L'explorateur Rémi Camus a rallié Calvi en Corse à Monaco à la nage en 14 jours, un exploit sportif dont le message est d'abord environnemental. France 3 Côte d'Azur l'a interrogé après son arrivée sur la plage de la Principauté.
Il a réussi son défi : traverser la Méditerranée à la nage.
À 37 ans, l'aventurier et explorateur français, originaire du Cher, vient de boucler Calvi-Monaco à la seule force des palmes, soit 180 kilomètres en 14 jours.
Un exploit d'autant plus que la Méditerranée n'a pas failli à sa réputation, capricieuse et dangereuse.
Ce mardi 20 juin, à son arrivée sur le sable blanc de la plage du Larvotto, Rémi Camus est à bout de souffle... Il était parti 3 heures auparavant de Roquebrune, cette dernière étape devait être facile.
Mais ce mardi 20 juin, la mer était particulièrement houleuse : "j'ai eu l’impression de tracter une armoire dans des creux de 3 à 4 mètres !"
Très vite, il reprend ses esprits face aux journalistes venus l'interroger.
On lui avait dit, après son Tour de France à la nage en 2018 : "Tu verras la Méditerranée c’est calme, c’est cool, c’est pas tout à fait ça ! On a tout eu, elle était déchainée !"
Baleines, dauphins, tortues et plastiques
Le sportif est content d'être arrivé sain et sauf mais il reconnaît que réaliser ce "projet en totale autonomie et sans assistance, ça c’était impossible".
Contrairement à d'autres défis, comme la descente du Mékong, la traversée du désert australien réalisés sans assistance.
Pas de chance sur les dates, cette période aura été une des pires fenêtres météo pour cette traversée !
Rémi Camus explique : "on a eu des orages, des courants très forts, mais c’est ce qui rend l’exploit fun ! Et on a pris le temps, pendant 15 jours on a vu des baleines, des dauphins, des tortues, des raies je me suis fait piquer par des méduses (...) On a une chance incroyable d’être dans des écosystèmes pareils. Dès qu’on se rapproche de la côte, on a l’impression d’être dans Starwars avec des morceaux de plastique qui partent dans tous les sens, y en a vraiment partout c’est impressionnant, si on veut continuer à en profiter il faut le préserver."
Une aventure sportive et humaine
Rémi Camus a dû modifier son programme et son itinéraire pour arriver à Monaco. Une performance possible grâce à son équipe.
Un rythme intense : il nageait 4 heures le matin, pause déjeuner sur sa plateforme et 4 heures l'après-midi.
Le plus difficile ? Nager toute la journée dans des milliards de mètres cube d'eau… Et ne pas avoir une seule goutte d’eau à boire ! Il devait pomper de l'eau pour la désaliniser et la rendre potable.
Tests salivaires, solitude et produits lyophilisés
Le défi est aussi scientifique. Rémi Camus travaille avec le CHU de Grenoble pour voir comment le corps réagit lorsqu’il est confronté à un stress important et oxydant dans un environnement hostile. Il a réalisé des tests salivaires tous les matins. Il faut maintenant attendre les résultats.
L'esprit aussi est soumis à rude épreuve. Pendant près de deux semaines, Rémi est resté seul sur sa plateforme amarrée au bateau.
Voir cette publication sur Instagram
Il mangeait seul, des produits lyophilisés. Pas simple... car la barge prenait l’eau !
Il a d'ailleurs perdu quelques kilos. Deux semaines pendant lesquelles il s'est retrouvé face à lui-même : « Ça m’évite de faire des séances chez le psy ! ».
Grosse préparation physique
Depuis 12 ans, il entreprend des expéditions environnementales dans différents coins du globe. Son expérience lui permet d'affirmer : "l'aventure, c’est 70 % de préparation et 30 % de hasard."
Pour cette traversée, c'est 3 ans de préparation entre les sponsors et l'entraînement physique.
Voir cette publication sur Instagram
En août 2022, l'annonce du report à 10 jours du départ, lui avait donné un gros coup au moral.
"On a dû tout recommencer, reprendre les entrainements"
Anne-Soizic Bertin, skipper du bateau accompagnateur, a dû changer sa façon de naviguer : "J’ai l’habitude d’aller très vite sur les bateaux et là j’ai dû aller tout doucement."
Elle a surtout découvert "un personnage très fort avec un charisme, une volonté et une joie de vivre."
Face à la force des courants, des gros oranges très intenses et très méchants, elle confie à avoir eu peur pour Rémi : "On a dû le remorquer dans un endroit plus sécurisé."
Dès le départ, la traversée a été compliquée : "
On a vu le Cap corse pendant une semaine… la mer a été capricieuse, Rémi a mis beaucoup plus de temps que ce qu’il avait pu imaginer.
Rémi Camus.
Un défi en mode survie en solitaire. Rémi Camus ne devait pas avoir de contact avec son équipe, il devait seulement amarrer son bateau, "comme un cordon ombilical entre nous et lui".
Pour la suite, pas encore de projet bien défini, mais la préservation de la nature sera au cœur des préoccupations de cet aventurier multirécidiviste.
Reportage réalisé avec Emmanuel Félix.