INFO FRANCE 3. Pour cela, Yves Juhel et la commune ont engagé une procédure devant le tribunal administratif de Nice. Cette démarche vise en premier lieu à exclure du conseil municipal Mathieu Messina. Elle permettrait également, si elle est validée par la justice, de renforcer la majorité.
À Menton (Alpes-Maritimes), la vie politique n'a pas pris de vacances... Fin juillet, le maire de la commune a déposé devant le tribunal administratif de Nice une "requête pour démission d'office" concernant trois conseillers municipaux d'opposition.
Dans sa requête, Yves Juhel, le maire de Menton, explique que, lors des élections européennes en juin dernier, "il a été demandé à l'ensemble des conseillers municipaux de bien vouloir assurer la Présidence d'un bureau de vote, obligation pour tous les conseillers en raison de leur fonction. Cette demande a été faite par lettre simple du 13 mai 2024 et doublée d'un mail [...]. Les services municipaux ont même relancé les élus retardataires par un mail du 23 mai 2024".
Une "même demande" a également été faite pour la tenue des élections législatives qui ont suivi. Des messages électroniques "lus" par les trois conseillers mais restés sans réponse ou ayant reçu une réponse négative, selon les services de la municipalité.
Obligations olympiques et certificats médicaux
Les trois conseillers visés par cette démission d'office sont Mathieu Messina et Stéphanie Jacquot, deux anciens proches du maire aujourd'hui en disgrâce à la suite du scandale des notes de frais de la société qui gère les deux ports de la ville, ainsi que Anthony Malvault, élu d'opposition.
"Ainsi, l'absence de réponse de M. Messina, de Mme Jacquot et de M. Malvault, en dépit de la relance des services municipaux, doit être considérée comme un refus sans excuse valable de remplir une des fonctions qui lui est dévolue par la loi", est-il écrit dans la requête.
Pas de trêve olympique pour ces élus, donc. Actuellement à Paris pour encourager Bopha Kong, un athlète handisport de taekwondo qu'il sponsorise, Anthony Malvault se dit surpris par cette procédure judiciaire.
"Aujourd'hui, je suis dans une dynamique olympique", explique Anthony Malvault, "et j'avais indiqué à Yves Juhel que, pendant six mois, ce serait compliqué pour moi".
Il savait très bien que j'aurai des absences pendant la période olympique. De là à m'attaquer parce que je n'étais pas présent à une élection, je trouve cela assez indécent.
Anthony Malvault, conseiller municipal d'oppositionà France 3 Côte d'Azur
Coup politique ?
Mathieu Messina, lui, était l'ancien directeur de campagne d'Yves Juhel en 2022 et son ancien adjoint aux finances. Il est au coeur du scandale des notes de frais qu'il a faites alors qu'il était PDG de la société qui gère les ports de la ville. S'il a depuis démissionné de ses postes d'adjoint et de PDG, Mathieu Messina est toujours conseiller municipal ("non-inscrit"), sans jamais siéger lors des séances.
Il y a un peu plus de quinze jours, dans une enquête que nous avions consacré à ce scandale des notes de frais, Mathieu Messina avait annoncé son retour au sein de la mairie : "une fois les mises en examen connues, je me laisse la possibilité de revenir en conseil municipal ou de rencontrer le maire pour avoir des explications d'homme à homme".
Contacté, Mathieu Messina rappelle qu'il est "en arrêt maladie depuis le 15 octobre" et affirme qu'il "ne compte pas [se] laisser faire ni démissionner du conseil municipal".
Quant à Stéphanie Jacquot, elle met en avant l'organisation de son mariage et des problèmes de santé.
Si ces démissions sont actées par la justice, deux nouvelles personnes présentes sur la liste du maire en 2022 feront leur entrée en conseil municipal en remplacement de Mathieu Messina et de Stéphanie Jacquot (pour Anthony Malvault, il s'agira du suivant sur la liste "Menton avec vous").
Ou comment exclure deux conseillers municipaux d'opposition et ainsi renforcer la majorité. Les conseillers ainsi démissionnés devront attendre un an avant d'être de nouveau élus.
"On n'arrive pas à avancer politiquement"
Au téléphone, Anthony Malvault se montre las d'entendre à nouveau parler de ces affaires politico-judiciaires. "Je me suis posé la question de démissionner de mon propre chef. Ça fait deux ans qu'on n'arrive pas à avancer politiquement, on est toujours pris dans les affaires de la majorité", détaille-t-il. "Sur le terrain, les seules choses qu'on nous demande, c'est où on en est dans l'affaire Messina et les ports de Menton."
Depuis l'élection municipale partielle de février 2022, le conseil municipal a été en partie renouvelé à quatre reprises à la suite de démissions, dont trois en lien avec le scandale politique et financier.
