Quel est ce bateau qui vogue au large de Menton depuis plus d'un mois ?

Un mega-yacht baptisé le "Q" stationne au large de Menton dans les Alpes-Maritimes depuis plus d'un mois. Une situation qui exaspère riverains et écologistes.

Après le "A", yacht à moteur à voiles propriété d'un oligarque russe qui a croisé au large d'Antibes, voici le "Q" ! 

Beaucoup ont aperçu ce méga-yacht de plus de 68 mètres de long et 14 de large dans la baie de Menton. Une présence qui interroge et inquiète les riverains. 

Sur les réseaux sociaux, les commentaires se succèdent sous la photo du bateau : 

"C'est une verrue dans le paysage mentonnais ! Et en plus, il pollue !! Il serait bon de lui suggérer de partir voir ailleurs !!", s'insurge une internaute. "Il attend pour être approvisionné en gasoil." Un autre affirme : "C’est un bateau de la marine militaire" et, plus inquiétant, "c'est Poutine qui nous espionne."

Il prend tous les jouets possibles, plateforme hélico, sous-marin pour 3 personnes, snow mobiles, jet skis, plongée, etc. Mais ce n’est que l’annexe ! Son nouveau super yacht n’est pas encore sorti du chantier naval.

un internaute.

Groupe Facebook INFOS ACTIFS à MENTON 2023

Mines de nickel et jacuzzi

En effet, le "Q" a été construit en 2012 et était un bateau briseur de glace jusqu'à sa transformation en un luxueux yacht en 2019. À l'époque, il était baptisé "Sanaborg" puis "Ragnar". Il navigue depuis le 20 juillet dernier sous le pavillon des îles Cayman. 

Il appartenait à un oligarque russe, Vladimir Strzhalkovsky ex-officier du KGB. Ce proche de Vladimir Poutine doit sa richesse à l'exploitation des mines de nickel en Sibérie. Sa fortune était estimée à 400 millions d'euros. Son fils, Eugénie Strzhalkovsky est implanté sur la Côte d'Azur : il est président de l'Association historique des sports de combat médiévaux (Historical Medieval Battle International Association (HMBIA) basée à Monaco.

En 2023, soit près de deux ans après le début de la guerre en Ukraine, le bateau a été racheté par un milliardaire américain, Roy E.Carroll qui l'a rebaptisé le "Q" pour la modique somme de 85 millions de dollars. 

D'après le site "Superyacht fan", le bateau dispose ;

  • d'un jacuzzi,
  • d'une aire d'accueil pour un hélicoptère,
  • de jet skis,
  • et d'un sous-marin.

Il peut accueillir 18 personnes et 13 membres d'équipage. 

Absence de contrôle du méga-yacht

Frédérique Lorenzi, présidente de l'ASPONA (Association pour la sauvegarde de la nature et des sites de Roquebrune-Cap Martin, Menton et environs) a alerté les autorités maritimes. 

Elle se demande : "Pourquoi ce bateau n'est pas sur le point de mouillage des gros navires ?"

Selon elle, il a forcément obtenu une Autorisation d'Occupation Temporaire (AOT) car il est présent depuis plus d'un mois au large de Menton. Ce qui l'inquiète aussi, c'est l'absence de contrôle pour un méga-yacht qui doit être autonome en eau potable et en vivres. Elle s'interroge : "qui va relever les cuves ? Est-ce que c'est fait ou non ? Et qui contrôle ? On n'a aucune info..."

Détérioration de la flore

Autre crainte, dans les petits fonds marins de Menton, il y a beaucoup de cymodocées qui tiennent le sable et des herbiers de posidonie. Une flore essentielle et fragile.

Elle précise : "Une fois qu'on entaille ce tapis, c'est trop tard, il faut beaucoup de temps pour reconstituer la flore. C'est un milieu qu'on connait mal et qu'on protège mal."

La chaîne, qui doit peser 200 kilos, peut ravager les fonds marins et, au passage, déranger les cétacés. Son tirant d'eau actuel serait de 3,5 mètres.

"C'est vraiment une verrue"

À l'extérieur, ce n'est pas mieux. En stationnant en mer, le bateau consomme davantage de carburant pour maintenir ses installations.

On a une moindre pollution quand le bateau est dans le port, car il peut se raccorder pour l'électricité.

Frédérique Lorenzi, présidente de l'ASPONA

Sans oublier les eaux de vaisselle et les eaux grises qui se perdraient dans la Méditerranée, sans subir de contrôle des autorités. 

Pour elle, le préjudice visuel est aussi important : "C'est vraiment une verrue, on n'est pas en guerre, on n'a pas besoin d'avoir ce bateau dans son champ de vision."

Sur le site Marine Traffic, on peut voir que le bateau ne bouge pas. 

L'Aspona surveille, comme des sentinelles de l'écosystème, le respect des lois censées protéger la faune et la flore. Et ce n'est pas de tout repos ! 

Une réglementation initiée en 2020 pour les bateaux de plus de 20 mètres, commence seulement à être mise en vigueur. Cet été, les bateaux s'étalaient le long de la côte. Et ils sont de plus en plus nombreux à cause notamment du nouveau port de Vintimille en Italie.

L'association constate aussi que les habitudes des yachts ont changé. Soit, ils se déplacent dans des endroits plus sauvages et peu contrôlés, comme la Mortola après la frontière italienne, soit ils restent à côté du port pour économiser du carburant.

Frédérique Lorenzi tente une proposition osée : "Quand la mer est à 28 degrés, il faudrait diviser la fréquentation des bateaux par 2, sur le même modèle que les voitures lorsqu'il y a une pollution à l'ozone."

En attendant, le "Q" poursuit ses vacances. Il continue à voguer face à Menton, toujours au même endroit, nuit et jour.

Comme un rocher de 867 tonnes. 

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