Alors que Gérald Darmanin prépare son projet de loi immigration, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), s'est prononcée contre le refus systématique d'entrer sur son territoire. À Menton, cette décision n'a rien changé. La semaine dernière, 1.400 migrants venant d'Italie ont été refoulés.
Ces derniers jours ont été mouvementés à Menton (Alpes-Maritimes) entre les annonces d’un possible camp de migrants, finalement démenties puis la mise à disposition d’un terrain municipal servant à prendre en charge temporairement le flux supplémentaire de migrants.
Pendant ce temps, les contrôles sont renforcés au niveau des frontières terrestres avec de nombreuses forces de police et de gendarmerie. Ce que confirmait au micro de France 3 Côte d'Azur vendredi dernier Emmanuelle Joubert, directrice départementale de la police aux frontières (PAF) : "il y a un gros dispositif mis en place, notamment le recours à quatre forces mobiles".
Chiffres records
Une présence qui aboutit à de nombreuses interpellations : 32.000 depuis le début de l’année, 1.400 pour la seule semaine écoulée. Des refoulements régulièrement dénoncés par les associations humanitaires.
Le 21 septembre dernier, la justice européenne (CJUE) est allée dans le sens de ce qu’elles réclament depuis des années : la fin du refoulement systématique d’un ressortissant étranger entré irrégulièrement sur le territoire français.
L’arrêt rendu est le fait d’une saisine du Conseil d’État, lui-même saisi de ce dossier par les associations, notamment la LDH, la Cimade ou encore l'ADDE. Il faut dire que, depuis 2015, la France a rétabli les contrôles à ses frontières. Dans son choix, la France ne suivrait donc pas la directive dite de "retour" qui prévoit qu’un migrant aspirant à venir sur notre territoire aurait un délai pour quitter le territoire.
Pour Mireille Damiano, avocate au barreau de Nice et membre de l'association Roya Citoyenne, la décision rendue par la justice européenne est importante : "nous, on pense que c’est une bonne nouvelle, la fin d’une certaine forme de stigmatisation, la France doit s’adapter et prendre les mesures, on va être vigilants."
L’avocate précise par ailleurs que l’arrêt rendu est exigible à la fois aux frontières extérieures à l’union européenne et intérieures, donc en l’espèce ici entre l’Italie et la France.
Concernant la directive retour, créée en 2008, celle-ci stipule, rappelle Mireille Damiano, qu’"on ne peut pas systématiquement opérer un refus d’entrer à tous ceux qui le souhaitent, il devrait y avoir un délai durant lequel chaque cas soit examiné."
La France répond à la Cour de justice
Face à cela, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a réaffirmé samedi 23 septembre qu’il était nécessaire de continuer les contrôles tels qu’ils se font actuellement "au vu du contexte terroriste et migratoire".
Le ministre ajoutant : "Il est primordial que les services du ministère de l’intérieur, dans le contexte terroriste et migratoire que nous connaissons, puissent avoir les moyens de protéger les frontières. Le ministre y veille tout particulièrement". Des propos rapportés par nos confrères du Monde dans leur édition du 23 septembre.
Dans les faits donc, cette décision de justice n’a pas été suivie d’effets. Interrogée à ce propos par France 3 Côte d’Azur, la directrice de la PAF Emmanuelle Joubert précisait : "on a été informé de cette décision. L’État réalise actuellement une analyse. Nous, on est dans l’opérationnel, on devrait avoir des consignes plus tard".