Toutes les mesures de sécurité étaient-elles en oeuvre quand l'attaque au camion-bélier a frappé Nice le 14 juillet 2016 ? Entendu comme témoin assisté, le maire de Nice Christian Estrosi renvoie à la responsabilité de l'Etat et au manque d'avancées légales en matière de vidéosurveillance.
Le 14 juillet 2016, pendant le traditionnel feu d'artifice, Mohamed Lahoueij-Bouhlel fonce sur les spectateurs au volant d'un camion de 19 tonnes. On déplore 86 morts et 450 blessés.
Presque trois ans après cet attentat meurtrier, la justice essaie de répondre à une question : les autorités ont-elles pris toutes les mesures pour sécuriser cet événement qui rassemble 30.000 personnes ?
Entendu comme témoin assisté, Christian Estrosi, aujord'hui maire de Nice, 1er adjoint à Philippe Pradal au moment des faits, pointe du doigt la responsabilité de l'Etat.
Une enquête ouverte, avec 150 parties civiles
Christian Estrosi, son premier adjoint Philippe Pradal et le préfet des Alpes-Maritimes de l'époque Adolphe Colrat ont été récemment interrogés par les juges d'instruction comme témoins assistés, un statut intermédiaire entre simple témoin et mis en examen.
Face aux magistrats, les deux élus ont affirmé avoir réclamé "les mêmes conditions de sécurisation que celle du carnaval ou de l'Euro" de football et respecté "à la lettre" les demandes de la préfecture.
Si on avait demandé à la Ville d'appliquer un système étanche, nous l'aurions fait. In fine, c'est la hiérarchie de l'Etat qui arbitre
a expliqué Christian Estrosi, estimant aussi qu'il revenait au préfet de le contacter, lui ou Philippe Pradal, s'il y avait eu le moindre problème. Pour lui, les festivités du 14 juillet avaient été "autorisées par l'Etat".
Des réunions préparatoires décortiquées par les magistrats
Les magistrats veulent comprendre pourquoi un dispositif fermé, avec barriérage et filtrage du public, proposé le 28 juin 2016, a été finalement écarté le 7 juillet. Ni messieurs Pradal, Estrosi ou le préfet n'assistaient à ces réunions.
Le dispositif ouvert a bien fait l'objet d'un choix clair, partagé par l'Etat et la ville
a pour sa part exposé aux juges le préfet Colrat lors de son audition le 10 mai, soulignant la bonne entente qui régnait avec la mairie.
Une vidéo-surveillance dédiée à l'élucidation
Autre question : la vidéo-surveillance, dans une ville passée de 280 caméras en 2008 à plus de 2.300 aujourd'hui, n'aurait-elle pas pu permettre de détecter les multiples repérages de l'assaillant ? Le camion de Lahoueij-Bouhlel a été filmé à de multiples reprises
les jours précédents sur la promenade des Anglais.
"A quelques exceptions près, c'est un outil essentiellement dévolu à l'élucidation", répond Christian Estrosi qui ajoute que si le conducteur du camion "avait été vu et interpellé à temps, cela aurait justifié un timbre amende de 22 euros" seulement. "En l'état actuel, seule l'intelligence artificielle pourrait permettre de déceler un repérage", assure-t-il, se plaignant de ne pouvoir légalement mettre à l'essai des dispositifs d'expérimentation.