Mauvaise nouvelle pour les allergiques. 90% des départements français sont en alerte rouge aux pollens. Le sud-est n'y échappe pas à l'approche du printemps. Et, comme un ennui n'arrive jamais seul, les prochaines semaines ne devraient rien arranger.
Sortez vos mouchoirs... C'est le précoce retour des pollens. Si vous avez les yeux qui grattent, le nez qui pique et une toux sèche, vous êtes frappé des premiers symptômes touchant les personnes allergiques.
Le Réseau National de Surveillance Aérobiologique (R.N.S.A.) est formel : les premiers pollens saisonniers sont libérés !
Pas de chance pour ceux, de plus en plus nombreux, qui les redoutent.
La quasi-totalité des départements de province ont au moins une espèce de pollen qui a atteint le maximum de l'échelle, tout comme l'Île-de-France. 10 départements seulement n'atteignent pas ce niveau d'alerte.
Le pollen, cet Hyde et Jekyll
Il est produit par les fleurs mâles et contient le patrimoine génétique de la plante. D'un côté, le meilleur, il est indispensable à la reproduction des végétaux et à la vie des pollinisateurs qui s'en nourrissent.
D'un autre côté, quand il entre en contact avec les voies respiratoires d'une personne allergique, le système immunitaire s'emballe et provoque les symptômes d'un rhume des fois (ou rhinite allergique). C'est la surréaction du système immunitaire, avec notamment la production massive d'IgE (des immunoglobulines présentes dans l'organisme) face à ces particules qui ne représentent, normalement, pas de danger pour la santé.
Dans 70 % des cas, les gens allergiques le sont à plusieurs choses - on dit alors qu'ils sont "polysensibilisés". Certaines personnes peuvent être allergiques à un seul arbre, la gêne peut durer alors deux ou trois semaines. Mais, difficulté supplémentaire du phénomène, la plupart sont souvent perturbées pendant des mois. C'est une vraie souffrance entre avril et juin, au moment des pics polliniques. C'est également une extrême fatigue.
La précocité croissante des allergies
D'abord, il y a les faibles pluviométries de ces derniers mois dues à un anticyclone sur tout le pays. Ensuite les températures anormalement douces de ce faux printemps. Un soleil quasi omniprésent et du vent qui favorise la dispersion. Le cocktail est détonnant : la floraison précoce des arbres, notamment les espèces les plus allergisantes, frappe précocement puisque le phénomène se produit habituellement début mars.
Selon une étude publiée dans la revue internationale Nature, d'ici à 2100, la période de pollinisation pourrait débuter jusqu’à 40 jours plus tôt, prendrait fin 19 jours plus tard et engendrerait une augmentation de 40 % de la production de pollen.
En avance, le maudit pollen est de surcroit plus concentré !
Cela étant, cette précocité de février n'est pas inédite, mais ce sont surtout les quantités de pollens dans l’air qui sont fortes cette année.
L’impact du réchauffement climatique
L’augmentation des quantités de pollen suit la courbe de celle des températures. Moralité: le réchauffement climatique a un lien direct avec les allergies. D'ailleurs, si la dégradation climatique continue sur sa lancée, on s’attend à avoir 50% de personnes allergiques en 2050 contre 30% actuellement, selon l'OMS, l'organisation mondiale de la santé des Nations unies. Il n'y en avait que 5% il y a 30 ans !
C’est un vrai phénomène dont les maladies inhérentes se développent surtout dans les pays industrialisés. Les chercheurs du RNSA (Réseau national de surveillance aérobiologique) sont affirmatifs. Non seulement le réchauffement climatique aggrave les risques, mais il rend aussi les pollens plus allergisants.
La logique est imparable : hausse des températures + concentrations de CO2 = croissance augmentée des plantes et des arbres qui émettent plus de pollens. Puisque les hivers sont de plus en plus doux et que certaines espèces fleurissent de plus en plus tôt dans la saison (comme le noisetier par exemple), le temps d'allergie devient lui aussi de plus en plus long.
Un autre problème est à poser en corollaire : la répartition de certaines espèces change. Il y a celles qui grimpent en altitude, celles qui remontent vers le nord, comme les cyprès, les chênes ou l’ambroisie, une plante exotique particulièrement envahissante et hyper allergisante. Il y a également celles qui régressent, comme les hêtres et les bouleaux, qui souffrent des canicules. Bref, c'est explosif pour les sinus et les bronches !
Dans les Alpes-Maritimes et le Var, ce sont les cupressacées (cypères, genévriers...) qui présentent actuellement l'impact sanitaire le plus élevé, suivis par l'aulne, le noisetier ou le frêne.
La majoration par la pollution
Vous le savez déjà certainement : la pollution atmosphérique exacerbent joyeusement les allergies aux pollens dans la plupart des grandes villes. Celles de la Côte d'Azur ne font pas exception à la règle.
La pollution, en ozone l’été, aux particules fines en hiver, (un pic a été recensé mi-février), exacerbe les allergies en attaquant la structure des grains de pollen. Ces grains libèrent des protéines émises en plus grande quantité. De plus, la pollution fragilise les voies respiratoires et les pollens y rentrent plus profondément.
Les cyprès, cauchemar des allergiques
Dans les années 70, alors que les bouleaux étaient plantés dans le nord du pays, c'est le cyprès qui avait la préférence dans le sud et sur l'ensemble du pourtour du bassin méditerranéen. À présent, les plantations se sont étendues et cet arbre est désormais implanté sur la totalité du territoire.
Ces plantations génèrent des allergies très incommodantes qui touchent un nombre croissant de personnes.
Car, malheureusement, les pollens de Cupressaceae-Taxaceae génèrent des allergies particulièrement élevées. Les journées venteuses, douces et ensoleillées sont redoutées des allergiques. Ecoulement nasal, yeux qui brûlent, conjonctivites et gêne respiratoire deviennent alors leur quotidien. C'est là que les antihistaminiques et les collyres entrent en jeu.
Le plus redouté est le cyprès commun-cyprès de Provence (Cupressus sempervirens) que l'on retrouve bordant de nombreuses allées et dans les jardins.
Comme la période de pollinisation du cyprès s’étend, selon les régions, de janvier à avril, il est tout à fait possible de souffrir de rhinite allergique en plein cœur de l’hiver.
De plus, une allergie aux pollens de cyprès est souvent croisée avec une allergie au genévrier et au thuya.
Les concentrations de pollens de cyprès vont continuer d’augmenter dans les semaines à venir pour atteindre un pic fin février.
Les recommandations du Haut conseil de la Santé publique
La rhinite allergique semble être une maladie bénigne, mais c'est un véritable problème de santé publique. Un quart des Français est touché par une allergie respiratoire avec les conséquences évidentes sur la qualité de vie. C'est également la maladie chronique la plus fréquente chez les enfants.
Il convient d'abord de suivre les traitements prescrits par son médecin. Puis de suivre l’évolution des risques via les cartes de vigilance publiées sur le site du RNSA.
L'objectif est d'éviter d'être au maximum en contact avec les substances allergisantes. Pour limiter les réactions allergiques :
- aérer son logement de préférence, le matin avant le lever du soleil ou le soir, après son coucher. A ces moments-là, les pollens sont moins dispersés dans l’air.
- éviter de sortir en fin de matinée et d’après-midi, périodes au cours desquelles les pollens sont les plus présents, et par temps sec.
- ne pas jardiner ni rouler avec la fenêtre ouverte en voiture
- éviter les activités extérieures, comme le sport, en cas de pic de pollens
- limiter les autres substances irritantes ou allergisantes (tabac, parfums, encens, bougies, produits d'entretien)
- rincer ses cheveux le soir, pour éviter de respirer toute la nuit les pollens qui s’y sont collés en journée
- nettoyer les fosses nasales
- faire sécher son linge en intérieur plutôt qu’en extérieur
Les symptômes provoqués par les allergies aux pollens sont de plus en plus violents et s’accompagnent de plus en plus souvent d’allergies croisées alimentaires.
Un répit temporaire dès que la pluie arrivera
Le médecin allergologue Véronique Lustgarten n'est pas optimiste "On annonce un nuage de poussière venant du Sahara et cela va encore aggraver le sort des allergiques puisque, en plus du pollen, il y a la pollution, plus cette poussière qui va jouer un rôle de sur-polluant."
Après le sable, l'eau ? L'annonce des précipitations ces prochains jours constitue une excellente nouvelle pour les allergiques, car la pluie plaque les pollens au sol.
Si, de surcroit, les températures baissent à nouveau, la floraison des arbres ralentira. La gêne et la fatigue des allergiques avec.
Mais hélas, pas de quoi se réjouir longtemps : les pollens seront de retour dès que le soleil reviendra.