Près d'un demi-siècle après l'adoption de la loi légalisant l'IVG en France, focus également chez nos voisins, Monaco et l'Italie, où la question de l'avortement n'est pas entièrement résolue.
Ce mercredi sort sur les écrans de cinéma "Simone, le voyage du siècle", un film qui retrace la vie de l'ancienne ministre de la Santé Simone Veil. Décédée il y a cinq ans, la Niçoise, rescapée du camp d'Auschwitz, s'est notamment battue pour légaliser l'avortement en 1974.
"C'est terrible ce qu'elle a pu entendre à l'époque !", raconte Claire Moracchini, conseillère conjugale et familiale au Planning familial 06. "Elle n'a pas été toute seule à porter ce projet et à affronter le machisme, il y avait aussi tout un mouvement féministe et des médecins qui voyaient des femmes qui s'auto-avortaient dans des conditions épouvantables."
On lui doit beaucoup !
Claire Moracchini, Planning familial 06
Depuis, la loi a fait son chemin en France. En 2021, 223.300 interruptions volontaires de grossesse (IVG) ont été enregistrées.
10% des IVG ont lieu en PACA
Dans la région PACA, l'année dernière, 22.663 IVG ont été pratiquées ; c'est la troisième région qui en dénombre le plus (derrière l'Île-de-France et Auvergne-Rhône-Alpes).
"Dans les Alpes-Maritimes, on ne rencontre pas trop de difficultés", assure Claire Moracchini. "Les centres IVG de chaque ville assurent les IVG correctement et beaucoup de praticiens sont formés à l'IVG médicamenteuse."
Le Planning familial 06 note toutefois deux points noirs. "Beaucoup d'hôpitaux n'appliquent pas encore les deux semaines supplémentaires, il faut donc aller à l'hôpital de Nice si on veut être prise en charge entre 14 et 16 semaines", poursuit Claire Moracchini.
Second problème : "il y a souvent des dépassements d'honoraires à la charge de la patiente, ce qui est illégal".
Monaco : l'IVG légalisée... en dehors de la Principauté
Si l'avortement est encadré et pris en charge en France, ce n'est pas le cas à Monaco, par exemple..
Sur le Rocher, le recours à l'avortement a été dépénalisé très récemment, fin 2019, par le Conseil national (depuis 2009, seules les grossesses issues d'un viol pouvaient être interrompues). Jusqu'alors, les femmes qui le faisaient risquaient de six mois à trois d'emprisonnement et une amende pouvant atteindre 18.000 euros.
Mais il s'agit là d'une demi-décision pour cet État dont le catholicisme est religion nationale. Car, si les femmes ont désormais le droit de disposer de leur corps, les médecins monégasques, eux, n'ont pas le droit d'accéder à leurs demandes. La pratique de l'avortement reste interdite, avec une peine de cinq à dix ans d'emprisonnement et d'une incapacité d'exercer qui peut être définitive.
Autre conséquence : "la sécurité sociale monégasque ne rembourse pas cet acte", précise Claire Moracchini, qui coûte 189€.
Interrogé, le Conseil national confirme que cette situation est toujours d'actualité. Le pays entrant dans la campagne pour les élections nationales de février prochain, la question d'une dépénalisation de l'exercice de l'avortement n'est pas à l'ordre du jour.
Italie : des médecins objecteurs de conscience
En Italie, l'avortement a été dépénalisé quelques années après la France, en 1978. Mais, dans la pratique, les obstacles sont nombreux pour y recourir. Un rapport du ministère de la Santé italien publié l'année dernière a recensé, en 2019, 67% de gynécologues qui se disent "objecteurs de conscience".
En effet, la loi précise qu'un médecin peut refuser de pratiquer un avortement pour des raisons religieuses ou personnelles. Mais si tel est le cas, un médecin non-objecteur doit être présent dans le même hôpital, ce qui est loin d'être le cas, relatent nos confrères de La Croix.
Ce droit pourrait-il être modifié ou supprimé ? Le 25 septembre dernier, Giorgia Meloni, la présidente du parti nationaliste Fratelli d'Italia, est arrivée en tête des élections législatives italiennes. La fin du droit à l'avortement n'est pas au programme mais, selon nos confrères de 20 Minutes, la Romaine de 45 ans considère l'avortement comme une "défaite".
Constitutionnalisation
En France, il n'est pas question, pour l'instant, de revenir sur la loi Veil de 1974.
Avec la montée de l'extrême droite un peu partout, on peut imaginer que ce droit soit remis en cause un jour. Pour nous, inscrire ce droit dans la constitution, ce serait une manière de le pérenniser.
Claire Moracchini, Planning familial 06
"Simone, le voyage du siècle", d'Olivier Dahan, avec Elsa Zylberstein, Lilou Kintgen, Rebecca Marder... (2h20) Sortie le 12 octobre 2022, Warner Bros.