d’un scénario pour le grand écran. Rêverait-il de cinéma ? Pas seulement en dansant devant le miroir ! Il s’exclame : « Je ne suis pas encore trop vieux, je garde l’espoir, vous voyez, ça me garde vivant de croire que ça peut arriver ! » Toujours bouillonnant d’idées et d’énergie, le chorégraphe voudrait faire de sa dernière création une série ou un documentaire pour montrer davantage l’envers du décor. Inviter le spectateur dans le processus de création, à l’intérieur de l’Atelier très design des Ballets de Monte Carlo.