Particularité géographique et historique, la commune de La Brigue se divise en deux parties. En cause, le traité de Paris qui a redessiné les cartes géographiques à l'est du département après la Seconde Guerre mondiale.
À la frontière italienne, une commune est divisée en deux parties, distinctes d'une poignée de kilomètres l'une de l'autre. La Brigue possède une exclave, soit un territoire séparé du reste de l'essentiel de ce village azuréen niché dans les montagnes.
Plus au nord, une partie de son territoire est détachée du reste de la commune. Une exception, qui puise ses racines dans les dispositions prises à la suite de la Seconde Guerre mondiale.
Une exclave, un massif
À l'extrême est du département, à la lisière du pays, c'est une zone frontalière avec l'Italie qui a été le théâtre d'une résolution politique au sortir de la Seconde Guerre mondiale. Un redécoupage territorial même, décidé lors du traité de Paris, en 1947.
Pour la commune de La Brigue, ce texte signé avec l'Italie après la défaite de l'Axe a une conséquence étonnante. Celle de créer une exclave à son territoire. Depuis, le massif du Marguareis est coincé entre la commune de Tende, française, et le sol italien.
Une situation dont s'amuse le maire sans étiquette de la Brigue, Daniel Alberti, encore aujourd'hui. Il loue les excellentes relations avec Tende, ce qui leur permet "d'y aller quand on veut."
Pourtant, "ce n'est pas simple, parce que c'est haut. Soit on passe en Italie, sur une partie du territoire qui faisait avant partie de la commune de la Brigue avant le rattachement de 1947, soit on passe par l'autre côté. On arrive par le nord, pour simplifier, et on monte au col de Tende par Casterino ou par Limone, et on arrive sur le Marguareis".
Rétrocession
Bien loin de la capitale, ce territoire minuscule a pourtant été sujet à enjeux géopolitiques dont la résolution a donné lieu à la création d'un territoire morcelé.
Dans cette partie de la haute vallée de la Roya, il n'y a rien, ou presque, à part des sentiers de randonnée, une vacherie et les restes d'une caserne militaire.
À l'origine de cette excroissance, "c'est, on va dire, un déplacement de la frontière dans la zone de Tende et la Brigue" évoque le maire. "Elle s'est déplacée sur une ligne de crêtes. Tende est restée ce qu'elle était, mais La Brigue a été coupée en deux pratiquement. Les anciens hameaux français sont soit devenus des communes, soit ont été rattachés à des communes plus grosses en Italie".
Sans habitant, mais pas sans intérêt
Ce territoire exclavé a priori désertique n'est pas pour autant dénué d'intérêt, explique le maire de la Brigue : "C'est un endroit où on ne va pas souvent, parce qu'il y n'y a pas d'habitants. C'est une zone où il y a deux activités principales".
Le massif est très prisé par les amateurs de marche et de randonnée, mais aussi par les passionnés de VTT, les motards ou les voitures, car il y a un circuit très connu, c'est la haute route du sel.
L'hiver, avec la neige, la route est coupée, mais l'été, c'est un endroit qui est magnifique.
Daniel Alberti, maire sans étiquette de La Brigue
C'est un lieu où les férus de spéléologies aiment évoluer. "Plusieurs clubs régionaux, et même internationaux, viennent prospecter chaque année et y trouvent de nouveaux passages" se réjouit Daniel Alberti.
Cette population en quête d'aventures souterraines ne pose pas de problème. "Ils viennent en camping, ils demandent l'autorisation, tout se passe très bien."
Terre de pastoralisme
Sur ces hauteurs, où la cime du massif se dresse à plus de 2650 mètres d'altitude, "il y a des éleveurs de la Roya qui mette des moutons et des vaches l'été parce que c'est une zone qui reste verdoyante même avec le climat qui ne cesse de se réchauffer, d'année en année".
Une activité qui reste synonyme de rentabilité : "La vacherie est toujours fonctionnelle. C'est modeste, mais elle est toujours là, on l'entretient. On y met des panneaux solaires l'été pour que les bergers puissent recharger leur téléphone et appeler en cas de problème".
Nous, on est très attachés au pastoralisme. Au-delà des petites rentrées financières, ça entretient la nature. À cette altitude, il y a une espèce qui s'appelle le rhododendron qui est très envahissante.
Daniel Alberti, maire sans étiquette de La Brigue
Une zone à péages
Cette particularité de l'exclave de La Brigue n'est pas la seule dans cette partie des Alpes-Maritimes. Il existe aussi un péage dans cette zone transfrontalière. Pour retoquer une trop forte présence des véhicules à moteur qui pourraient évoluer au sein de ce décor.
"La gestion des passages non pédestres, motorisés, est géré par GECT que l'on a créé". C'est un groupement européen de coopération territoriale créé pour faciliter la coopération transfrontalière entre des États membres.
Avec Tende et La Brigue en France, et notamment Limone en Italie, ce GECT permet d'entretenir cette route qui une ancienne piste militaire. Dans les années 2015-2016, des travaux d'ampleur à hauteur de 3 millions d'euros ont été attribués par l'Europe "car elle n'était plus carrossable".
Sur la partie italienne, on est dans un parc, il y a deux jours par semaine où les véhicules à moteur sont interdits. Il n'y a que les vélos qui sont autorisés.
À chaque extrémité de cette route, par rapport au Marguareis, il y a une personne qui fait payer les gens qui passent. De mémoire, c'est 20 euros pour une voiture, 15 euros pour un quad et 10 euros pour une moto.
Daniel Alberti, maire sans étiquette de La Brigue
Des rentrées d'argent qui permettent d'"entretenir la route, tous les printemps". Ces péages éphémères disposent d'une guérite, et des réservations pour des droits de passage sont même possibles. En effet, un quota de véhicules à ne pas dépasser est établi chaque jour où le péage est en fonction.