Anne Murris a perdu sa fille Camille, âgée de 27 ans, le 14 juillet 2016 lors de l'attentat de Nice sur la Promenade des Anglais. A l'ouverture du procès ce 5 septembre, elle est venue à Paris en tant que partie civile.
Après l'attentat du 14 juillet 2016 à Nice, elle était devenue un visage familier. Anne Murris est la maman de Camille décédée lors de cette terrible attaque. Dans la salle des pas perdus de la cours d'assises spéciale de Paris, elle a accepté de répondre à nos questions.
France 3 Côte d'Azur : Qu'est-ce qui va se jouer dans ce procès pour vous ?
Anne Murris : L'association Mémorial des Anges se porte partie civile dans cette procédure judiciaire. L'association a fait un gros travail depuis le mois de septembre 2021 pour essayer d'inviter le maximum de victimes à se constituer partie civile parce que le statut de victime répond à certaines choses mais le statut de partie civile répond à d'autres attentes. Evidemment, certaines victimes avaient déjà des conseils donc nous leur avons suggéré de continuer à travailler avec les avocats qui les avaient pris en charge pour leur dossier du Fonds de garantie, d'autres n'en avaient pas et certaines ont choisi de prendre l'avocat de l'association.
Vous disiez que cette journée vous rappelle d'autres journées au lendemain de l'attentat. Que voulez-vous dire par là ?
Ce début de procès est une journée très difficile. Il y a beaucoup de reviviscence. J'éprouve exactement le même sentiment qu'il y a six ans en arrière lorsque j'étais à la recherche de ma fille Camille et que j'allais à la maison des victimes pour savoir si on avait des nouvelles. J'ai exactement ces mêmes sentiments : il y a beaucoup de souffrance, de tristesse, de désarroi et de la peur aussi. C'est un très gros mal-être qui m'a envahi dès la veille du procès lorsqu'on est arrivés à Paris. J'avais beaucoup d'émotions. J'étais en pleurs. C'est très compliqué.
Vous comptez rester toute la première semaine du procès à Paris ?
Je ne sais pas, il faut que je me ménage parce que j'ai des problèmes de santé. Je vais voir comment je vais supporter ces premières journées. Je verrai ce que mon corps est capable de supporter.
Sur quelles questions en particulier attendez-vous des réponses ?
Toutes les questions qui seront abordées sont importantes. Elles répondent à des problèmes des familles. Par exemple, le prélèvement d'organes est quelque chose de très difficile à vivre pour les familles concernées. Il faut leur apporter une réponse. On est dans l'obligation de leur apporter ! Certaines personnes sont toujours en attente des organes de leur enfant. Après, d'une manière plus générale, ce qui me semble important, c'est d'avoir la vérité. Mais la vérité, pour connaître quel est le degré d'implication des différentes personnes qui sont dans le box et pouvoir établir leur connaissance exacte et précise de cet attentat, pour que les peines les plus justes possibles soient prononcées.
Nous, nous souhaitons que les sanctions soient le plus sévères possibles. C'est dans ce sens que travaille l'association. Bien évidemment, en étant très respectueuse du droit et de l'État de droit qui est le nôtre, mais qu'elle soit le plus sévère, nous croyons en la valeur pédagogique de la sanction, mais nous croyons aussi en la valeur dissuasive d'une sanction.
Anne Murris, ce 5 septembre.
Ces sanctions seront non seulement une réponse pour les victimes mais aussi une réponse pour la société en général. Cela va être la réponse judiciaire de la lutte contre le terrorisme.
Vous portez aujourd'hui le collier vert et le collier rouge des parties civiles. Celui qui indique que vous acceptez de parler à la presse et celui qui indique que vous refusez. Qu'est-ce que cela traduit sur votre état d'esprit ?
Anne Murris : C'est parce que je suis là sans être là. Je suis là physiquement, j'essaie d'être le mieux possible mais mon esprit est de partout. Je suis là, mais je suis ailleurs. Je suis prise dans ma propre souffrance. C'est compliqué pour moi parce que bien évidemment, j'ai ma fille en moi et c'est le plus dur."